Société

Pourquoi le travail des enfants persiste-t-il encore ?

Malgré l’interdiction de toutes formes d’exploitation contre les enfants par l’OIT, l’évidence est que le travail des enfants   au Burundi reste une réalité. On en trouve encore sur les chantiers en train de fabriquer des briques cuites  dans les marais des collines Bwoga et Rukoba. Une question reste donc posée. Pourquoi trouve-t-on encore cette  forme d’exploitation  dans notre pays ?

Selon Jeanne Muhorakeye, habitant dans le quartier Bwoga I de la ville de Gitega (capitale politique du Burundi), l’exploitation des enfants en vacances continue dans certaines localités de cette ville.  Et cela se passe dans les quartiers en cours de construction. Elle précise que  les  enfants en vacances âgés de 10 à 12 ans  fourmillent d’un chantier à l’autre. Dans ces chantiers de fabrication des briques cuites, ils s’alignent  en file indienne. Ils sont là pour un même but.  C’est le transport des briques depuis les lieux de fabrication vers là  où se trouvent  les chantiers de construction. Ces chantiers se trouvent à une distance de 300 à 1000 m, soit à un kilomètre des lieux de fabrication de ces briques. Pour une brique arrivée à  destination, ils sont payés entre 2 F Bu et 3 F Bu.

Or, les conventions 138 (1973) et 182 (1999) de l’Organisation Internationale du Travail (OIT) stipulent  que l’âge  minimum légal de base auquel les enfants sont autorisés à travailler est 15 ans (14 ans dans les pays en développement). Pour les travaux légers (quelques heures uniquement et occasionnellement), la limite est fixée à 13-15 ans (12-14 ans dans les pays en développement). Enfin, pour les travaux dangereux, la limite est repoussée à 18 ans (16 ans sous certaines conditions dans les pays en développement).

Un travail de longue à haleine

Selon les propos recueillis auprès des enfants qui transportaient ces briques, ils effectuent  ce genre  de travail à cause de la pauvreté qui sévit dans leurs familles. Ninette Hakizimana nous a confié qu’elle transporte entre 15 et 20 chaque tour.  Le nombre de briques qu’elle transporte va  decrescendo suite à la fatigue et va jusqu’à transporter 10 briques le soir. Elle nous confie qu’elle arrive à transporter plus ou moins 400 briques avant midi et à peu près 300 briques après-midi.

Les enfants des collines qui surplombent la ville de Gitega sont utilisés dans le transport des briques depuis les lieux de fabrication jusqu’aux chantiers de construction.

Ninette Hakizimana explique qu’elles font ces genres d’activités  suite à la misère qui frappent leurs familles d’origine. Elle rassure qu’au lieu de rester à la maison sans de quoi  se mettre sous la dent, elle préfère venir travailler en vue de percevoir une somme si modique soit-elle.  Elle a ajouté que la plupart de ses collègues   habitent les collines qui surplombent la ville de Gitega, notamment Rukoba, Bwoga, etc. Elle nous a confié que cette  somme va l’aider à s’acheter des cahiers pour l’année scolaire prochaine.

Ignorance du droit et de la loi

Dans certaines localités des collines environnantes de la ville de Gitega, les enfants constituent la couche  la plus vulnérable et se retrouvent dans une situation qui hypothèque dangereusement leur avenir par le fait des adultes. Marc Havyarimana, propriétaire des briques que les enfants transportent sur la tête précise  qu’il a opté d’utiliser les enfants dans le but de réduire les coûts de transport pour ces briques. Il ne nie pas que cela soit une forme d’exploitation faite à ces enfants, mais précise qu’ils n’ont pas d’autres choix. Les conditions de vie les y obligent et ils doivent accepter n’importe quel salaire qui leur est proposé, martèle-t-il.

La loi devrait s’appliquer

Toutefois, le travail des enfants sous ses pires formes telles qu’elles sont définies par les conventions de l’Organisation Internationale du Travail (OIT) nuisent à la santé de ces derniers, compromettent leur éducation et conduisent à d’autres formes d’exploitation et de maltraitance.

Pourtant, le Burundi  s’est doté de plusieurs textes de lois interdisant toute forme d’exploitation économique et permettant à l’enfant de n’être astreint à aucun travail comportant des risques ou susceptible de compromettre son éducation ou de nuire à sa santé ou à son développement physique, mental, etc. Il est surprenant que certaines personnes passent outres ces lois en profitant de la naïveté de ces enfants pour les utiliser à leur profit. Et l’échec est là. Comment est-ce qu’on peut arrêter ce phénomène? Une question qui reste sans réponse, mais en mérite certainement une.

Le code pénal plus récent dans son article 18 portant code de l’enfant en République du Burundi est contre le travail des enfants. Et la FENADEB, dans son rapport de 2018, propose que face à cette situation alarmante que vivent les enfants, l’éradication de ce phénomène doit  passer par la lutte contre la pauvreté qui frappe la plus grande majorité des Burundais.

A propos de l'auteur

Ferdinand Mbonihankuye.

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Selon les récentes statistiques du Recensement Général de la Population, de l’Habitat, de l’Agriculture et de l’Elevage de 2024, Bujumbura est la ville la plus peuplée avec 3 353 555 habitants, suivie de Gitega avec 2 118 551 habitants, respectivement capitales économique et politique du pays. Cette croissance démographique, observée d’année en année, est inégalement répartie : une grande partie de la population vit désormais dans les quartiers périphériques. Certains y voient une aubaine, notamment en ce qui concerne la disponibilité de la main-d’œuvre. D’autres, en revanche, perçoivent cette situation comme une menace évidente. Une ville surpeuplée, si elle n’est pas bien urbanisée, peut en effet devenir victime de graves problèmes environnementaux.

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