Elevage

Adieu la divagation des animaux !

La loi sur la stabulation permanente entre en vigueur le 4 octobre 2021. Les éleveurs évoquent des difficultés liées au manque de fourrage consécutif à l’exiguïté des terres arables. Le ministère en charge de l’élevage encourage les éleveurs à développer d’autres types d’aliments pour nourrir le bétail au lieu de se débarrasser de leurs troupeaux 

Les habitants de la province Bubanza apprécient la politique d’élevage intensif. Ils espèrent que ce programme va dégeler les conflits éternels opposant les éleveurs aux agriculteurs. Cependant, les éleveurs ne sont pas suffisamment préparés pour se conformer à la règlementation.

Ils demandent à l’Etat d’intensifier les cultures fourragères et de vulgariser les races améliorées plus productives. Pour le moment, les frisonnes sont hors de prix. A Buringa une vache de race améliorée coûte autour de 7 millions de FBu. Un prix qui n’est pas à la portée de toutes les bourses. A Bururi, les éleveurs s’apprêtent à mettre en œuvre la loi instaurant la stabulation permanente. Le fourrage est déjà disponible. « Nous avons déjà planté des herbes fixatrices sur les fossés antiérosifs qui serviront de fourrage. Ceux qui ont assez des lopins de terre ont réservé des espaces pour la culture des plantes fourragères », témoignent les habitants.

La stabulation permanente aura des retombées positives au niveau des ménages. « La nouvelle pratique d’élevage va accroître la production agricole. Cette fois-ci, la bouse de vache sera bien conservée en grande quantité », indique un habitant de la commune Bururi.

De peur d’être sanctionnés pour non application de la loi sur la stabulation permanente les éleveurs préfèrent réduire leurs troupeaux.

Kayanza, un bon élève

Même son de cloche chez les éleveurs de la commune Butanganzwa de la province Kayanza qui saluent la mesure interdisant la divagation des animaux domestiques. Cette loi a plusieurs avantages. La stabulation permanente va améliorer considérablement la santé animale et accroître la production. Cependant, ils déplorent l’exiguïté des terres arables qui ne leurs permet pas de développer les cultures vivrières et le fourrage. « Les chèvres qui restent dans les étables sont moins exposées aux maladies et se développent vigoureusement ».

Toutefois, ils signalent le manque d’espaces pour vulgariser les cultures fourragères. D’ailleurs, certains éleveurs n’ont pas de fourrage. La nuit tombée, ils vont grignoter les tripsacum chez les voisins. Les agri-éleveurs apprécient Adelin Niyonsaba, directeur du bureau de l’Environnement de l’Agriculture et l’Elevage provincial estime que les éleveurs ont été sensibilisés sur la mise en œuvre de cette pratique depuis trois ans. De surcroît, la loi est déjà en vigueur. Il est strictement interdit de laisser les animaux d’élevage dans la nature.

Un marché de bétail en effervescence

De peur d’être sanctionnés pour non application de la loi sur la stabulation permanente les éleveurs préfèrent réduire leurs troupeaux. Au marché de Rwibaga en commune de Mugongo-Manga, les prix des vaches explosent ces derniers jours. Une génisse coûte entre 1 000 000 et 1 300 000 FBu alors qu’un veau se négocie à 900 000 FBu. Pour Gaston Mpawenimana, boucher rencontré sur place, les prix restent élevés. Pour lui, le marché risque d’être stabilisé d’ici peu. En avril dernier, il y avait beaucoup de vaches et les prix étaient en baisse. A l’heure actuelle, les vaches sont en nette diminution. Ceux qui s’approvisionnent à ce marché craignent  la pénurie des vaches, et partant, la hausse du prix de la viande.

Comme alternative, Emmanuel Ndorimana, assistant du ministre de l’Agriculture et de l’Elevage invite la population à développer d’autres types de fourrage (sons de riz, herbes sèches…) au lieu de vendre leur bétail. Il rassure que le gouvernement est à l’œuvre pour soutenir l’élevage.  « Il n’y aura pas de délais de grâce. Les éleveurs ont eu le temps de se préparer sur tous les plans », insiste M. Ndorimana.

Quid des mesures d’accompagnement ?

Du côté du gouvernement, la loi préconise la détermination des zones publiques d’élevage, la disponibilité et la vulgarisation des semences fourragères. L’article 36 de cette loi recommande l’extension du service d’encadrement de proximité. Les techniciens vétérinaires doivent être déployés dans toutes les zones et les agents communautaires de santé animale dans toutes les communes.

Dr Bosco Ntirandekura distingue trois types d’élevage, à savoir : l’élevage extensif, l’élevage semi-intensif et l’élevage intensif. Il revient au pays de choisir un modèle adéquat dans la limite des moyens financiers des agri-éleveurs. « Avec la mise en application de l’élevage intensif, il y a grand risque d’enregistrer un manque criant de fourrage dans un contexte de démographie galopante ». S’il y a des ménages qui hésitent encore à pratiquer la stabulation permanente, cela démontre que la loi n’a pas été vulgarisée suffisamment vulgarisée.

Régionaliser l’élevage

D’après Christophe Harerimana de l’association des éleveurs de la commune Gihanga dans la région naturelle de l’Imbo, on a encore du pain sur la planche pour appliquer la loi sur la stabulation permanente. « Il manque des espaces pour cultiver les plantes fourragères. Pire encore, l’été dure plusieurs mois dans la région naturelle de l’Imbo. C’est une région aride qui n’est pas favorable à la culture des plantes fourragères », déplore-t-il.   

Dr Ntirandekura, expert-vétérinaire, l’organisation des éleveurs en association va permettre de pratiquer l’élevage intensif. Pour ce faire, il faut diligenter des recherches pour identifier les espèces favorables à chaque région. Ce sont des préalables pour la réussite de ce programme.

Pourquoi pratique-t-on la stabulation permanente ?

La loi instaurant la stabulation permanente au Burundi a pour objet de déterminer les modes d’élevage autorisées, les conditions requises pour bien pratiquer l’élevage en stabulation permanente de tous les animaux domestiques. Ce sont des mesures d’accompagnement pour la mise en application de cette loi.

La mesure a été prise pour améliorer les conditions de vie des populations, justifie M. Ndorimana. Ce cadre du ministère en charge de l’élevage estime que la stabulation permanente vient également pour endiguer la propagation des maladies. En outre, cette mesure vient appuyer la mise en œuvre du programme de reboisement « Ewe Burundi Urambaye » dans la mesure où les animaux domestiques ne vont plus brouter dans les espaces reboisés.

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Benjamin Kuriyo.

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