Agriculture

Sécurité alimentaire : Le « grenier » du Burundi se revivifie-t-il ?

La production agricole sera bonne dans la province de Kirundo. Les producteurs se frottent les mains. Cependant, le spectre d’une insécurité alimentaire plane sur la région de Bugesera : 26 000 ménages sont concernés. Le gouverneur de la province de Kirundo appelle à la solidarité locale. A court terme, des projets d’irrigation seront réalisées pour pallier au problème de déficit hydrique

La production céréalière sera bonne en province de Kirundo. Les plaines et les bassins versants verdoyants est un signe éloquent que la pluviométrie y est abondante. Les champs de cultures de maïs, de sorgho, de tournesol ou de riz s’étalent sur les bassins versants des lacs du Nord. La région est très fertile et la productivité s’annonce bonne. Les producteurs récoltent rapidement le haricot au risque que les graines pourriraient sous l’effet de la pluie. Les gousses pullulent sur les cours intérieures des ménages. Curieusement, le système de séchage des haricots a remplacé le « rugo » traditionnel. Les producteurs ne trouvent pas assez de séchoirs.

Par le passé, la population de cette localité a connu des épisodes de disettes à répétition. Depuis l’an 2000, environ une saison culturale sur deux est perturbée à cause du déficit hydrique. Cela est à l’ origine des déplacements des populations. En 2010, le bulletin mensuel du Bureau Intégré des Nations Unies au Burundi a rapporté 12 000 personnes exilées et 38 cas de morts suite à la famine. On parle des crises humanitaires dites Gasahani ou  Gakwege. Mais pour le moment, rassure le gouverneur actuel Albert Hatungimana, les efforts consentis portent déjà des fruits. La province redevient progressivement le grenier du Burundi.

Comment en est-on arrivé là ?

La province  de Kirundo jadis considérée comme le grenier du Burundi a connu des problèmes récurrents d’insécurité alimentaire. Le gouverneur de Kirundo expose le nœud du problème. Pour la culture emblématique du haricot, les communes de Bugabira, Busoni et Bwambarangwe se taillaient la part du lion. Les autres communes ne venaient que pour compléter la production. Or, ces communes se situent dans la région naturelle de Bugesera durement touchée par les changements climatiques. Ces derniers se traduisent par une faible pluviométrie. Les agriculteurs perdent leur récolte, car le plus souvent la pluie tarit en pleine saison culturale et les cultures s’assèchent. Ou bien la saison sèche se prolonge jusqu’au mois de novembre.  Les producteurs se résignent et migrent vers d’autres régions à la recherche des revenus.

Actuellement, les signes précurseurs sont là. La province de Kirundo est en passe de redevenir le grenier du Burundi. La récolte est bonne, certifie M. Hatungimana.

L’insécurité alimentaire est un phénomène récurrent dans la région de Bugesera. Pour endiguer ce phénomène, le gouvernement prévoit la mise en place d’un système d’irrigation.

Le gouverneur appelle à la gestion efficiente des récoltes

Les cultures vivrières constituent la principale source de revenus pour les agriculteurs. «Dans une réunion de sécurité de ce mardi 12 janvier 2021, il a  été décidé de suspendre la commercialisation des récoltes pendant au moins deux semaines», a expliqué à notre rédaction le gouverneur de la province Kirundo Albert Hatungimana. Après deux semaines, rassure-t-il, il y aura une évaluation de cette mesure afin d’autoriser le commerce du haricot vers d’autres provinces. Le gouverneur de la province de Kirundo se veut rassurant quant à une meilleure productivité durant la saison culturale A. La province de Kirundo demeure le « grenier » du Burundi en dépit des perturbations climatiques qui frappent une partie de la région de Bugesera, insiste le gouverneur Hatungimana.

Certains agriculteurs affirment recourir à des pratiques illégales comme l’usure pour payer les travailleurs saisonniers ou régler les factures ; bref subvenir à leurs besoins. « Nous travaillons à perte. Le prix bord champ oscille autour de 800 FBu alors que les semences ont été achetées entre 1 800 et 2 000 FBu. Parfois, les commerçants viennent s’approvisionner à 600 FBu le kilo, déplore un agriculteur rencontre à Busoni avec une satisfaction relative de la production du haricot. La conservation des récoltes reste un défi pour la plupart des ménages. Cela permettrait aux producteurs de dégager une marge bénéficiaire en décalant  la commercialisation des produits par rapport à leur période de récolte. Le gouverneur encourage plutôt les producteurs à stocker leur récolte dans les hangars destinés à cette fin au lieu d’écouler toute la production sur le marché à des prix dérisoires

L’insécurité alimentaire risque de perdurer

Les agriculteurs de certaines localités ne vont pas produire. Il pleut abondamment sur une colline alors qu’il y a un soleil de plomb sur un autre, explique le gouverneur Hatungimana. On note des perturbations pluviométriques dans les communes de Kirundo, de Busoni et de Bugabira. Environ 26 000 ménages ne vont pas récolter a l’issue de la saison culturale A.

Ils sont dans le désarroi total. Les cultures de haricot et de maïs ont été endommagées par le soleil alors qu’elles étaient au stade de floraison. Le gouverneur appelle à la solidarité locale pour voler au secours des familles en difficulté. Ainsi, cinq tonnes de vivres dont une tonne de pommes de terre, une tonne de haricot et une tonne de farine ont été collectées. Les contributions monétaires s’élèvent à 1,5 million de FBu. Ce montant servira à l’achat d’autres denrées alimentaires qui seront distribuées aux nécessiteux. Les communautés pourront également s’entraider en créant de l’emploi dans les travaux champêtres au profit des victimes des changements climatiques.

Une lutte acharnée contre l’insécurité alimentaire

L’insécurité alimentaire est un phénomène récurrent dans la région de Bugesera. Pour endiguer ce phénomène, le gouvernement prévoit la mise en place d’un système d’irrigation des champs. Le gouverneur de la province de Kirundo en révèle certains de ces projets mis en route pour améliorer la sécurité alimentaire.

La province de Kirundo dispose de  sept lacs. Paradoxalement, les populations riveraines sont plus affectées par les conséquences du changement climatique. Le développement des techniques d’irrigation collinaire est une priorité pour combattre l’insécurité alimentaire, dixit le gouverneur Hatungimana. Le projet pilote sera réalisé sur le littoral du lac Rweru. Le chantier de construction d’un grand réservoir d’eau d’une capacité de 600 m3, soit 600 000 litres est en cours dans la commune de Busoni, zone Gatare précisément sur la colline Gatete. Ensuite le programme va s’étendre sur d’autres zones déficitaires en eau, précise-t-il.

Des prévisions météorologiques au service de l’agriculture

Un projet financé par  le PNUD et mis en œuvre par l’IGEBU est en passe d’être clôturé. A terme, ce projet va faciliter l’interprétation des prévisions météo agricoles. Il s’agit de développer un système d’alerte précoce sur les risques de catastrophes. Dans le cadre de ce projet, des stations météorologiques satellitaires ont été érigées dans les zones ciblées et un système de suivi de la montée des eaux des lacs et des rivières a été mis en place. Il ne reste qu’à opérationnaliser le canal de diffusion des informations à travers le renforcement des capacités des agents communautaires qui informeront en temps réel sur la bonne période de semis ou l’imminence des catastrophes.

Introduire les cultures maraîchères 

L’administration invite la population à développer les cultures maraîchères tout près des lacs. Pour y arriver, les agriculteurs doivent se regrouper dans des coopératives. L’union fait la force dit-on. Bugesera est une région propice à la culture des oignons. Les agriculteurs manquent parfois des débouchés en cas de surproduction. Le gouvernement préconise le rachat du surplus des récoltes. La surproduction des oignons pose problème, déplore le gouverneur Hatungimana.

Pour concilier l’agriculture et l’environnement, la protection des terres arables est obligatoire. Les producteurs intègrent les techniques agricoles modernes. Des fossés antiérosifs ont été tracés sur des terrains à fortes pentes. Pour lutter contre la désertification, le cabinet provincial encourage la reforestation et le recours aux foyers améliorés pour ralentir le rythme de déboisement.

A propos de l'auteur

Benjamin Kuriyo.

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