Economie

Le secteur café connait un développement à double vitesse

Une récente étude réalisée par l’Agence Internationale de Développement des Etats-Unis d’Amérique (USAID) sur le secteur café au Burundi passe au crible les contraintes auxquelles fait face le secteur et propose des pistes de solutions pour inverser la tendance. Burundi Eco s’est procurée une copie de l’étude et vous partage les points saillants de l’étude

La filière café fournit autour de 80% des recettes en devises au Burundi. On estime à près de 600 000 le nombre de ménages qui dépendent directement de lz culture du café.  Néanmoins, le secteur café est confronté à de nombreux défis. Le processus de privatisation en hibernation, la diminution de la production, la dépréciation monétaire, les tracasseries administratives imposées aux opérateurs du secteur,…sont quelques contraintes relevées par les experts de l’USAID.  Le développement de la filière café au Burundi atteint un point critique, alertent les experts.

Un processus de privatisation clôturé en queue de poisson 

Source : international Coffee Organisation (ICO)

La privatisation et une certaine libéralisation du marché ont réussi à attirer des investisseurs étrangers dans les opérations de transformation du café. En conséquence, le nombre de stations de lavage est passé de 133 en 2008 à 267 dix ans plus tard. Parallèlement, le nombre d’usines de déparchage a également plus que doublé à la même période passant de quatre à neuf. Toutefois, cette croissance de la capacité de traitement n’a pas été accompagnée d’une augmentation conséquente de la production de café.

Le principal obstacle au redémarrage du processus de privatisation, selon les auteurs de l’étude, semble être l’incapacité du gouvernement et des partenaires d’intégrer les parts réservées aux coopératives caféicoles. Il a été décidé de réserver 25% des actions dans les lots de stations de lavage aux coopératives agricoles (en 2008). Dans le second tour de la privatisation en 2012, une exigence similaire a été incluse avec 30% des actions réservées.

Aucun de ces accords n’a été mis en œuvre et l’Etat a exercé ses droits de préemption pour prendre le contrôle des actions, plutôt que de les céder au prix convenu aux investisseurs des SLC sélectionnés dans le processus de privatisation, rappelle l’étude.

L’autre défi qui empêche un mouvement vers l’avant est l’absence de coopératives locales solides capables de servir en tant que partenaires de l’actionnariat. Des doutes planent quant à la capacité des coopératives de trouver les montants d’achat convenus pour assurer la continuité.

Pour relancer le processus de privatisation et passer au-dessus de la dernière bosse, il sera nécessaire de franchir le principal obstacle institutionnel à l’achèvement de la privatisation: résoudre les questions litigieuses entourant la participation des agriculteurs aux opérations de privatisation.

La production est en chute libre

La production de café est en déclin structurel depuis plus de 20 ans et ne montre aucun signe d’amélioration malgré l’afflux de nouveaux investissements dans le secteur. Cette baisse de la production révèle la persistance d’un problème structurel et menace la viabilité du secteur dans son ensemble. En effet, la baisse des volumes affaiblit la rentabilité par unité des transformateurs et des exportateurs. Elle contribue également aux difficultés macro-économiques actuelles dues à la rareté des devises et à l’augmentation de l’écart entre la trésorerie et les taux de change bancaires officiels, apprend-on de l’étude.

La production de  café a stagné à moins de la moitié de ce qu’elle était au début des années 1990. La moyenne quinquennale est passée de 34 000 tonnes à 16 000 tonnes aujourd’hui. Le volume moyen de café  par  station de lavage au Burundi est aujourd’hui estimé à un quart de ce qu’il était dans le passé.  Cette baisse de la production est un indicateur que le secteur du café au Burundi est en difficulté. La faible productivité en est une autre, préviennent les experts.  L’équipe d’étude recommande donc qu’une enquête sur les coûts de production du café soit menée tous les trois ans par un organisme impartial scientifiquement qualifié. Cela pourrait servir à fixer un prix de cerise minimum sur une période de trois ans. Les intervenants du secteur sont unanimes que sans fortes incitations aux agriculteurs, le secteur du café du Burundi ne trouvera jamais son pied et la voie pour devenir un secteur rentable et durable à long terme.

Le régulateur impose des restrictions imposées aux opérateurs

D’après l’étude, la réglementation en vigueur interdit aux exploitants des stations de lavage du café de contracter des prêts auprès des bailleurs étrangers. Cela pour s’assurer que les acteurs respectent les exigences de rapatriement de toutes les devises provenant de la vente de café. Or, cette mesure limite l’accès au capital des opérateurs des stations de lavage et limite leur capacité à rivaliser avec les acheteurs de café « washed ».

Afin de faciliter la libre concurrence à ce niveau, l’ARFIC devrait annuler la récente réglementation limitant la capacité des exploitants des stations de lavage d’ouvrir des centres de collecte secondaires tant qu’ils répondent aux normes techniques et opérationnelles nécessaires, conclut l’étude.

Le différentiel du taux de change affecte le secteur

Le Burundi est en proie à une pénurie de plus en plus grave de devises. A la fin du deuxième trimestre de 2016, le franc burundais a commencé à se déprécier par rapport au dollar américain après une longue période de stabilité relative à environ 1 500 FBu par rapport au dollar américain. En mars  2018, l’écart entre le taux de trésorerie de 2 600 FBu par USD et le taux bancaire officiel de 1 760 FBu par USD était juste en dessous de 50%.

L’écart inhabituellement large entre le taux de change parallèle de la monnaie et le taux de change officiel appliqué par la Banque de la République (BRB) pénalise tous les acteurs du secteur du café. Il sous-estime la valeur des ventes à l’exportation du café en francs burundais. Cela limite la capacité des exploitants des stations de lavage du café à fixer des prix attrayants pour les cerises, peut-on lire.

Pour inverser la tendance, les experts recommandent une dévaluation du FBu d’une ampleur importante, éventuellement échelonnée dans le temps, qui ferait beaucoup pour résoudre ce problème. A défaut d’une dévaluation immédiate, une suspension temporaire des paiements du secteur du café pour les intrants à travers la redevance sur ces derniers et les contributions des agriculteurs pourraient soulager ces derniers de la pression du franc surévalué.

A propos de l'auteur

Benjamin Kuriyo.

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