Dans les pays post-conflits, le langage appelant à la violence symbolique peut être une source de prolifération des messages de haine. Ce langage rappelle le passé sombre, les guerres qui, malheureusement, n’ont pas effacé les séquelles. De là, la violence symbolique sera changée en violence physique. Le sociologue Patrice Sabuguheba rappelle à l’ordre les leaders pour qu’ils sachent comment communiquer et garder à l’esprit leurs intérêts. A la communauté de savoir décortiquer ces messages
« Les violences symboliques sont liées aux messages qui stigmatisent l’autre », explique Patrice Sabuguheba. Généralement, celui qui est stigmatisé, qui est épinglé, qui est étiqueté est identifié comme un animal, comme un mal quelconque. Et là, le message donné en lui-même évoque la violence. Dans un premier moment, il se met dans les esprits des gens qui essaient de capitaliser cette stigmatisation quitte à ce qu’il y ait un mécontentement.
De telles violences visent à évincer les concurrents ou les détenteurs des postes afin d’y accéder. S’il s’agit d’un homme d’église, il sera qualifié de Satan. On veut qu’il soit noirci. L’objectif de celui qui est en train de stigmatiser ce leader est qu’il soit remplacé. Pour ce sociologue, il en est de même au niveau politique.
« L’homme est patient mais sa patience a des limites »
Pour Sabuguheba, il arrive que cette stigmatisation finisse sa course dans la masse populaire, dans les sympathisants des leaders politiques, religieux ou économiques. Ce qui va rappeler le passé douloureux. « Quand il y a mécontentement et refoulement après, il suffit d’un petit élément déclencheur pour que les communautés visées, les groupes visés se rentrent dedans. L’homme est patient, mais sa patience a des limites », fait-il savoir.
Les éléments déclencheurs de la violence peuvent venir des circonstances politiques. La tension monte, les émotions s’échauffent et, à un moment donné, l’élément déclencheur arrive. Les gens commencent à se rappeler de ce qui s’est passé longtemps avant ou dans un passé proche et quand on ne dit plus jamais, les groupes en conflit se rentrent dedans. C’est le tissu social qui est finalement déchiré.
A quel moment peut-on observer les discours du genre ?
Ce genre de discours s’observe souvent quand certains événements majeurs approchent. C’est par exemple quand le mandt des hommes d’église touche à sa fin. Les prétendants au poste vont commencer à ternir l’image de l’un et de l’autre candidat. « S’il s’agit des hommes politiques et là c’est clair ». A l’approche de la campagne électorale, les intérêts sont divergents. Certains gens profitent de ce moment chaud, où les émotions ne sont pas maitrisées, où la masse est agitée pour rappeler les mauvais événements du passé et pour dire mettez-vous en marche pour que notre victoire ne soit pas volée. Et là, tous les moyens sont permis pour dire du mal, pour comparer un leader à un animal féroce, etc.
Dans les pays post-conflits, le danger est que le langage appelant à la violence rappelle le passé sombre, un passé teinté de guerres qui, malheureusement, n’ont pas effacé les séquelles. Dans ce cas, « la violence symbolique sera changée en violence, cette fois-ci physique. Le tissu social va être déchiré, le sang va être versé, les intérêts divergents qui étaient cachés, vont cette fois-ci s’étaler au grand jour et on va constater que le leader du groupe qui a commencé les messages de haine et de violence avait finalement pour objectif la conquête du pouvoir ».
Quel comportement à adopter ?
Le sociologue Sabuguheba rappelle à l’ordre les leaders. « Qu’ils sachent comment communiquer, garder à l’esprit les intérêts qu’ils visent et garder aussi à l’esprit les messages qu’ils donnent ». Il faut être conséquent parce que le message de haine, le message de violence peut arriver jusqu’à la base déjà altéré, déjà chargé émotivement et va faire en sorte que les gens se rentrent dedans et c’est la guerre qui commence.
Les différents groupes de la société doivent savoir décortiquer ces messages pour dire finalement celui-là est un menteur, celui-là n’a pas voulu dire ceci. « Quoi qu’il en soit, ce n’est pas une raison de nous rentrer dedans, de nous blesser, de nous combattre pour des intérêts qui se trouvent au sommet où seuls les leaders vont être les premiers bénéficiaires et la population devient finalement victime ». Une fois cette prise de conscience effectuée, la population va se comporter de manière à minimiser ces messages, à dire non à ces messages de violence et de haine et à dire oui au message de justice, de paix, de réconciliation et de développement.
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