La crise économique entre dans une nouvelle phase. Les dépenses globales de l’Etat culminent à plus de 3 952 milliards de FBu dans un contexte d’hyperinflation et de dépréciation continue du FBu. Les appuis budgétaires arrivent à compte-gouttes alors que la pression fiscale s’accentue.

Benjamin Kuriyo, Directeur de publication
Le passage du budget de moyens au budget-programme est perçu comme un pas franchi vers l’indépendance budgétaire. Lors de l’analyse de ce projet de loi, le président de l’Assemblée Nationale a félicité le gouvernement pour cette innovation qui nous préserve du joug colonial. Il faut l’indépendance économique à tout prix. Au lieu de réfléchir en extraverti en comptant sur les aides étrangères comme si en interne nous sommes incapables d’auto-suffire, nous devons augmenter la production pour accroître les recettes internes », a-t-il déclaré. Dans le cas contraire, avertit-il nous allons plonger dans un néo-colonialisme sans précédent. Nous tendrons toujours la main aux bailleurs pour bénéficier des aides. Heureusement que le budget-programme et les idées y inscrites viennent changer la donne.
Les rapports établis par la Cour des comptes montrent un accroissement exponentiel des recettes de 2016 à nos jours. Dans l’entretemps, l’augmentation des prévisions des recettes rime avec l’introduction de nouvelles mesures fiscales. Pour accroître les recettes fiscales et non fiscales, l’Office burundais des recettes étend ses tentacules vers les petits contribuables. Ces derniers considèrent que cela exacerbe la crise économique et impacte les revenus des ménages. La récente mobilisation des occupants des marchés de la capitale économique gérés par la mairie en dit long.
Pour les fiscalistes, « trop d’impôts tue l’impôt ». L’économiste américain Arthur Laffer a pu démontrer qu’au-delà d’un certain seuil de prélèvement fiscal, les taux deviennent dissuasifs pour les contribuables et les rentrées fiscales chutent. Il considère que plus le taux d’imposition est élevé, plus l’évasion fiscale est forte, plus l’expatriation augmente, moins les agents économiques sont incités à travailler. D’où une baisse des recettes fiscales.
Dans une réaction virulente, le chef de l’Etat s’en est pris aux administratifs notamment ceux de la mairie de Bujumbura. Il leur reproche d’être de mèche avec une poignée de gens qui sèment le désordre économique. » Je sais pourquoi vous n’intervenez pas ! Des cadres de l’Etat « indongozi » s’arrogent le droit d’extorquer les commerçants et vous ne réagissez pas parce que vous êtes corrompus. Il pointe du doigt le maire de la ville de Bujumbura et les administrateurs municipaux qui trempent dans des affaires de corruption. Pour en découdre avec la pratique de sous-location des stands dans les marchés, le chef de l’Etat lance un ultimatum de trois jours au ministre de l’Intérieur pour réattribuer les places aux commerçants actifs. Il encourage les contribuables à participer au développement économique du pays en payant les taxes et les impôts dus. Il met en garde les fauteurs de troubles et s’engage à les traquer quel qu’un soit le prix. « Je suis le père de la Nation. Je n’accepterai pas qu’un groupe de gens fasse obstacle aux efforts de développement. Je suis prêt à les affronter et s’ils ne coopèrent pas, leur place est à la prison centrale », déclare-t-il.
Pour la société civile, le pays traverse une crise économique sans précédent. Au cours des deux dernières semaines, les prix du carburant, du ciment, du sucre et des boissons de la Brarudi ont été revus à la hausse. Par rapport à cette hausse généralisée des prix, l’ONG PARCEM interprète qu’il s’agit d’un signe éloquent d’une crise économique qui s’amorce. Cette crise est le résultat d’une mauvaise gouvernance caractérisée par les malversations économiques, le manque de planification et la corruption endémique qui sévissent dans notre pays.
Faustin Ndikumana, directeur national de cette ONG dresse un tableau sombre de l’économie nationale. Ces mauvaises pratiques réduit jusqu’à la simple expression le volume des exportations, l’aide au développement, les investissements directs étrangers et les recettes touristiques. Pire encore, le pays ne remplit pas les critères requis pour s’endetter auprès du système financier international. D’ailleurs, le taux d’absorption des fonds au niveau des programmes de développement reste faible. Suite à la mauvaise gouvernance, l’aide au développement est mal gérée et parfois les budgets tombent en annulation ou ne sont pas du tout décaissés en totalité.
Il dénonce également la mauvaise gestion des finances publiques. Pour lui, l’affectation du budget dans des programmes non prioritaires avec des tâtonnements sans contrôle ne font qu’amplifier la situation. L’augmentation des taxes influe sur le coût de revient et les prix augmentent considérablement. Il appelle les pouvoirs publics au nouvel ordre de la gouvernance et à mettre en place des cadres pouvant améliorer le climat des affaires pour stimuler les investissements, lutter contre l’impunité, asseoir un Etat de droit qui protège les capitaux et une riposte musclée contre la corruption.
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