Selon le ministère de la Santé Publique et de la Lutte contre le Sida, le taux de séroprévalence a régressé. Cependant, la crise sanitaire liée à la pandémie de Covid-19 exacerbe les difficultés auxquelles sont confrontées les personnes vivant avec le VIH
Lors de la célébration de la journée mondiale de lutte contre le Sida, Dr Thaddée Ndikumana, ministre de la Santé Publique et de la Lutte contre le Sida a indiqué que le nombre de personnes séropositives a sensiblement diminué. Il est en effet passé de 6% en 2010 à 0,9% en 2017. Toutefois, explique Dr Ndikumana, l’objectif de ce ministère est d’avoir neutralisé ce fléau en 2030 jusqu’au taux de 0%.
Les cibles 90-90-90 ne sont pas encore atteintes
Rappelons alors 3 cibles qui correspondent à l’objectif dénommé 90-90-90 fixés par l’Onusida jusqu’à 2020 pour la riposte face au Sida et pour tous les pays du monde. Selon le Dr Aimé Ndayizeye, directeur général du Programme National de Lutte contre le Sida (PNLS), l’idéal serait que 90% de la population connaissent leur statut sérologique, 90% des séropositifs soit sous traitement ARV et 90% de ces derniers aient une charge virale indétectable. Mais, déplore-t-il, la première cible n’a pas été atteinte : « Sur 85.963 personnes attendues, 70.214 ont été dépistées et ont eu leurs résultats, c’est-à-dire 81% au lieu de 90% ». Pour le second, 69.937 personnes de ces 70.214, c’est-à-dire 99,6% sont sous traitement ARV. « Presque tous ceux qui ont été testés positifs sont sous traitement ARV. Quant au troisième cible, Dr Ndayizeye regrette que tout le monde n’ait pas pu se payer le test de la charge virale en VIH. Mais, révèle-t-il, 88% des personnes recevant un traitement ont pu se payer le test de la charge virale en VIH, c’est-à-dire 27.809 sur 31.308 ont vu leur charge virale supprimée.
Le dépistage, un défi de plus pour les jeunes
L’Enquête Démographique et de Santé (EDS III 2016-2017) montre que 70% des jeunes ne se sont pas fait dépister. Audrey Inarukundo, directrice exécutive nationale du Réseau national des jeunes vivant avec le VIH/Sida (RNJ+) explique cela par le fait que ces jeunes font face à de nombreux défis. Elle cite l’introduction de nouvelles approches de dépistage entre autres le fait que certaines structures santé font seulement le dépistage des personnes à risque et la pratique de l’« index testing » qui consiste à identifier, à retrouver et à aviser les personnes dont un partenaire sexuel antérieur ou une personne avec qui elles ont consommé ensemble la drogue vient de recevoir un diagnostic du VIH. La recherche des contacts a pour but d’encourager les partenaires à se faire tester le VIH afin de pouvoir détecter les nouvelles infections aussitôt que possible. « Dans ce cas, le dépistage n’est plus volontaire et ceci entraine une certaine réticence chez les jeunes », précise-t-elle.
Selon Inarukundo, RNJ+ propose une solution à ces jeunes. « Holistic Youth Center » est un centre de dépistage et de prise en charge du VIH. Les jeunes y reçoivent des services adaptés au dépistage du VIH et cela se fait dans le secret. Les chiffres le témoignent. De Janvier à novembre 2020, ce centre a enregistré 425 jeunes qui se sont fait dépister le VIH et, parmi eux, 28 ont été testés positifs soit 6,58%. Et Inarukundo de rassurer que les ARV sont disponibles.
Quid de la riposte au VIH à l’heure de la Covid-19 ?
La pandémie de Covid-19 a lourdement perturbé la riposte au VIH et pourrait continuer sur sa lancée. Une interruption totale de six mois du traitement contre le VIH entraînerait plus de 500 000 morts supplémentaires en Afrique subsaharienne l’année prochaine (2020-2021). Une interruption, ne serait-ce que de 20 %, provoquerait 110 000 morts supplémentaires.
Selon le rapport de l’Onusida sur l’épidémie mondiale de VIH depuis 2015, 3,5 millions d’infections au VIH et 820 000 morts supplémentaires liés au Sida sont imputables à des objectifs non atteints. Elles auraient été évitées si les objectifs de 2020 avaient été réalisés. La riposte pourrait également revenir dix ans en arrière au moins si la pandémie de Covid-19 venait à interrompre gravement les services de lutte contre le VIH. Il souligne l’urgence pour les pays en développement de redoubler d’efforts et d’agir sans tarder pour soigner les millions de personnes laissées de côté. L’Onusida presse également les pays à augmenter leurs investissements pour combattre ces deux maladies en l’occurrence le VIH/Sida et la pandémie de Covid-19. Les investissements pour riposter au VIH ont chuté de 7% entre 2017 et 2019 et représentent 18,6 milliards USD. Ce revers signifie qu’il manque 30% du budget de 26,2 milliards USD nécessaire à une riposte efficace au VIH pour 2020.
Selon le message du Dr Matshidiso Moeti, Directrice régionale de l’OMS pour l’Afrique, à l’échelle mondiale, 38 millions de personnes vivent avec le VIH, dont 67% dans la Région africaine de l’OMS. En 2019, plus d’un million de personnes dans cette Région ont été nouvellement infectées par le VIH. Ce qui équivaut à 60 % du total mondial et, malheureusement, 440 000 personnes sont décédées des causes liées au VIH dans la Région.
Ces chiffres s’ajoutent au fait que, dans la Région africaine, les nouvelles infections par le VIH et les décès liés au Sida ne diminuent pas assez rapidement pour atteindre la cible de l’objectif de développement durable qui vise à mettre fin aux épidémies de Sida d’ici à 2030.
Pour rappel, un montant de 110 millions USD a été octroyé au ministère de la Santé Publique et de la Lutte contre le Sida. Cette subvention est destinée à la lutte contre le VIH, la tuberculose et le paludisme pour une période de 3 ans (de 2021 à 2023).
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