Développement

La reconstruction de l’ex-marché central, un espoir à l’horizon ?

Dans le but de revaloriser l’emplacement de l’ex-marché central de Bujumbura, le gouvernement a décidé d’y ériger un grand centre commercial. Ce projet remonte à 2014 mais, jusqu’à présent, les résultats ne sont pas palpables. Huit ans après l’incendie qui a ravagé ce marché, l’espoir de la concrétisation de ce projet se dessine

Le conseil des ministres qui s’est tenu  le 06 décembre 2020 a analysé parmi les propositions à l’ordre du jour celle de l’Association des Banques et Etablissements Financiers du Burundi (ABEF) de reconstruire de l’ancien marché central de Bujumbura. Comme on le lit dans le compte rendu de ce conseil des ministres, l’ABEF a adressé une requête au Gouvernement du Burundi allant dans le sens de construire un grand centre commercial sur le site de l’ex marché central du Bujumbura, présentée par les services de la Primature. Le dossier d’exploitation du site de l’ex-marché central de Bujumbura a fait l’objet d’analyse en conseil des ministres à maintes reprises depuis 2016.

Le marché central de Bujumbura a pris feu au matin du 27 janvier 2013 laissant derrière lui la destruction de toutes les marchandises qui s’y trouvaient et de toute la structure qui soutenait l’infrastructure.

L’ABEF, le messie attendu ?

A travers cette requête, l’Association des Banques et Etablissements Financiers du Burundi (ABEF) voudrait concrétiser son engagement à jouer un rôle moteur dans le développement du pays en général et celui de la ville de Bujumbura en particulier. Le collège des dirigeants des banques et établissements financiers a exprimé son intérêt pour le projet de développement d’un centre commercial sur la place de l’ex marché central de Bujumbura. Le secteur bancaire propose l’exécution de ce projet à travers un partenariat public- privé dont les actionnaires principaux seraient les banques et établissements financiers dont l’apport en capital viendrait des réserves d’investissement, et l’Etat du Burundi dont l’apport serait le terrain. Pour augmenter le capital, l’actionnariat pourra être ouvert à tout autre investisseur privé ou institutionnel selon les conditions qui seront définies dans les statuts d’une société d’investissement à créer à cet effet.

Le financement du projet sera constitué par le capital libéré par les banques et établissements financiers du Burundi à partir des réserves d’investissement, les autres investisseurs privés et institutionnels et les emprunts auprès des institutions financières internationales.

Un projet qui date de 2014

Les faits remontent à février 2014 lorsque le ministre des Transports, des Travaux Publics et de l’Equipement de l’époque a présenté en conseil des ministres un document qui exposait le sort réservé au terrain qui abritait l’ex-marché central du Bujumbura. Ce document proposait que ce terrain soit réservé à la construction d’un grand centre commercial dont les premières fonctions ressembleraient à celles assurées par le marché central. Le Conseil a adopté le projet étant donné que la réhabilitation de ce marché est impossible au regard du coût.

Par contre, les moyens propres du Gouvernement s’avèreraient difficiles à mobiliser, voire impossibles à réunir à court terme. Le recours à des investisseurs privés est donc plus qu’une nécessité et une urgence plus qu’une évidence au regard de l’état du site, apprend-on du communiqué du gouvernement.

En 2015, la société chinoise « Sino African Trading and Investment Initiative Co. Limited » a exprimé une demande de concession du terrain de l’ex-marché central en vue d’y construire un complexe commercial moderne. Comme il s’agit d’un investissement très lourd, la concession serait consentie sur une durée de 50 ans en vue de permettre à l’investisseur de récupérer les frais d’investissement, précise le communiqué du conseil des ministres du 28 février 2015. Cette société a été décriée par la société civile. Les activistes de la société civile doutaient des capacités techniques et financières de la société après 6 mois d’existence. Ils qualifiaient d’ailleurs l’attribution du marché de malversation économique. En conséquence, le gouvernement a pris la décision de retirer ce marché à cet investisseur chinois. Cela dans le but de donner la chance à tous les investisseurs Burundais ou autres qui veulent concourir.

Un projet stratégique qui fait peur ?

Dans un communiqué du conseil des ministres tenu en dates du 18 et 19 octobre 2017, le ministre en charge des finances a présenté une note d’information sur l’état d’avancement du dossier de construction du centre commercial. Il a précisé que les termes de références pour la sélection d’une société privée pour la construction d’un centre commercial moderne à la place de l’ex-marché central de Bujumbura se sont avérés infructueux. La date limite de dépôt des offres était fixée au 1er août 2017, mais aucune offre n’avait été déposée à cette date, reconnait le ministre des Finances  Domitien Ndihokubwayo.

Le mémorandum d’entente pour la construction de cette infrastructure économique a été finalement adopté par le conseil des ministres en septembre 2018. C’est la société chinoise Jiangxi Jianglian International Engineering qui a gagné le marché. Prosper Ntahorwamiye, secrétaire général et porte-parole du gouvernement de l’époque a indiqué qu’aucune offre n’a été réceptionnée dans les délais prévus par les termes de référence. Par conséquent, justifie-t-il, le gouvernement a décidé de sensibiliser ses partenaires pour les intéresser à ce projet. Et Ntahorwamiye de conclure que c’est la seule société qui a démontré les capacités techniques et financières en matière de réalisation de grands projets d’infrastructures.

Les TDR précisaient que ce centre commercial comprendra une infrastructure d’au moins 5 niveaux, un parking obligatoire pour 400 à 500 véhicules au sous-sol et en surface, des salles pour conférences, pour concerts, pour expositions, etc et un espace vert y sera aménager. Cependant, la durée des travaux et le coût estimatif du projet n’ont pas été dévoilés. Elle sera déterminée par l’attributaire du marché en fonction de l’étude de faisabilité. La société chinoise aurait eu dans ses attributions la réalisation des travaux architecturaux quitte à ce que la place de l’ex-marché central soit moderne et plus attractive. Les différents appels d’offres lancés ont été infructueux.

Le projet de reconstruction de l’ex-marché central qui date de 2014 n’est pas concrétisé jusqu’à présent.

Un mémorandum qui n’a abouti en rien

Paradoxalement, le Deuxième Vice-Président de la République a déclaré dans l’hémicycle de Kigobe que le gouvernement est à la recherche des fonds pour y ériger une infrastructure économique emblématique-une vitrine du pays, a-t-il dit.  Pour le moment, le dossier de la reconstruction de la place de l’ex-marché central de Bujumbura est dans les mains du ministère en charge des finances, selon un cadre de la deuxième vice-présidence contacté par téléphone. Notre source indique que le service en charge de la gestion du Partenariat Public-Privé (PPP) est compétent pour statuer sur le cas de la valorisation de l’ex-marché central. Nous avons essayé de joindre les responsables de ce service au sein du ministère en charge des finances.

Chadrack Niyonkuru, secrétaire exécutif des réformes « Doing Business » à la deuxième vice-présidence expliquait à notre rédaction  que le site de l’ex-marché central est stratégique. « Il est au centre-ville et les dimensions sont convenables pour pouvoir accueillir un grand centre commercial qui occupe toute la place », disait-il.

Un poumon de l’économie burundaise parti en fumé

Pour rappel, le marché central de Bujumbura a pris feu au matin du 27 janvier 2013 laissant derrière lui la destruction de toutes les marchandises qui s’y trouvaient et de toute la structure qui soutenait l’infrastructure. Il avait été construit en 1994, sur une superficie d’environ 3 hectares. Le coût de cette infrastructure s’élevait à 1, 5 milliard de FBu. Sa gestion était confiée à la Société de Gestion du Marché Central de Bujumbura (SOGEMAC). Cela pendant une période de 30 ans à travers le contrat d’affermage signé le 8 janvier 1999. Avant, le marché comptait 2092 stands. D’après le rapport qui a été juste fait après l’incendie, 5678 commerçants ont perdu leurs biens. Les marchandises brûlées représentaient plus de 68 milliards de FBu et environ 9 000 personnes ont perdu leurs emplois dont la plupart n’ont même pas  pu se recaser dans d’autres marchés.

Après échange et débat, le conseil des missions du 6 décembre 2020 a donné son accord de principe pour la poursuite du projet, mais  a souhaité que l’actionnariat soit ouvert à des gens qui ont des capacités financières suffisantes car il s’agit d’une infrastructure qui demandera beaucoup de moyens. Il a été recommandé aux représentants de l’Etat et à ceux de l’Association des Banques et Etablissements Financiers de se mettre ensemble pour élaborer une feuille de route ainsi qu’un chronogramme des activités et, le cas échéant se donner un échéancier clair et précis du début et de la fin de l’exécution des travaux, pour que le centre soit effectivement opérationnel dans des délais raisonnables. Espérons que le projet ne tombera encore dans l’eau.

A propos de l'auteur

Dona Fabiola Ruzagiriza.

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