Depuis l’apparition de la pandémie de coronavirus, le commerce transfrontalier est réduit à sa plus simple expression au poste-frontière de Ruhwa. Les petits commerçants subissent, malgré eux, les effets de cette longue interruption des affaires imposée par des raisons sanitaires. Les autorités provinciales regrettent les conséquences de cette fermeture des frontières
Aux environs de 15 heures, nous débarquons au poste-frontière de Ruhwa, entre le Burundi et le Rwanda. Du côté du Rwanda et du Burundi, la morphologie des montagnes surplombant l’étroite plaine dans laquelle est logée la rivière Ruhwa est amplement la même. Cet endroit qui était auparavant marqué par un grand mouvement de gens entre le Burundi et le Rwanda est aujourd’hui vide d’hommes. A notre arrivée, seul un policier qui semble gagné par la solitude veille sur une barrière qui n’est jamais levée depuis de longs mois. « Non, personne n’a le droit d’entrer dans la zone depuis que les bureaux de la PAFE (Police de l’Air, des Frontières et des Etrangers) sont fermés », a rétorqué le policier à qui nous adressions notre intention de visiter les locaux de la PAFE. Un peu plus loin, à une centaine de mètres, le drapeau burundais flotte dans les airs.
Déjà mis à mal par la crise socio-politique déclenchée en 2015 au Burundi suivie des conflits entre les deux pays jumeaux (Rwanda et Burundi), le coronavirus rendra la situation plus pire. Depuis l’apparition de cette pandémie qui s’est imposée en arbitre des mouvements entre pays, ce poste-frontière est totalement fermé. De l’autre côté de la rivière Ruhwa, on peut apercevoir des Rwandais qui descendent s’approvisionner en eau au niveau de cette rivière. C’est le même scénario pour les Burundais de cette contrée. En effet, les populations frontalières des deux pays doivent partager le problème d’accès à l’eau propre.

Avec la fermeture du poste-frontière de Ruhwa, les populations frontalières ont subi des pertes énormes.
Des échanges mis à mal
Avant que la fermeture totale des frontières ne soit décidée par les hautes autorités au nom de la sécurité sanitaire des deux pays, cette frontière servait de lieu de négoce pour de nombreux opérateurs économiques. Burundais, Rwandais et Congolais échangeaient des marchandises ou traversaient la frontière pour des raisons variées dont la trame de fond était des opérations économiques. Selon des témoignages recueillis sur place, des produits agricoles burundais étaient exportés au Rwanda. Les premiers bénéficiaires du commerce entre les deux pays étaient les dealers des fruits. Désormais, le marché est réduit et ce commerce est totalement handicapé. En revanche, les Burundais de la frontière affirment qu’ils avaient certains avantages à s’approvisionner en quelques biens au Rwanda. «Les téléphones mobiles étaient moins chers au Rwanda et on pouvait s’en approvisionner dans ce pays», nous a expliqué un habitant d’un petit centre érigé non loin de la frontière qui regrette la fermeture des frontières entre les deux pays.
« A part les échanges rwando-burundais, de nombreux Congolais empruntaient cette route pour entrer au Burundi en traversant le Rwanda », nous a confié une source anonyme. Dorénavant, ils ont une seule porte d’entrée, celle de Gatumba disposant d’un service médical pour le dépistage de la Covid-19 pour tout voyageur. Selon cet homme qui indique que la population a subi des pertes énormes, le gouvernement devrait faire tout ce qui est possible pour permettre un mouvement au niveau de ce poste-frontière.
La réouverture du poste-frontière de Ruhwa se fait toujours attendre
Interrogé sur la réouverture de la frontière entre le Rwanda et le Burundi, Ruben Tubirabe, conseiller du gouverneur chargé du développement dans la province de Cibitoke chargé des questions économiques s’est montré optimiste. Selon lui, la province de Cibitoke ne pourrait pas rester à l’écart de la politique de rapprochement entreprise par les hautes autorités des deux pays. «L’Etat noue actuellement de bonnes relations avec le Rwanda et je crois que même notre gouverneur pourra peut-être rencontrer celui de la province frontalière du côté du Rwanda», indique cette autorité chargée des questions économiques dans la province de Cibitoke. Cependant, il rappelle que les frontières ont été fermées suite à des urgences sanitaires, d’abord le fameux virus à Ebola, puis la pandémie de Coronavirus. « Toutes les frontières sont actuellement fermées et le commerce transfrontalier a été suspendu » a-t-il fait savoir. Le chargé des questions économiques dans la province Cibitoke regrette le fait que les échanges ne sont plus possibles au niveau de ce poste-frontière.
A la question de savoir pourquoi ce poste-frontière n’a pas pu être ouvert alors que d’autres l’ont été, Tubirabe tente une explication. Pour lui, les portes d’entrée au Burundi sont assez nombreuses. « Peut-être qu’on a considéré les points d’entrée les plus mouvementés », a-t-il conclu. Pour lui, le commerce pratiqué au niveau du poste-frontière de Ruhwa n’est pas très consistant. Aussi fait-il savoir que la responsabilité de mettre en place tout ce qui est nécessaire à la rouverture de cette poste-frontière revient à l’Etat.
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