Education

Les cantines scolaires, un antidote au décrochage scolaire

Les cas d’abandons explosent dans les établissements scolaires. D’année en année, le pays enregistre des déperditions scolaires importantes. Pour pallier à ce défi, le gouvernement met un œuvre un vaste programme d’alimentation scolaire. Malgré les retombées positives de ce programme dans les écoles ciblées, les défis restent de taille. Pour atteindre l’alimentation scolaire universelle, d’autres mesures s’imposent

Liboire Bigirimana, Directeur National Des Cantines Scolaires au Burundi : « La mise en œuvre du PNAS se heurte à plusieurs défis liés notamment aux ressources financières assez limitées pour répondre à une demande de plus en plus croissante ».

 

Dans notre pays, environ 10 % des enfants abandonnent l’école chaque année. Les cas d’abondons s’expliquent par de nombreux facteurs dont l’insécurité alimentaire. Le manque d’accès à une alimentation suffisante et variée empêche la concentration et conduit inéluctablement à l’abandon scolaire.

Pour réduire les déperditions scolaires, le gouvernement et ses partenaires ont mis en place un Programme National d’Alimentation Scolaire. Ledit programme élargi fournit des repas sains et équilibrés aux enfants du Fondamental, c’est-à-dire du préscolaire à la 9ème année. Cela dans le but d’améliorer les indicateurs scolaires à savoir : la réduction du taux d’abandons scolaires, de redoublement, mais aussi la promotion du taux de réussite et d’achèvement. La cantine scolaire permet également d’améliorer la santé de l’enfant car l’élève a droit un repas riche en éléments nutritifs pour son développement mental et cognitif.

Quid des critères d’éligibilité ? 

Liboire Bigirimana, Directeur National Des Cantines Scolaires au Burundi fait savoir que l’identification des écoles bénéficiaires se fait sur base des critères objectifs, notamment les écoles qui affichent de faibles performances scolaires (taux d’abandons élevés, faible réussite), l’existence des infrastructures nécessaires pour le stockage des vivres et l’adduction d’eau potable.

L’école doit être accessible aux camions qui assurent le transport des commodités ainsi que l’engagement des communautés à soutenir la cantine scolaire. Les communautés participent à la préparation et à la distribution des repas scolaires. Elles apportent le bois de chauffe, l’eau et les légumes pour compléter la ration alimentaire des enfants.

Un taux de couverture toujours faible

L’amélioration de la couverture du territoire en cantines scolaires d’année en année bien que satisfaisante ne représente qu’un enfant sur quatre au Burundi. L’objectif du gouvernement est d’assurer une couverture universelle en alimentation scolaire.

La mise en œuvre du PNAS se heurte à plusieurs défis liés notamment aux ressources financières assez limitées pour répondre à une demande de plus en plus croissante. Actuellement, le programme touche 700 000 enfants sur une cible de 2,8 millions d’enfants attendus). A cela s’ajoute le manque d’infrastructures de base : système d’approvisionnement en eau potable dans les écoles, absence des réfectoires et des stocks de vivres ainsi que des sanitaires, déplore Liboire Bigirimana, le Directeur National Des Cantines Scolaires au Burundi.

Les partenaires au développement s’activent pour donner un coup de pouce à ce programme. C’est notamment le projet Twige Neza financé respectivement par le Partenariat mondial pour l’éducation à hauteur de 46,9 millions de dollars et l’Agence Française de Développement (AFD) qui dispose dispose d’un volet d’alimentation scolaire pour 4 millions d’euros. Ainsi, ils participent plus largement au Programme national de cantines scolaires, mis en œuvre par le PAM aux côtés du gouvernement burundais. A travers ce programme, le gouvernement burundais projette d’atteindre une couverture universelle en alimentation scolaire à l’horizon 2032.

Vers la mise en place des cantines écologiques ?

L’utilisation du bois comme source d’énergie favorise la déforestation aux alentours des cantines scolaires. D’où la nécessité d’initier une forme innovante de cantines écologiques. « L’idée est d’asseoir des mécanismes innovants pour éviter que la cantine scolaire ne soit pas la cause de dégradation de l’environnement. Les meilleures pratiques sont notamment la construction des foyers améliorés et l’utilisation des briquettes écologiques », décrit le directeur du PNAS.

Pour une bonne gouvernance de la cantine scolaire, un outil de gestion des stocks a été introduit dans les écoles à cantine scolaire : School connect. Il s’agit d’une gestion digitalisée qui se fait sur des tablettes et qui permet de faire un track efficient et efficace de la gestion des stocks. L’outil permet d’avoir une idée sur l’utilisation des vivres en temps réel par rapport au nombre de bénéficiaires.

Pour réduire les déperditions scolaires, le gouvernement et ses partenaires ont mis en place un Programme National d’Alimentation Scolaire.

Un moyen de réduire les déperditions scolaires

Les cantines scolaires réduisent drastiquement le nombre d’abandons scolaires. Les écoles qui disposent d’un système d’alimentation enregistrent moins d’abandons surtout durant le premier cycle de formation. Ainsi, les cantines scolaires offrent une meilleure persévérance scolaire et un meilleur apprentissage.

L’impact de la cantine scolaire est même perceptible chez les écoliers bénéficiaires. Ces derniers n’effectuent plus des navettes durant la pause de midi entre l’école et leurs ménages pour dîner. Avec l’arrivée du programme, ils mangent désormais à l’école. De cette façon, ils ont plus de temps pour réviser les leçons apprises en classe. Ce qui améliore leur rendement scolaire lors des évaluations continues.

Les cantines scolaires, une aubaine pour les opérateurs économiques

Le programme contribue de manière indirecte à l’augmentation de la production et à l’essor de l’économie locale. En 2013, la philosophie de la cantine scolaire est passé de l’intervention d’urgence à l’intervention de développement. Le Gouvernement a décidé que soit développé une cantine scolaire qui s’approvisionne en produits locaux pour constituer un marché permanent pour les petits producteurs regroupés dans des coopératives. D’où le concept d’une cantine scolaire endogène ou Home Grown School Feeding.

Le programme d’alimentation scolaire est bénéfique pour les communautés locales. Des partenariats public-privé ont été établis pour renforcer les chaînes de valeurs dans le domaine agro-pastoral. En 2018, les bénéficiaires de la chaîne solidarité bovine des provinces ciblées ont pu bénéficier d’un encadrement sur les bonnes pratiques de collecte et de commercialisation du lait.

En outre, ce programme booste l’industrie agroalimentaire. C’est une offre importante pour les industries locales qui se lancent déjà dans la fabrication des aliments nutritifs fortifiés dont la farine de maïs fortifiée. Une des grandes sociétés de conditionnement du lait a décroché un marché pour fournir du lait à plus de 30 000 écoliers. Et avec les appuis des partenaires à ce projet, elle a pu certifier ses produits pour avoir accès au marché régional.

Le Bénin, un cas d’école pour le Burundi

En 2021, une délégation conduite par la Première Dame Angéline Ndayishimiye a effectué une visite au Benin dans le cadre d’un échange d’expériences dans la gestion du programme de cantines scolaires. Dans ce pays d’Afrique de l’Ouest, le Gouvernement travaille en étroite collaboration avec le Programme Alimentaire Mondial (PAM) à la mise en œuvre d’un Programme national d’alimentation scolaire intégré (PNASI). Ce programme contribue à la lutte contre la déscolarisation et la malnutrition.

En 2021, une délégation conduite par la Première Dame Angéline Ndayishimiye a effectué une visite au Benin dans le cadre d’un échange d’expériences dans la gestion du programme de cantines scolaires.

 

Au-delà de la distribution des repas chauds aux élèves, le PAM fait du programme PNASI un outil de solidarité et de développement communautaire. Autour de la cantine scolaire sont organisées d’autres activités dont l’agriculture, la pisciculture …avec une gestion collégiale entre la communauté et l’école. Des groupements de femmes ont été appuyés pour des activités génératrices de revenus grâce aux partenariats que le PAM arrive à mettre à leur disposition. Ces partenariats permettent aussi d’apporter des solutions à des préoccupations telles que la construction des réfectoires, des cuisines, des infrastructures et autres, apprend-on du site de la Présidence de la République Béninoise.

Le Gouvernement béninois, à travers le Programme national d’alimentation scolaire intégré (PNASI) fait du droit à l’alimentation une priorité. Ceci, dans l’optique d’améliorer l’accès à l’enseignement primaire et d’accroître le taux de rétention scolaire.

Un programme en pleine mutation

La cantine scolaire remonte aux années 1960 avec les interventions du Programme Alimentaire Mondiale (PAM) dans les écoles à régime d’internat. Il fournissait des commodités essentiellement composées de lait en poudre, de viande et de poisson en boîte à conserve.  En 2008, les provinces du Nord du pays ont été la cible des changements climatiques sous forme de sécheresse obligeant les habitants à fuir le pays vers le Rwanda. Ce qui a poussé des milliers d’élèves à l’abandon scolaire et les autres ont migré vers les centres urbains à la recherche de l’emploi et gagner de l’argent. Pour pallier à cette situation, le PAM et le Gouvernement du Burundi ont convenu à travers un accord de financer les repas chauds de midi pour motiver les enfants à regagner les salles de cours, rappelle Liboire Bigirimana, le Directeur National des Cantines Scolaires au Burundi dans un article publié en 2021 sur le site de Global Child Nutrition Foundation.

Cela étant, certains analystes estiment que le programme des cantines scolaires n’est pas une solution miracle pour éradiquer à jamais les abandons scolaires. La pérennisation de ce programme n’est pas du tout assurée d’autant plus que le gouvernement compte sur des partenaires externes pour financer ce programme. La solution durable à ce problème consiste en l’éradication de la pauvreté extrême qui sévit au niveau des ménages en vue de l’autosuffisance alimentaire. Au lieu de s’attaquer aux conséquences, il importe de maîtriser les causes profondes qui constituent le nœud du problème.

A propos de l'auteur

Benjamin Kuriyo.

Le contenu des commentaires ne doit pas contrevenir aux lois et réglementations en vigueur.
La rédaction se réserve le droit de ne pas publier les commentaires enfreignant ces règles et les règles de bonne conduite.

éditorial

Des initiatives à faible portée

Des initiatives à faible portée

Malgré les multiples signaux de relance économique, la crise économique perdure. Le pays n’a pas assez de devises pour couvrir ses importations. Par effet de contagion, les produits importés plongent le pays dans une spirale inflationniste. La dépréciation continue du FBu retarde l’impact des réformes macroéconomiques entreprises. L’inflation affiche une tendance baissière depuis le début de l’année. Le taux d’inflation aurait diminué de 5 points passant de 17,2% à 12% entre janvier et avril 2024, selon les données officielles. Cependant, cette baisse n’est pas ressentie chez les consommateurs qui assistent à la flambée des prix des denrées alimentaires.

    Abonnez-vous à notre bulletin

    Journal n° 609

    Dossiers Pédagogiques

    Facebook

  • éditorial

    Des initiatives à faible portée

    Des initiatives à faible portée

    Malgré les multiples signaux de relance économique, la crise économique perdure. Le pays n’a pas assez de devises pour couvrir ses importations. Par effet de contagion, les produits importés plongent le pays dans une spirale inflationniste. La dépréciation continue du FBu retarde l’impact des réformes macroéconomiques entreprises. L’inflation affiche une tendance baissière depuis le début de l’année. Le taux d’inflation aurait diminué de 5 points passant de 17,2% à 12% entre janvier et avril 2024, selon les données officielles. Cependant, cette baisse n’est pas ressentie chez les consommateurs qui assistent à la flambée des prix des denrées alimentaires.
  • Journal n° 609

  • Dossiers Pédagogiques