La petite taille du parking, le laboratoire non équipé, la coupure récurrente d’électricité, la faible connexion à l’internet, les déclarants non compétents, le paiement des pots de vin sur certaines barrières, etc: tels sont les défis auxquels est confronté le poste frontière à arrêt unique de Kobero. Au moment où «time is money» d’après les anglophones, ces défis font trainer les opérations. Les camionneurs perdent beaucoup de temps en route et les consommateurs en paient un lourd tribut
En guise de lancement du projet de promotion du commerce sain, le ministère en charge des affaires de la Communauté Est Africaine, de la Jeunesse, des Sports et de la Culture en collaboration avec les agences du secteur privé facilitant le commerce a effectué une visite guidée ce jeudi 24 septembre 2020 au poste frontière à arrêt unique de Kobero. L’objectif est de s’enquérir du trafic cargo actuel, des opportunités et des défis éventuels.

Visite guidée jeudi le 24 septembre 2020 au poste frontière à arrêt unique de Kobero pour s’enquérir du trafic cargo actuel, des opportunités et des défis éventuels.
Ce projet financé par TradeMark East Africa vise le renforcement des capacités techniques de la CFCIB et de ses chambres sectorielles ainsi que l’appui au Comité National d’ Elimination des Barrières Non Tarifaires (dont la CFCIB est déjà membre) afin de permettre à ces chambres sectorielles d’être de véritables acteurs proactifs de cette région de l’East African Community.
Les défis constatés
Selon Eric Ntangaro, représentant de l’Association des Transporteurs Internationaux du Burundi (ATIB), pas mal de défis s’observent au poste frontière à arrêt unique de Kobero. La taille du parking réservé aux poids lourds est petite alors que les camions qui y passent sont nombreux. Pour essayer de gérer cette situation, on fait payer un montant de 100 USD à tout chauffeur qui dépasse 3 heures au parking. De plus, les camions qui transportent les produits pétroliers et les autres produits partagent le même parking. On craint qu’un jour un scandale n’éclate. On n’a même pas prévu un véhicule anti incendie pour éteindre les flammes lors d’un incendie. De plus, des barrières non tarifaires existent encore. On cite celle située à l’entrée du chef lieu de la province Muyinga. On arrête les camions sous prétexte de les contrôler. Selon Ntangaro, on fait trainer ces camions alors qu’ils courent avec le temps. Les policiers demandent aux chauffeurs étrangers des poids lourds de leur donner un fanta (isoda). Selon l’ATIB, ce comportement salit l’image du pays en général et de la province de Muyinga en particulier. Selon toujours lui, certains déclarants affichent une incompétence non justifiée. Ils sont lents dans leurs réactions et ils le font exprès. Selon lui, certains chauffeurs jugent bon de leur offrir des pots de vin en guise de motivation. De plus, il s’observe des chevauchements entre les services du BBN et de la Santé Publique. Ils ne parviennent pas à distinguer leurs rôles respectifs.
Que disent les déclarants pour promouvoir le commerce sain ?
Selon Philippe Bigirimana, représentant de l’association des déclarants et transitaires, cette association joue un rôle d’intermédiaire entre l’OBR et les opérateurs économiques. Cependant, les déclarants n’ont pas de connaissances suffisantes pour accomplir leur mission. «La formation des déclarants et transitaires professionnels est problématique même si ce programme qui concerne tous les pays de l’EAC existe depuis 2009», précise-t-il. Il fait savoir que seulement 262 déclarants ont été déjà formés. Selon toujours lui, cet effectif n’est pas suffisant, car on a encore besoin de pas moins de 500 déclarants. Vu les erreurs commises par les déclarants à Kobero, il indique que ces derniers estimés à 50 ont besoin de cette formation. Ils seront formés sur place pour ne pas perturber les activités. Pour booster le rendement à ce poste frontière, il demande la mise en place d’une grande bande passante pour remédier au problème lié à la connexion à l’internet.
Suppression des frais pour tester la Covid-19
Amida Uwingabiye, représentante de l’association des femmes commerçantes qui exercent le commerce transfrontalier se réjouit de la suppression de la décision de l’Etat de faire payer 50 dollars pour les chauffeurs et convoyeurs des poids lourds pour un test de dépistage de la Covid-19. Cependant, les supprimer pour cette catégorie de femmes qui utilisent de petits capitaux est aussi une nécessité. Selon elle, ce montant est exorbitant pour ces femmes qui aspirent devenir des opérateurs économiques de haut niveau dans le futur. Elle demande aussi aux services qui travaillent au poste frontière à arrêt unique de Kobero de travailler 24 h sur 24 h. Selon elle, cela va diminuer les frais destinés à leur hébergement.
Quand le consommateur en paie un lourd tribut
Selon Denis Nshimirimana, vice-président de la CFCIB, il s’observe des barrières injustifiées à Bujumbura. Les barrières de l’OBR, des agents des services de renseignement, de la mairie, etc. Selon lui, toutes ces barrières doivent être supprimées car elles allongent la durée de transport. Ce qui se répercute sur le prix des produits. Le consommateur en paie un lourd tribut. Selon toujours lui, certains commerçants ne maîtrisent pas le dédouanement suite aux connaissances insuffisantes. Les commissionnaires s’en mêlent moyennant de l’argent sous prétexte de les aider pour s’en sortir illico. Et d’ajouter que certains chauffeurs ont aussi besoin de formations sur le dédouanement. A titre d’exemple, ils doivent connaître les dossiers exigés par les services de dédouanement.
Selon le représentant de l’OBR, il y a certaines avancées dans le processus de la suppression des barrières non tarifaires à Kobero. A titre d’exemple, les offices chargées de collecter les recettes (OBR et Tanzania revenue Authority) travaillent dans le même bureau depuis un certain temps. Les activités commencent à 6h du matin pour se clôturer à 20 h. Néanmoins, il signale certains défis. Il s’agit des problèmes liés au change suite à la suppression des bureaux de change par la BRB. De plus, les procédures de contrôle de la qualité sont jugées trop lentes. Le pire est que le laboratoire installé à cet endroit pour le contrôle des normes de qualité n’est pas fonctionnel suite au manque d’équipements. On prélève les échantillons qui sont testés à Bujumbura. On attend les résultats pendant au moins 48 h. D’autres défis relevés concernent l’insuffisance des kits médicaux pour tester la Covid-19. Les files d’attentes deviennent longues et les commerçants perdent leurs temps. La capacité des entrepôts de Kobero est petite par rapport aux marchandises qui transitent par ce poste frontière. Et d’ajouter les coupures intempestives d’électricité et la connexion internet déficiente qui mettent l’huile sur le feu.
TradeMark East Africa se réjouit de cette initiative
Christian Nibasumba, Représentant Pays de TradeMark East Africa (TMEA) se réjouit de lancer ce projet qui vise à renforcer la capacité du secteur privé burundais à résoudre les différents problèmes récurrents de manque de communication et de coordination entre les différents acteurs opérant dans la chaine d’approvisionnement en commençant par l’axe le plus fréquenté du Corridor Central-Kobero. Il a rappelé que le secteur privé burundais doit être renforcé par la mise en place des cadres de plaidoyer solides et efficaces garantissant la mise en œuvre des mécanismes adaptés pour supprimer les différentes barrières non tarifaires qui, hélas, persistent. Au niveau du TradeMark East Africa qu’il chapeaute, on espère des résultats visant à répondre à certains problèmes auxquels le secteur privé est confronté au jour le jour.

Les transporteurs ont du mal à traverser le poste frontière à arrêt unique de Kobero. Toutefois, 95% des marchandises qui entrent dans le pays transitent par ce poste.
Certes, Nibasumba fait remarquer qu’il serait trop ambitieux de penser à la résolution effective de tous les défis affectant l’environnement des affaires avec ce projet. Néanmoins, au sein de TMEA on croit fermement qu’avec un cadre régulier de rapportage de toutes ces barrières encourues par les déclarants, les transitaires, les commerçants transfrontaliers, les chauffeurs de poids lourds et autres institutions en charge de faciliter le commerce, on pourra effectivement y remédier.
La Covid-19, un danger imminent pour le commerce
Malheureusement, Nibasumba s’inquiète du fait que la pandémie Covid-19 menace d’annuler les gains économiques qu’on a accumulés au fil du temps. Les frontières terrestres agissent comme des canaux de transmission entre les pays simplement en raison de leur nature et, avec la propagation rapide du Covid-19, il est essentiel d’appliquer des mesures de sécurité aux frontières pour un commerce plus «sûr». Les frontières ont connu les pires embouteillages de l’histoire. Même dans cette période de pandémie de Covid-19, le commerce reste le moteur vital qui alimente l’économie burundaise. «Nous tenons donc à ce que TMEA aide à la fois le secteur privé et le gouvernement à innover dans le but de garantir que nos économies rebondissent et prospèrent», conclut-il.
Les actions de TMEA contre la Covid-19
En réponse à la pandémie, TMEA a développé un programme d’urgence pour un commerce sûr (STEF) avec le soutien de l’UE, du Kenya, de l’UKAID, de DANIDA, du Canada, de l’Irlande, de la Finlande et d’autres donateurs et en partenariat avec les gouvernements. Le programme d’urgence pour un commerce sûr soutiendra une série de mesures critiques à court et moyen terme qui garantiront que le commerce en Afrique de l’Est se poursuit et est sûr, évitant les pertes d’emplois et protégeant les moyens de subsistance. On a profité de cette occasion pour livrer des Equipements de Protection Individuels (EPI) au Poste Frontière à Arrêt Unique de Kobero en partenariat avec le gouvernement du Burundi à travers le soutien de l’UKAID. Les EPI seront également distribués à deux autres points frontaliers-Gatumba et peut-être Mugina Manyovu. Il y a eu une pénurie d’EPI aux frontières pour les opérations de première ligne. Cette livraison est la première d’une série de mesures qui garantiront que le port, les frontières et les chaînes d’approvisionnement critiques sont sans danger pour le commerce. D’autres interventions à déployer dans le cadre du STEF comprennent: Le déploiement d’interventions technologiques qui permettront au commerce de continuer à avancer. Par le biais de la CAE et en partenariat avec tous les Etats membres de la CAE, on va bientôt lancer une application mobile de suivi des chauffeurs de camions conçue pour faciliter l’accélération des formalités de passage des frontières pour les chauffeurs de camions, car l’application permet le partage des certificats numériques de la CAE qui sont reconnus par les ministères de la Santé de la CAE. TMEA reconnaît le partenariat et le soutien de l’UKAID qui a généreusement étendu le financement pour soutenir le programme de commerce sûr du Burundi afin de garantir que ces EPI soient déployées en un an. Il reconnait particulièrement le soutien cordial de tous nos donateurs (Belgique et Pays-Bas). Ézéchiel Nibigira, ministre en charge des affaires de la Communauté Est Africaine, de la Jeunesse, des Sports et de la Culture promet de travailler en synergie avec les autres partenaires pour inverser la tendance. La promotion du commerce sain est la priorité du gouvernement.
Notons que depuis que le monde en général et le Burundi en particulier est menacé par la pandémie de la Covid-19 et que presque toutes les frontières ont été fermées, 95% des marchandises entrent par le poste frontière à arrêt unique de Kobero située à Muyinga.
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