La démolition des kiosques construits de façon anarchique dans la Mairie de Bujumbura aura des impacts négatifs sur l’économie des ménages. Pour l’économiste, Léonidas Ndayizeye, ceux qui exerçaient leurs activités dans ces kiosques vont être touchés. La plupart d’entre eux vont déclarer faillite
Depuis bientôt deux mois, la Mairie de Bujumbura conduit une vaste opération de démolition des kiosques construits de façon anarchique dans tous les quartiers. Des kiosques qui sont construits au-dessus des caniveaux d’évacuation des eaux usées et ceux qui sont bâtis dans des espaces publics sont détruits. Cette opération s’inscrit dans le cadre de l’assainissement de la ville de Bujumbura et de rendre beaucoup plus praticables les rues urbaines.
Pour Léonidas Ndayizeye, Professeur à l’Université du Burundi dans la faculté des Sciences Economiques et de Gestion, cette mesure est louable du fait qu’elle constitue à rendre la ville de Bujumbura plus propre. Il explique que la destruction des kiosques n’aura pas d’impact sur l’économie nationale. Par contre, selon lui, cette opération aura des impacts négatifs sur les ménages. Ceux qui exerçaient leurs activités dans ces kiosques vont être touchées. Prof Ndayizeye fait savoir que dans la majorité des cas, c’était la seule source de revenus sur laquelle ils comptaient pour la ration individuelle ou familiale, pour payer le loyer, les frais de scolarité des enfants, etc.
Cet économiste trouve que ces derniers vont devoir chercher d’autres endroits où ilspourront reprendre leurs activités. « Pour les kiosques qui étaient tout près des marchés, leurs propriétaires devront occuper les places vides qui sont dans les marchés », précise-t-il. Toutes fois, Prof Ndayizeye signale que tous ne peuvent pas dans l’immédiat trouver d’autres endroits où exercer leurs activités et dans les mêmes conditions suite au manque de frais de loyer, au manque de clients ou l’éloignement des points d’approvisionnement. « La plupart d’entre eux vont déclarer faillite ».

La démolition des kiosques construits de façon anarchique aura des impacts négatifs sur l’économie des ménages. Ceux qui exerçaient leurs activités dans ces kiosques vont être touchés. La plupart d’entre eux vont déclarer faillite.
La mesure ne vise pas la lutte contre l’économie informelle
Prof Léonidas Ndayizeye précise que la démolition des kiosques construits de façon anarchique n’est pas liée à la lutte contre l’économie informelle. Elle est liée à l’aménagement urbain. « Les habitants se sont arrogés le droit de construire de façon désordonnée dans des espaces non destinées à ce genre d’activités. En ville, on ne construit pas n’importe comment et n’importe où », fait-il savoir. Et de préciser que l’espace urbain doit être aménagé conformément à l’image qu’on veut donner à la ville. Les propriétaires de ces kiosques vont louer ou construire de façon légale dans des endroits attribués à cette fin.
Le secteur informel largement répandu en Afrique
En Afrique en général et au Burundi en particulier, l’économie informelle est largement répandue, note Prof Ndayizeye. Beaucoup d’activités qui sont menées que ce soit au niveau commercial ou au niveau de la production relèvent de l’informel. Ce sont des activités qui ne sont pas généralement connues des autorités fiscales, des activités qui ne sont pas enregistrées.
Néanmoins, Prof Léonidas Ndayizeye fait savoir que ces économies informelles contribuent énormément aux PIB des pays et aux revenus des ménages.
La fiscalité, un frein à la formalisation
Selon l’économiste Ndayizeye, de nombreux facteurs sont à la base de l’économie informelle. D’abord, le commerce est minimaliste. «Quelqu’un qui a un capital de moins de dix mille FBu ne va pas formaliser son commerce. Cela n’aurait même pas de sens», a-t-il expliqué.
La surfiscalité est l’autre raison. La taxation élevée fait que même ceux qui ont des capitaux très élevés, plus costauds et consistants se tournent vers l’informel. « Les structures de taxation sont trop élevées. Donc cela décourage les activités de façon que si vous êtes dans le formel, c’est souvent difficile de pouvoir réaliser un bénéfice. D’où la migration du formel vers l’informel.
Dans la plupart des cas, les commerçants appliquent les deux formes à la fois. « On est officiellement dans le formel, mais l’informel est plus prédominant que le formel. Cela existe aussi et c’est toujours lié à la pression fiscale», montre-t-il.
Les petits commerçants qui contractent des crédits font face à des taux d’intérêts élevés. « Actuellement, on est en train de baisser progressivement les taux d’intérêts. Mais, il n’y a pas longtemps que le taux d’intérêt était de 18 %, de 15%. En Europe par exemple, le taux d’intérêt est de 1%, 2% ou 3%. Là, vous pouvez réaliser des profits ». Il explique qu’il est difficile de générer des profits avec des taux d’intérêts élevés. A côté de cela, vous devrez payer des taxes à l’État. Pour cet économiste, toutes ces conditions poussent les commerçants à recouvrir à l’informel.
Au Burundi, le secteur informel représente plus de 77% du PIB, mais sa part contributive dans les caisses de l’Etat reste faible voire marginale.
C’est une bonne mesure pour assainir la ville, kuko atahapfuye ntagakira.