Energie

Quartiers périphériques : A quand le raccordement électrique ?

La Regideso a le monopole de la distribution de l’électricité dans le pays. A part que la quantité fournie par cette société est insuffisante, les quartiers périphériques sont presqu’abandonnés à leur sort

L’espace urbain à couvrir s’est agrandi au cours des années alors que l’activité de la Regideso n’a pas suivi la même allure. Comme dans certains pays d’Afrique, le Burundi peine à combler son déficit en électricité. A part qu’elle est accusée de rendre un service incomplet à ses clients, certains quartiers périphériques de la ville de Bujumbura sont victimes d’un certain délaissement de sa part. Les habitants s’arrangent pour éclairer leurs maisons. Dans certains endroits, la population s’adonne à des pratiques frauduleuses en recouvrant aux moyens de bord. Ce qui augmente fortement les risques d’accident liés à de mauvaises installations. Les accidents dus aux incendies sont prévisibles. Ce qui met en danger la vie des personnes et leurs biens.

Certains quartiers périphériques de la ville de Bujumbura sont victimes d’un certain délaissement de la part de la Regideso.

Dans certains cas, la Regideso s’efface devant son historique tâche d’etendre ses installations dans les nouveaux quartiers.  Les habitants de ces localités doivent se débrouiller pour échapper à l’obscurité. Dans ce cas, les habitants qui veulent s’approvisionner en électricité en engageant leurs propres moyens se retrouvent devant des tarifs exorbitants. Les matériels d’électrification sont très chers. De plus, les concernés dénoncent une attitude injuste de la Regideso à leur égard. Lesdits quartiers devraient être traités au même pied d’égalité que d’autres.

Les habitants des quartiers périphériques crient à l’injustice

Depuis plus de trois ans, les habitants de Carama, un des nouveaux quartiers de la municipalité de Bujumbura attendent en vain le raccordement au réseau électrique de la Regideso. Selon des sources sur place, la Regideso semble avoir oublié d’y installer des poteaux de raccordement électrique. La malheureuse population doit se débrouiller pour pallier à cette situation.

Ces nouveaux clients de la société qui a le monopole de la distribution de l’électricité dans le pays ne comprennent pas pourquoi cette société ne les traite pas au même pied d’égalité que les locataires des autres quartiers. « Nous avons toujours réclamé d’être raccordé au réseau électrique de la Regideso, mais notre sollicitation n’a pas eu d’écho favorable», indique une femme habitant ce quartier. Selon cette femme, il est visible que les autorités de la Regideso n’ont pas voulu résoudre leur problème.

Pour Pascal Mugenzi, un autre habitant de la localité, cela est totalement incompréhensible. Il a fini par s’adapter. « Comme chacun de nous doit s’arranger, je me suis finalement résigné à utiliser une plaque-solaire pour éclairer ma maison », dit-il. Dans une incompréhension totale, notre source insiste : «La Regideso devrait revoir sa méthode de travail pour traiter les quartiers sur le même pied d’égalité». Dans tous les cas, la Regideso est mise devant ses responsabilités. Les populations disent avoir attendu longtemps la solution à leurs problèmes.    

Quid du coût d’accès à l’électricité au Burundi ?

Le Burundi est un des pays évalué négativement par les rapports des experts de la Banque Mondiale. Tandis que ce pays se positionne à la queue de la liste établie par cette institution en 2016, les défis liés à l’accès à l’électricité  restent à relevés. Irréfutablement, la difficulté d’accès à l’électricité y est une réalité. La défaillance dans l’action de la Regideso coûte cher à la population.     

Les tarifs des matériels d’installation électrique sont élevés. Alors que le prix d’un compteur monophasé utilisé par les ménages dépasse légèrement 229000 FBu, celui du compteur triphasé est fixé au-delà de 370000 FBu. C’est le même cas pour les fils utilisés dans l’installation. Tandis que le fil triphasé é coûte 62000 FBu, le fil monophasé dit « moyenne tension » utilisé pour éclairer  les ménages coûte 3100 FBu /m. Les prix sont très exorbitants pour les poteaux qui s’achètent jusqu’à 160000FBu la pièce, un prix pouvant atteindre plus de 200000FBu. Les dépenses varient en effet en fonction de la distance  à laquelle se situe chaque ménage bénéficiaire par rapport aux lignes principales qui desservent les quartiers. Le prix de la main d’œuvre venant s’ajouter sur le tout. Certaines personnes qui ont tenté de s’approvisionner en  matériels d’installation affirment qu’il s’agit d’un exercice difficile.

Le prix du kWh au Burundi a également été revu à la hausse avec une augmentation atteignant 0,20 USD alors que la moyenne de la hausse établie par la Banque Mondiale sur l’ensemble du continent africain est de 0,17 USD.

Une installation électrique très dangereuse dans certaines zones

Mugoboka II est un véritable bidonville longeant la rivière Ntahangwa pour s’étirer sur les montagnes surplombant le quartier de Mutanga Sud. Dans cette localité en retrait du quartier Mutanga Su d viabilisé depuis longtemps, chacun se  débrouille pour se raccorder au réseau électrique de la Regideso. Dans ce monde à cheval entre l’urbain et le rural, la vraie précarité saute aux yeux. Plusieurs familles habitent  des taudis. En y arrivant, on est surpris de voir de vieux fils électriques dangereusement suspendus à une hauteur à portée de la main. De petits poteaux ayant la taille d’un rosier servent de supports à des fils électriques qui alimentent les ménages. Certains fils sont délibérément suspendus sur des arbres. Ce qui augmente le risque d’accident.

La quantité d’électricité fournie par la Regideso reste insuffisante et les quartiers périphériques en sont les premiers victimes.

Ange Nibimpa, une femme rencontrée à son domicile explique: « Certains ménages ont acheté des compteurs. Ceux qui n’en ont pas s’alimentent à partir des installations de leurs voisins qui les obligent à partager la facture. Cette femme pense que les fraudes ne peuvent pas manquer. Selon elle, les installations sont complexes et chacun essaie de se connecter tant bien que  mal.

Ces informations riment avec celles reçues d’un homme habitant la même localité. D’après cet homme qui s’est confié au reporter de Burundi Eco sous le sceau de l’anonymat, ce sont les habitants de cette localité qui installent les fils électriques qu’on observe partout. La même source affirme que la Regideso est au courant de ce phénomène. «Autrefois, les agents de la Regideso confisquaient les compteurs, mais le phénomène n’a pas cessé», indique-t-elle. Dans la suite, d’après les propos de la même personne, les compteurs seraient retournés à leurs propriétaires. Cet homme s’indigne du fait que la Regideso n’a pas encore pu mettre en place ses installations pour permettre aux habitants de s’alimenter en électricité. Les installations de ce genre s’observent sur de longues distances.

Cette pratique est observable également un peu plus loin, à la sous-colline dite Mubisekuro, un village situé au-delà de la capitale. Les fils électriques desservent ce village à l’instar de ceux de la Regideso. Partout, on voit de vieux fils électriques qui se superposent, parfois de manière très inquiétante.

Le Burundi n’est pas un cas isolé

Selon les experts la Banque Mondiale, les tentatives entreprises par les Etats de réformer le secteur énergétique butte  sur le coût de l’énergie en général. Ces tentatives qui visent le relèvement du secteur énergétique conduisent à l’augmentation des tarifs de l’électricité dans la plupart des pays de l’Afrique subsaharienne.  La plupart des compagnies opérant dans le secteur énergétique ont misé sur la surfacturation pour se maintenir à la hauteur du défi.

Le rapport Africa’s Pulet montre que les tarifs industriels et commerciaux appliqués dans la plupart des pays d’Afrique subsaharienne figurent parmi les plus élevés sur l’ensemble de la planète. Selon les observations de la même institution, les tarifs industriels très élevés viseraient à éviter  une hausse des prix de l’électricité pour les ménages. Le même problème s’observe au Burundi. Les consommateurs dénoncent des tarifs particulièrement élevés. Ce qui plombe l’activité économique.

Contacté au téléphone pour apporter plus de lumière sur cette question, la porte-parole de la Regideso nous a laissé sur notre soif. Pour cette femme qui parle au nom d’une institution accusée d’inaction, ce ne sont pas les clients qui achètent le matériel d’installation, mais bel et bien la Regideso. Quant aux installations anarchiques doublées de fraudes, elle dit que la Regideso ne peut pas tout surveiller. Pour elle, il faut plutôt considérer ces personnes comme des voleurs et les dénoncer auprès de qui de droit.

A propos de l'auteur

Jonathan Ndikumana.

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