Transport

Transport transfrontalier : derrière le volant, la sueur

Les conducteurs de poids lourds burundais dénoncent leurs conditions de vie et de travail le long des corridors. Routes dégradées, insécurité liée au banditisme, manque d’eau potable, absence d’aires de repos, de latrines et de structures d’urgence ; tels sont les principaux défis auxquels ils sont confrontés. Ils saluent néanmoins le projet de construction d’un chemin de fer à écartement standard et expriment leur souhait d’être formés à la conduite des locomotives

Elissa Iteriteka, conducteur de poids lourds : « Les enfants et les cyclistes accrochés aux camions dans la localité de Bujumbura volent les flexibles pneumatiques. Ce qui entraîne des accidents liés à la perte du système de freinage ».

« Je démarre le véhicule à 5 heures du matin. Je roule jusqu’à midi, moment où je prends une pause d’environ trente minutes pour manger et me reposer. Ensuite, je reprends la route jusqu’à 23 heures», explique Elissa Iteriteka, conducteur de poids lourd, père d’un enfant, âgé de 26 ans et résidant au Nord de Bujumbura, capitale économique du Burundi.

Il précise toutefois que lorsqu’il roule sur de longues distances, comme 500 km, et ressent de la fatigue ou de la somnolence, il s’arrête immédiatement pour se reposer.

M. Iteriteka indique avoir effectué plusieurs trajets internationaux, notamment vers la Tanzanie, le Kenya et l’Ouganda, il y a deux de cela ans.

Stress sur les corridors

Selon M. Iteriteka, de nombreuses barrières le long des corridors freinent l’exercice serein de leur métier. Il souligne notamment l’insuffisance d’aires de repos sécurisées, obligeant parfois les chauffeurs à se rabattre sur des parkings privés comme celui de Ngozi, à Kurya Mivo, moyennant parfois paiement des frais.

Il note que la gare routière de Bujumbura est l’un des rares points de repos reconnus au Burundi.

« Certaines routes du pays sont encore en mauvais état. Mais nous reconnaissons les efforts du gouvernement, notamment sur des axes stratégiques. Par exemple, la route Bujumbura–Muramvya, endommagée du côté de Bugarama, a été réhabilitée », déclare-t-il.

M.Iteriteka regrette toutefois que de nombreux tronçons restent dégradés, parsemés de nids-de-poule et cite la route menant vers Ngozi, particulièrement étroite et traversant une zone montagneuse à risques d’éboulement comme étant très dangereuse, surtout en cas d’intempéries.

L’absence de centres de santé le long des routes pousse les chauffeurs à recourir à des motos-taxis pour atteindre les hôpitaux les plus proches en cas d’urgence.

« En matière d’hygiène, il est difficile de trouver des latrines publiques pour se soulager ou des douches pour se laver. L’accès à l’eau potable via des robinets publics reste également un défi majeur », déplore-t-il.

La sécurité, un autre combat

Le conducteur s’inquiète de la montée de l’insécurité sur certains tronçons, notamment entre Bugarama et Ngozi, au niveau de Bandaga, commune de Matongo (province de Kayanza), et dans la zone de Maridadi située à la frontière entre Kayanza et Ngozi.

A Bujumbura, des enfants ou des cyclistes s’accrochent aux camions en mouvement pour voler les flexibles pneumatiques, un acte extrêmement dangereux.

« Ces flexibles sont essentiels pour le système de freinage (TLERA). Leur absence peut entraîner un dysfonctionnement total, provoquant des accidents routiers graves », alerte-t-il.

Edouard Nimpagaritse, un autre chauffeur d’une trentaine d’années, père de quatre enfants, partage son expérience.

« Il arrive que des voleurs brisent les cadenas, coupent les cordes ou endommagent même les scellés de l’Office Burundais des Recettes (OBR) après le chargement. Cela se produit souvent dans certaines localités de Ngozi. Dans certains cas, ce sont les chauffeurs eux-mêmes qui sont accusés à tort de complicité. »

La fatigue, aggravée par l’état dégradé des routes et la multiplication des postes de contrôle, allonge considérablement les trajets. Les coûts de transport augmentent, rendant l’activité moins rentable.

Un espoir sur les rails

M. Nimpagaritse se réjouit du projet de construction d’un chemin de fer à écartement standard, coordonné par le Corridor Central, reliant la Tanzanie, le Burundi et la RDC.

« Ce projet représente une grande avancée pour notre pays. Il serait essentiel que les chauffeurs burundais soient formés à la conduite des trains. Cela ouvrirait de nouvelles opportunités d’emploi et encouragerait les investissements locaux dans le secteur ferroviaire. »

Pour Déo Ntibibuka, Administrateur Directeur Général d’International Freight Logistics (IFL), société spécialisée dans le transit et le dédouanement, une fois opérationnel, le chemin de fer contribuera grandement à la croissance économique du pays. Le rail reste le mode de transport le plus économique, conclut-il.

A propos de l'auteur

Mélance Maniragaba.

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