Economie

Burundi : vers une révolution numérique dans le secteur financier

La Banque de la République du Burundi (BRB) engage une transformation majeure du secteur financier à travers un ambitieux projet de digitalisation. Ce projet, qui s’étend du 28 août 2024 au 28 août 2025, vise à moderniser les services financiers en améliorant leur accessibilité, en renforçant l’interopérabilité et en réduisant les coûts des transactions. Cette initiative a été détaillée par Amédé Kwizerimana, chef du service de surveillance des systèmes de paiement à la BRB, lors d’une conférence le 13 mars 2025 à Bujumbura.

Selon Amedé Kwizerimana, chef du service de surveillance des systèmes de paiement à la BRB (à droite), la digitalisation du système financier sera gérée par la Banque centrale et réduira les coûts de transaction.

 

La digitalisation du secteur financier repose sur plusieurs piliers stratégiques : l’identification des acteurs économiques, l’amélioration de la connectivité dans les zones reculées, la réduction des coûts des services financiers et l’intégration du Burundi aux échanges internationaux. Cependant, plusieurs défis doivent être surmontés pour assurer la réussite de cette transformation.

Le projet se heurte à quatre obstacles majeurs. Premièrement, l’absence d’identité financière unique. Cela constitue un frein à l’inclusion financière et à la traçabilité des transactions. En deuxième lieux, l’interopérabilité limitée entre les systèmes financiers existants. Ce qui rend les paiements complexes et coûteux. En plus de cela, la connectivité Internet est insuffisante, sa couverture est estimée à environ 22 %, limitant ainsi l’accès aux services numériques. Le quatrième défi non négligeable c’est la dépendance excessive aux paiements en espèces. Cela freine la transition vers une économie digitale.

Comment faire face à ces défis ?

Face à ces défis, le projet de digitalisation repose sur trois axes majeurs. Le premier axe concerne une digitalisation complète du secteur financier. L’identification financière unique, basée sur la biométrie, sera au cœur de cette transformation. Tous les utilisateurs des services financiers seront enregistrés via des tablettes spécialisées, permettant la capture des empreintes digitales et l’attribution d’un identifiant unique relié à tous leurs comptes et portefeuilles électroniques. Cette base de données centralisée sera gérée par la Banque de la République du Burundi (BRB). De plus, un centre de personnalisation des cartes de paiement sera mis en place pour produire des cartes à double puce (EMV + biométrie), permettant des transactions sécurisées, même hors ligne.

Le deuxième axe c’est l’interopérabilité totale des systèmes. Le projet prévoit la mise en place d’un Switch National, garantissant une interopérabilité complète. Avec l’interopérabilité monétique, les cartes bancaires seront utilisables sur tous les distributeurs automatiques de billets (GAB) et terminaux de paiement électronique (TPE). Par les paiements mobiles, toutes les plateformes et portefeuilles électroniques seront interconnectés. Enfin, avec les services bancaires en ligne, les plateformes de banque en ligne et de paiement sur Internet seront intégrées.

Cette interopérabilité élargira les possibilités de transactions, facilitant les paiements entre particuliers (P2P), entreprises (B2B) et administrations publiques (G2P, G2B), etc.

Ce n’est pas tout, certains paiements seront accessibles sans connexion Internet. Avec une carte bancaire, les paiements hors ligne seront possibles sur les GAB et TPE grâce aux cartes biométriques. Avec un téléphone mobile : un code USSD unique (*111#) permettra d’accéder à tous les services financiers du pays.

Quid de la modernisation des systèmes de paiement ?

Une mise à niveau des infrastructures financières est prévue afin de se conformer aux normes internationales, notamment l’adoption du standard ISO 20022 pour les systèmes Règlement brut en temps réel (RTGS), Compensation automatisée (ACH) et Dépositaire central de titres (CSD).

Cette mise à niveau, qui doit être achevée avant novembre 2025, offrira plusieurs avantages : une meilleure intégration aux systèmes régionaux comme EAPS, REPSS et PAPSS ; une traçabilité renforcée des paiements ainsi qu’une gestion optimale des liquidités et une disponibilité 24h/24 et 7j/7 des services de paiement.

Plan d’implémentation

Le projet implique tous les acteurs du secteur financier : banques, institutions de microfinance, agrégateurs de paiement, fintechs et services gouvernementaux. Son déploiement s’effectue en plusieurs phases :

Période Activités
Août 2024 Mise à niveau des systèmes RTGS, ACH et des paiements instantanés.
Novembre 2024 Lancement du projet de digitalisation complète du secteur financier.
Janvier 2025 Phase de tests approfondis sur tous les cas d’usage
Août 2025 Mise en production complète des solutions numériques

 

Une inclusion financière pour tous ?

Si la digitalisation du secteur financier est censée améliorer l’inclusion financière, elle risque paradoxalement d’exclure encore davantage les populations rurales non connectées. Une grande partie des Burundais utilisent peu, voire pas du tout, les services bancaires et s’appuient sur l’économie informelle.

Une transition forcée vers le numérique, sans formation ni accompagnement adéquat, pourrait creuser un fossé numérique au lieu de le combler. Par ailleurs, la généralisation des cartes biométriques et de l’identifiant unique centralisé par la BRB soulève des questions sur la protection des données personnelles et les risques de surveillance excessive.

Les banques et fintechs pourront élargir leur clientèle, mais qu’en est-il des petits commerçants, des agriculteurs et des citoyens lambda ? Le risque est de voir une modernisation qui profite principalement à une élite connectée, tandis que la majorité de la population reste en marge du système.

A propos de l'auteur

Gilbert Nkurunziza.

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