Est-t-il possible d’éviter une crise agricole, de freiner le réchauffement climatique tout en maintenant une croissance économique durable ? Une réponse positive pourrait être trouvée dans les potentiels de la permaculture, une variante de l’agriculture biologique
Il existe globalement deux modes d’exploitation, à savoir agricole : l’agriculture conventionnelle et l’agriculture biologique. Comme l’explique Adrien Sibomana, expert en agriculture biologique,l’agriculture conventionnelle est un mode d’exploitation agricole intensive mécanisée qui recourt beaucoup à la chimie (herbicides, engrais, pesticides et fongicides). Quant à l’agriculture biologique, c’est un mode d’exploitation qui utilise les intrants naturels (souvent locaux) et qui protège l’environnement.

Pour réfléchir sur l’avenir de l’agriculture, il faudrait prendre en considération l’énergie, l’environnement, la santé… pour prendre des décisions politiques qui s’imposent.
L’agriculture biologique est une méthode de production agricole qui exclut le recours à la plupart des produits chimiques de synthèse, utilisés notamment par l’agriculture industrielle intensive depuis le début du XXe siècle, aux organismes génétiquement modifiés par transgénèse et à la conservation des cultures par irradiation. La fertilisation du sol et la protection des plantes doivent donc être assurées par d’autres méthodes. La permaculture étant une variante de l’agriculture biologique vise à assurer la reproduction d’écosystèmes agricoles s’approchant le plus possible d’écosystèmes naturels stables comme la forêt et valorisant l’énergie du soleil. Il s’agit d’une forme très élaborée d’agriculture sans labour, souvent appuyée sur l’agroforesterie.
La permacuture, meilleure méthode pour améliorer la richesse du sol
La permaculture est une étape beaucoup plus élaborée que l’’agriculture biologique en soi. Il s’adapte à chaque terrain, c’est-à-dire si on a un sol à cultiver, il faut l’analyser. En permaculture, on respecte la faune et on ne laboure pas. Quand on laboure, on fait échapper le carbone alors que si on ne laboure pas, on séquestre le carbone, c’est-à-dire que la matière organique dans le sol augmente. Et, pour enlever les mauvaises herbes, on procède au paillage. Chaque année, le champ d’un permaculteur s’enrichit davantage. On n’a plus besoin d’apporter des suppléments en engrais chimiques et des pesticides. Sibomana admet que quand on abandonne l’agriculture conventionnelle pour l’agriculture biologique, le miracle ne se produit pas automatiquement. C’est un investissement qui est rentable à long terme.
Il est scientifiquement prouvé que l’agriculture biologique est la mieux indiquée pour faire face aux changements climatiques, notamment à la sécheresse. Un sol qui contient beaucoup de matières organiques retient plus d’eau et résiste à l’érosion.
L’agriculture bio, un ami de l’environnement
Le respect des sols, de l’air, de l’eau, des espèces végétales et animales ainsi que le non recours à l’emploi des produits chimiques de synthèse et d’OGM, participent directement à la préservation de l’environnement.Le développement de l’agriculture biologique contribue également à ouvrir la voie d’un modèle de production efficace et rentable. Pour M.Sibomana, l’agriculture biologique est la meilleure tactique pour résister aux changements climatiques. En agriculture bio, on ne brûle rien dans le champ. Plutôt quand c’est nécessaire, on fait recours à des pesticides naturels (le ricin « ikibonobono », le tuthonia « intaruhunwa », capsicum…). Ces plantes sont présentes dans la nature et sont souvent éliminer par ignorance. L’implantation de ces arbres contribue également à la préservation de l’environnement.
Les engrais chimiques, ces produits qui tuent à petit feu
Même si elle a eu des résultats extraordinaires au cours du siècle passé, l’agriculture intensive mécanisée basée sur la chimie (engrais, herbicides, pesticides, fongicides) semble être à bout de souffle. L’utilisation des engrais chimiques n’est pas du tout maîtrisée, indique Sibomana. On applique le même engrais en ne tenant pas des besoins de chaque sol. Aussi, selon son expérience personnelle, l’expert indique que les insectes attaqueraient plus les champs cultivés avec des engrais chimiques que celui des champs bio. « Ce n’est pas pour rien que la nouvelle usine d’engrais FOMI produit un engrais à moitié organique et à moitié minéral et que la tendance est de produire 100% organique », dit-il. Ils savent qu’à la longue les engrais chimiques sont nuisibles à la santé des sols et surtout des consommateurs des récoltes qui en proviennent, ajoute-il. En Europe, les études ont montré que l’utilisation des pesticides chimiques serait à l’origine des maladies d’Alzheimer, de Parkinson et serait également la cause de beaucoup de cancers.

L’agriculture bio implique le respect des sols, de l’air, de l’eau, des espèces végétales et animales ainsi que le non recours à l’emploi des produits chimiques de synthèse et d’OGM
Dans l’agriculture biologique, l’utilisation des engrais chimiques est prohibée. On utilise l’engrais organique même si là aussi M.Sibomana déplore que parfois ce dernier n’est pas bien entretenu par les agriculteurs. Il est interdit d’exposer le fumier organique au soleil parce que dans ce cas l’azote s’évapore. Non plus sous la pluie.
Le mouvement « BOAM », le messager de l’agriculture bio
Adrien Sibomana est aussi président de Burundi Organic Agriculture Movement (BOAM), un mouvement d’agriculture biologique qui partage avec les autres mouvements d’agriculture bio des pays de l’EAC les normes et la marque « KILIMOHAI ».BOAM dispense des formations en Agriculture Biologique avec des cours et des brochures conçus en Kirundi.Il développe certaines chaînes de valeur (tomates, café, manioc, fruits et légumes), des fertilisants et des pesticides extraits des plantes locales. Le mouvement a également créé et formé des Groupes de Certification Biologique à travers le Système Participatif de Garantie (SPG) pour le marché local et régional et appuie les opérateurs dans la Certification Biologique par le Système de Contrôle Interne (pour l’exportation ailleurs que dans la Région). Pour Adrien Sibomana, l’objectif du mouvement n’est pas de devancer l’agriculture conventionnelle, mais plutôt de présenter une alternative afin que les gens choisissent celle qui leur convienne.
Des études récemment faites montrent que l’agriculture biologique permet d’économiser 10 à 21 euros par hectare et par an en raison des traitements insecticides qui sont évités. Pour M. Sibomana, il faudrait réfléchir sur l’avenir de l’agriculture d’une façon holistique, c’est-à-dire qu’il faut prendre en considération l’énergie, l’environnement et la santé pour prendre des décisions politiques qui s’imposent.
Les motivations des agriculteurs et des consommateurs peuvent être de meilleurs revenus, une meilleure santé au travail, la protection de l’environnement ou des produits perçus comme plus sains. L’élevage d’animaux dans les fermes biologiques doit respecter des conditions de vie plus respectueuses du bien-être animal que l’agriculture traditionnelle.
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