Editorial

Un projet qui se saborde de lui-même

Le gouvernement a initié un projet emblématique, il y a de cela cinq ans. Il s’agit de la construction d’une Zone Economique Spéciale (ZES), un modèle économique utilisé par pas mal de pays pour booster leurs économies. Le processus est assez long. D’abord, une commission technique chargée de la mise en place de la ZES a été créée. Sa principale mission était d’identifier les sites qui pourront potentiellement abriter la ZES. Ensuite, six sites ont été identifiés et c’est le site de Warubondo qui a été choisi comme le précise le décret présidentiel mettant en place cette zone. Elle couvre une superficie de plus de 500 ha. Un espace amplement suffisant pour ériger un parc industriel et commercial. A terme, la ZES devra être un hub commercial au niveau de la sous-région. Les autorités ont misé sur sa proximité avec la République Démocratique du Congo pour promouvoir les exportations du pays.

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Faute de ressources pour mettre en œuvre ce projet-budget d’austérité depuis 2015-le gouvernement a signé un mémorandum d’entente avec les investisseurs Emiratis. A cette époque, aucun détail sur le projet n’a filtré. Ces investisseurs avaient la mission de viabiliser le site endéans trois mois.  La commission technique a négligé un détail. Le site jouxte la rivière Rusizi. Pourtant, la deuxième vice-présidence avait interdit tous les travaux de viabilisation dans les localités de Kigaramango et Kajaga. La raison n’est autre que ces zones marécageuses se trouvent dans le bassin de la rivière Rusizi. Il s’agit de prévenir les catastrophes en cas de crues de cette rivière. On aurait dû faire la même chose pour le site de Warubondo si stratégique pour booster l’économie nationale.

La zone est marécageuse et difficile d’accès.  L’aménagement de la piste d’accès est prioritaire si jamais on veut mener ce projet jusqu’à son terme. Sinon le transport des matériaux de construction sera difficile. L’autre aspect non négligeable concerne l’aspect environnemental. Avant que les constructions soient achevées, les eaux de la rivière Rusizi envahissent le site de Warubondo. Même si des infrastructures économiques venaient à y être érigées, quelles sont les stratégies arrêtées pour faire face à d’éventuelles inondations ? La construction dans cette zone inondable ne présente-t-elle pas un risque d’effondrement des bâtiments ? Peut-être qu’il faut repenser le projet.

Sous d’autres cieux, les Zones Economiques Spéciales soutiennent les économies. Les investisseurs bénéficient des avantages fiscaux. Les ZES constituent des centres d’innovation industrielle et de recherche. Elles stimulent la croissance via l’attrait des investissements directs étrangers et la promotion des exportations. Cependant, les économistes restent sceptiques quant à la plus-value des ZES. Une étude commanditée par la Banque Africaine de Développement fait ressortir deux contraintes majeures, à savoir : la faible gouvernance et l’instabilité.

Les experts de la BAD pointent les risques liés aux ZES. Le processus de conception et de mise en œuvre des politiques relatives aux ZES est long et difficile. Ainsi, dans les situations de fragilité, il existe un risque accru de voir les ZES tomber entre les mains d’intérêts catégoriels. Étant donné que les questions de capacités institutionnelles et de volatilité sont caractéristiques des situations de fragilité, la mise en œuvre d’un programme de ZES est très difficile dans ce cas, estime la BAD.

A propos de l'auteur

Benjamin Kuriyo.

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