Agriculture

Fertilisation des sols : Le rôle de la matière organique méprisé

Le manque ou l’insuffisance des fertilisants chimiques sème la panique dans le monde agricole burundais. L’agriculteur est dans le dynamisme d’utilisation des engrais chimiques quitte à ce qu’il ait tendance à oublier le rôle de la matière organique dans la constitution du sol. Une attitude non futuriste, qui coûterait aussi cher

Ir Alain Kagisye, chercheur à l’Institut des Sciences Agronomiques du Burundi (ISABU) : « Même si on distribuait à chaque ménage les engrais, sans l’utilisation de la matière organique, le résultat serait nul ».

   

Le manque criant d’engrais FOMI fait parler de lui sur tout le territoire du pays. Une situation qui fait couler beaucoup d’encre et de salive, mais surtout qui a poussé les autorités à prendre des mesures adéquates pour trouver une solution à ce problème. L’agriculture n’a pas de sens sans la fertilisation organo-minérale de FOMI.

A cause d’une démographie galopante, les propriétés foncières se sont rétrécies. La technique de mettre le sol en jachère pour que la terre puisse se reconstituer n’est plus pratiquée. Ce qui fait qu’à la longue, les cultures puisent tous les éléments nutritifs au fur des années et le sol reste dénudé. Certes les engrais chimiques sont importants dans le rendement du sol, mais ils ne le sont que s’ils sont des compléments de la matière organique.

Les engrais non organiques viennent pour compléter

« Même si on distribuait à chaque ménage les engrais chimiques, sans l’utilisation de la matière organique, le résultat serait nul », indique Ir Alain Kagisye, chercheur à l’Institut des Sciences Agronomiques du Burundi (ISABU). Il explique que les engrais chimiques viennent pour compléter. Les sols burundais, à 70% sont constitués de type d’argile appelée kaolinite. Ces genres de sol ont la capacité d’échange cationique qui est faible. C’est la capacité du sol à retenir les éléments qu’il reçoit. «Quand le sol a une capacité cationique faible, il ne peut pas retenir les éléments qui lui sont ajoutés. Quand il pleut, le sol est lessivé et tous les engrais chimiques se retrouvent dans la nappe phréatique», fait-il remarquer. Les engrais chimiques peuvent être aussi à l’origine de l’acidité du sol, s’ils sont utilisés à tort et à travers sans tenir compte des besoins des sols.

Pour que la capacité cationique du sol augmente, il faut de la matière organique pour que le sol puisse retenir les engrais chimiques complémentaires, ajoute-t-il. En l’absence de la mise en jachère des sols, les cultivateurs ont adopté la fertilisation du sol par les engrais chimiques. Mais comme l’explique le chercheur, ces fertilisants chimiques ne suffisent pas à elles seules. « Ajouter les engrais, ce n’est qu’ajouter les éléments nutritifs. Ils ne jouent pas sur la bonne structure du sol », explique-t-il.

Un compost en deux mois, c’est possible 

Aujourd’hui, les agriculteurs commencent à être imprégnés de technique de compostage rapide, notamment le compostage en tas. Cette dernière consiste à préparer un compost qui est prêt à être utilisé dans deux mois. On fait en sorte que le processus soit échelonné de façon qu’après un mois, on puisse avoir un bon compost. Cette compostière est faite d’herbes, de la bouse de vache, des épluchures, les résidus des récoltes, et de tout ce qui est matière organique retrouvée dans la nature. La matière est retournée pour que la matière utilisée puisse se décomposer. A part que cette technique est rapide, elle peut être effectuée sur le terrain à cultiver et ainsi épargner les coûts de transport. Toutefois, le chercheur explique qu’il faut que la compostière soit remplie en une seule journée. Par conséquent, trouver la matière organique qui la constitue en une seule journée n’est pas du tout facile.

Il mentionne que l’ancienne technique où chaque ménage creusait un fossé pour y mettre la matière organique pour faire son compost est toujours d’actualité. Mais le désavantage de cette technique est qu’elle peut prendre beaucoup de temps. 

L’efficacité de l’utilisation des engrais verts

Ir Kagisye fait savoir qu’il y a d’autres alternatives enseignées, notamment l’association avec d’autres plantes non alimentaires, mais qui ont des propriétés de rendre les terres riches lors du labour. Il donne l’exemple du stylosanthe, du mucuna, du sarrasin, du titonia, etc. Le titonia a d’ailleurs fait l’objet de beaucoup de recherches à l’ISABU et, elle existe partout dans le pays et a déjà prouvé son efficacité dans la reconstitution du sol, surtout en ce qui est du phosphore. Parfois cette plante ne nécessite pas d’être décomposée avant de le mélanger au sol. Elle peut être enfouie dans le sol deux semaines avant le semis. Malgré l’existence de toutes ces techniques, les agriculteurs semblent ne pas s’y intéresser. Ils sont dans le dynamisme d’utiliser uniquement les engrais chimiques. Les moniteurs agricoles et l’administration à la base ne sont pas motivés pour vulgariser ces techniques. Ces dernières sont vulgarisées souvent à travers les projets des partenaires techniques et financiers du Burundi.

Dans les années 1980, le gouvernement a imposé la rigueur pour que chaque ménage puisse posséder au moins une compostière. Selon le témoignage des paysans de l’époque, la mesure a produit des fruits.

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Dona Fabiola Ruzagiriza.

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