Agriculture

Rumonge-Changements climatiques : Les agriculteurs en paient un lourd tribut

A Rumonge, 106 ha de champs de riz et d’autres céréales sont aux prises avec les chenilles, environ 50 ha de champs de haricots, de maniocs et d’autres cultures ont été décimées par des escargots. Sur le banc des accusés : les changements climatiques. Malgré la riposte enclenchée, la crainte de la disette plane.

La situation agricole est préoccupante à Rumonge. Depuis le début de la saison culturale A, quatre communes sur cinq qui composent cette province souffrent de l’invasion des escargots. Ces mollusques s’attaquent à toutes les cultures et endommagent les feuilles.

Au total, la superficie dévastée s’estime entre 40 et 50 ha. La commune de Muhuta est la plus martyrisée avec 6 collines touchées. 3 collines de la commune Rumonge, 3 autres de la commune Burambi et une de la commune Buyengero subissent également des attaques des escargots.

« Quand la pluie fait ’’pousser’’ les escargots »

Comme le témoigne la population de la colline de Kirama, l’invasion des escargots ne date pas d’hier dans cette localité. Eliezer Mpabwanayo, 52 ans, habite la colline Kirama.

Selon lui, depuis son jeune âge, la population assiste impuissant à l’invasion de ces escargots, surtout pendant la saison pluvieuse. « Cela n’avait jamais été plus grave qu’aujourd’hui ». 

Pendant la saison sèche, raconte ce vieil agriculteur, ces escargots ne se manifestent pas, mais dès qu’il pleut, c’est comme si elle arrose ces escargots et ceux-ci poussent comme les plantes.

Ces mollusques s’attaquent à toutes les cultures et endommagent les feuilles.

 

Comme le témoigne cette population, ce que confirme Abel Ndayishimiye, directeur du Bureau Provincial de l’Environnement, de l’Agriculture et de l’Elevage (BPEAE) de la province de Rumonge, cela est lié aux changements climatiques.

Ces escargots déciment toutes sortes de cultures, que ce soient le haricot, les légumes, le manioc, etc. La seule culture qui n’est pas attaquée par ces escargots, selon cette population, est le palmier à huile.

Les pertes sont énormes

Cette invasion des escargots change le quotidien des agriculteurs de la colline Kirama. Comme le témoigne M. Mpabwanayo, tous les jours, dès 5 heures du matin, c’est la chasse aux escargots commence. « Cette situation exige un ramassage quotidien et très matinal d’escargots si on veut récolter », raconte désespérément Violette Ntakarutimana.

Elle poursuit son récit : On les rassemble un à un, on les collecte et on les met dans une fosse puis on les couvre de cendre. Une façon archaïque de les tuer. Malheureusement, ce ne sont que les volumineux escargots qu’on peut ramasser. Les plus petits qui sont d’ailleurs plus nombreux sont presque invisibles. A partir de 10 heures quand le soleil commence à frapper fort, ces escargots se cachent.

Face à cette situation, les agriculteurs affirment enregistre des pertes : « C’est à peine que nous parvenons à moissonner nos cultures, ce qui est regrettable. Et la crainte est de se retrouver face à une disette dans les jours à venir ».

Selon Zacharie Nkeshimana, en plus des pertes au niveau des champs, les pertes s’observent également au niveau du temps. « La chasse aux escargots se fait dans les heures où on était censé faire autre chose de plus rentable. Mais qu’est-ce qu’on peut faire d’autres à partir de 10 heures ? », se demande-t-il.

Les conséquences de cette situation commencent à se faire remarquer sur les marchés de cette localité. « Aujourd’hui, on est obligé d’acheter les haricots au marché alors qu’auparavant la récolte de haricot était satisfaisante. Un kilo de farine de manioc est pour la toute première fois à 2.500 FBu alors que pendant la même période dans les années passées, elle s’achetait entre 1.200 FBu et 1.500 FBu », se désole Mpabwanayo.

Ces agriculteurs demandent aux autorités de trouver une solution adéquate à ce problème récurrent qui s’aggrave du jour au lendemain. Ils appellent les moniteurs agricoles à être plus proches d’eux.

Quand les chenilles s’invitent dans les rizières

Mercredi 26 janvier 2023 dans le marais de Kijigo, zone Gatete de la province de Rumonge, une centaine d’agriculteurs dont des femmes sont réunis dans cette rizière pour bénéficier de la part du ministère de l’Agriculture des doses de pesticides ’’Iron’’ pour pulvériser cette rizière étendue sur une superficie de 16 hectares, envahie par des chenilles.

Ces chenilles détruisent surtout les jeunes feuilles des céréales jusqu’à ce qu’il ne reste que les nervures.

 

Annonciate Niyoyitungira possède un champ de riz sur un quart d’hectare dans ce marais pour plus de 200 mille FBu. Objectif : pouvoir y récolter 3 sacs de riz paddy.

Avec l’invasion de ces chenilles que les corbeaux raffolent, cette mère de 5 enfants regrette qu’elle n’y gagnera rien. Dans cette même zone, se trouve une autre rizière d’une superficie de 90 hectares dévastée par ces chenilles dans le marais de Kagoti.

Selon un communiqué du ministère de l’Agriculture, ces chenilles proviennent des œufs des papillons et s’ils ne sont pas combattus à temps, ils se développent jusqu’à ce qu’ils deviennent des papillons.

Ces chenilles détruisent surtout les jeunes feuilles des céréales jusqu’à ce qu’il ne reste que les nervures. Néanmoins, les pesticides pouvant lutter contre ces chenilles sont disponibles dans les différentes pharmacies vétérinaires du Burundi.

Il y a des pesticides de types : ’’Iron’’, ’’Decis cypaim’’, ’’Dudu Acelamectine’’, ’’Dudu Fenos’’ et ’’Dursban’’. Selon ce même communiqué, les provinces attaquées sont notamment Ruyigi, Rumonge, Rutana, Gitega, Muramvya, Ngozi, Karusi, Kayanza et Bururi.

Une situation préoccupante pour le BPEAE à Rumonge

Le directeur du Bureau provincial de l’Environnement, de l’Agriculture et de l’Elevage, Ir Abel Ndayishimiye fait savoir que ces cas sont connus et rapportés au ministère de tutelle.

Certaines initiatives sont déjà en cours pour éradiquer ce fléau. Pour les escargots, la délégation du ministère de l’Agriculture a fourni au BPEAE-Rumonge100 kg du pesticide appelé Métaldéhyde qui ont été partagés par les 4 communes attaquées.

Ir Abel Ndayishimiye directeur du BPEAE Rumonge « les agriculteurs doivent toujours approcher les moniteurs agricoles et les informer à chaque fois qu’ils remarquent quelque chose d’anormal dans leurs champs ».

 

« Comme les quantités ne suffisaient pas, nous avons pris la stratégie de collecter les escargots par ramassage et de les mettre dans une fosse pour les couvrir de Métaldéhyde par après. Cela a fait qu’un bon nombre d’escargots soient détruits. Malheureusement, nous ne pouvions pas faire grand-chose à cause de la quantité insuffisante du pesticide », explique-t-il.

Pour M. Ndayishimiye, le ministère ne peut distribuer que de petites quantités de pesticides. Pour le reste, il revient aux agriculteurs de collecter l’argent et de faire des commandes de leur propre pesticide.

« La plupart des agriculteurs se contentent de produire de petites quantités. Pourtant, ils devraient savoir qu’une bonne production exige un investissement, entre autres l’achat des pesticides et des semences sélectionnées », fait-il remarquer.

Il appelle les agriculteurs à toujours approcher les moniteurs agricoles et de les informer à chaque fois qu’ils remarquent quelque chose d’anormal dans leurs champs.

Pour ceux qui n’ont pas encore les moyens pour acheter ce pesticide anti-escargots, cet ingénieur agronome les invite à utiliser la stratégie de les collecter et de les détruire à l’aide de la cendre ou du mélange du savon en poudre avec le sel.

Signalons qu’un kilo de pesticide ’’Métaldéhyde’’ s’achète à 12.000 FBu et peut être utilisé à raison de 6 à 10 kg par hectare. Pour le pesticide ’’Iron’’, 1 litre s’achète à 60 mille FBu et peut être appliqué sur une superficie comprise entre 4 et 8 hectares.

Pour la plupart des agriculteurs de cette province interrogée, ces sommes semblent exorbitantes pour la majorité d’entre eux, ils affirment vivre dans une précarité chronique. Ils demandent la subvention de ces pesticides pour le bien de tout le monde.

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Florence Inyabuntu.

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