Economie

Mauvaise gouvernance d’une banque : source de tous les maux ?

Compte tenu du faible degré de performance bancaire relevé au Burundi, il s’est avéré impérieux de connaître la place des mécanismes de gouvernance bancaire dans l’explication de cette situation. Les banques bien gouvernées sont plus performantes que leurs homologues mal gouvernées. Le Cahier du CURDES No 19 (Centre Universitaire de Recherche pour le Développement Economique et Social) en dit long

Depuis 2008, les banques du Burundi contribuent au Produit Intérieur Brut (PIB) dans l’ordre de 53%. Cela prouve l’importance de leur poids dans l’économie du pays. Cependant, l’inclusion financière est très faible au Burundi comparée à celle des pays de l’East African Community (EAC). Cela ressort du document « Etudes sur macroéconomie publique et régionale, efficacité, banques et IMFs et promotion de l’entrepreneuriat » (Cahier du CURDES no 19). Dans ce document, l’article produit par Faida Cathérine  et Révérien Nizigiyimana intitulé « Analyse de l’incidence des mécanismes de gouvernance bancaire sur la performance des banques commerciales au Burundi » explique beaucoup plus cette situation.

Selon les données publiées par Finscope relatives aux taux d’accès aux services financiers formels en 2015, les taux d’inclusion financière au Kenya et en Tanzanie  sont respectivement de 40,5% et 16,7%. Elles sont respectivement de 21% et 22%, en Ouganda et au Rwanda. Au Burundi, ce taux est plus faible et préoccupant, soit 1,9%.

Selon le rapport sur la Stabilité financière 2016 de la Banque de la République du Burundi (BRB), le Burundi reste en arrière en matière de performance bancaire au niveau de l’EAC. Au moment où  les crédits non performants en Tanzanie, en Ouganda, au Kenya et au Rwanda sont, en 2015, respectivement de 8,6%, 5,1%, 6% et 6,2% ; au Burundi, ils sont de 17,9%. Aussi, au Burundi, la rentabilité des actifs bancaires est faible par rapport à celles des autres pays de l’EAC. Par exemple, en 2015, au moment où en Tanzanie, en Ouganda, au Kenya et au Rwanda, elle était respectivement  de 2,9%, 3,6%, 4% et 2,7%. Au Burundi, elle était de 1,9%.

En plus de cela, les capitaux propres affichent une faible rentabilité au Burundi. Elle était, en 2015, de 11,5% au moment où en Tanzanie, en Ouganda, au Kenya et au Rwanda elle était respectivement de 22,2%, 22,6%, 26,4% et 15,7%.

Les crises bancaires résultent en grande partie de la mauvaise gouvernance des banques.

Pourquoi une faible performance des banques commerciales au Burundi ?

Les banques biens gouvernées sont plus performantes que leurs homologues mal gouvernées et les crises bancaires résultent en grande partie de la mauvaise gouvernance des banques. 

La gouvernance des entreprises bancaires se caractérise par des mécanismes internes ayant pour objectif d’influencer et de surveiller le comportement du dirigeant. Le conseil d’administration  étant un organe qui trace toutes les orientations de la firme bancaire, il constitue un acteur important dans le processus de gouvernement de la  banque. Il est donc responsable de l’efficacité des mécanismes de gouvernance et spécifiquement des systèmes de contrôle interne.

Dans le système de la  gouvernance bancaire, la structure actionnariale acquiert aussi une grande importance. L’efficacité du système de gouvernance bancaire dépend de la nature des actionnaires, de leurs objectifs et de l’étendue de leurs actions disciplinaires. Les différents actionnaires devraient agir sur l’équipe managériale de la banque plus efficacement que la discipline des marchés. Ils sont aptes à limiter la latitude discrétionnaire de l’équipe managériale. Ils sont généralement représentés au conseil d’administration et contribuent à l’élaboration des stratégies de la banque et au contrôle des dirigeants.

Mais les dirigeants d’une banque prennent quotidiennement pas mal de décisions plus ou moins stratégiques que les actionnaires n’ont pas la capacité de contester et qui peuvent leur être défavorables. Donc le conseil d’administration est mieux indiqué pour conduire ou pas l’institution aux meilleurs résultats. En plus de cela, l’étatisation du capital des banques commerciales influe souvent sur leur performance financière. La présence de représentants de l’Etat au conseil d’administration des banques s’est révélée comme une cause importante de manque d’efficacité bancaire.

Privilégier des mécanismes externes de gouvernance

La gouvernance bancaire est fait de manière que le contrôle de la direction soit assuré par des parties extérieures à l’entreprise tels que le marché du travail, le marché des capitaux, etc. Les mécanismes de gouvernance bancaire ont une importance capitale dans l’explication de la performance bancaire au Burundi. La présence d’administrateurs étrangers au conseil d’administration et la régulation des capitaux propres en réponse au respect d’une règlementation financière plus rigoureuse  affectent positivement la performance des banques respectivement au seuil de 10% et 1%. La taille du conseil d’administration ainsi et la présence des administrateurs étatiques au conseil d’administration ont, de leur côté, une incidence négative respectivement au seuil de 5% et 1%.

Pour y remédier, les auteurs du Cahier du CURDES no19 suggèrent aux managers des banques commerciales burundaises d’éviter de gonfler la taille du Conseil d’administration de leurs banques. Il vaut mieux capitaliser l’expérience des administrateurs étrangers se trouvant dans le conseil d’administration de leurs banques respectives. Ils recommandent aussi à l’Etat de diminuer son influence dans la prise des décisions au sein du conseil d’administration en ramenant sa représentation au strict minimum. L’Etat pourrait aussi céder ses parts d’actions aux privés pour ne s’occuper essentiellement que de ses missions régaliennes.

Description du paysage bancaire au Burundi

Le système bancaire du Burundi est composé de la banque centrale, des banques commerciales et des banques de développement économique et social. Le système bancaire burundais présente des traits similaires aux autres secteurs bancaires africains. Il s’agit notamment d’un système bancaire oligopolistique dominé par les banques commerciales au détriment des institutions financières spécialisées. Seules quelques banques à dominance commerciale se partagent pratiquement l’ensemble du marché. Selon le rapport de Stabilité financière 2016 de la BRB, sur un total de 10, le secteur bancaire est dominé par trois banques les plus anciennes  (BCB, BANCOBU et Interbank Burundi). Elles se partagent à elles seules plus de 55% de l’actif, 50,7% du crédit et de 67% des dépôts du secteur.

Source : Cahier du CURDES No 19

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A propos de l'auteur

Gilbert Nkurunziza.

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