Environnement

La ville de Bujumbura encore frappée par les catastrophes naturelles

La ville de Bujumbura est en proie à des catastrophes naturelles. Les pluies diluviennes qui ont touché les quartiers du Nord le week-end dernier en sont une preuve. On dénombre une dizaine de victimes, plus de 200 ménages affectés et près de 300 personnes sinistrées. Des mesures de prévention s’imposent pour atténuer les effets du changement climatique à l’échelle nationale

Le matin du dimanche 22 décembre 2019, les images sur les dégâts matériels et humains causés par les catastrophes qui ont frappé les quartiers du Nord de la capitale économique inondent les réseaux sociaux. Ce qui remémore les catastrophes de Gatunguru qui ont fait des dizaines de victimes. Les photos des maisons complètement ou partiellement détruites, des corps sans vie, des pistes bouées deviennent virales sur les réseaux sociaux notamment sur WhatsApp et Facebook. Elles sont largement partagées et commentées par les internautes. On parle de plusieurs morts et blessés. Le reporter de Burundi Eco décide de se rendre sur place pour s’enquérir de la situation. Il monte sur une moto et se dirige vers les quartiers de Winterekwa et Nyabagera fortement touchées par les pluies diluviennes. Malheureusement la route nationale n°1 est impraticable entre la 3ème avenue (près du chef-lieu de la commune Ntahangwa et la 14ème avenue de la zone Kamenge. Les agents de l’ordre ont bloqué la route puisque les travaux de débrayage de débrayage des alluvions ont déjà commencé. La moto ne peut pas franchir cette partie de la route transformée en rivière.

Les eaux de la rivière Cari séparant les quartiers Winterekwa et Nyabagere ont débordé suite aux pluies diluviennes

Nous amorçons la grande marche vers l’épicentre dudit catastrophe en amont desdits quartiers. La marche n’est pas du tout facile dans la boue qui fait environ 30 cm d’épaisseur. Les citadins s’amassent de part et autre de la RN 1 contemplant impuissamment le drame.  On peut lire la désolation sur leur visage. Certains murmurent que c’est la prophétie qui se réalise. Cette dernière prédisait des pluies violentes qui feront de nombreuses victimes. Ceux qui vont à la messe, marchent pieds nus ou grimpent sur le dos des personnes. Les infrastructures socio-économiques, les lignes téléphoniques, les fibres optiques et les conduites d’eau ont été emportées par les eaux. Les riverains tentent tant bien que mal de débarrasser les masses de terre et les eaux qui ont envahi leurs habitations. Arrivé à la 14ème avenue, nous empruntons une voirie complètement délabrée par les eaux de pluie vers la rivière Cari à l’origine de la catastrophe. Plus nous approchons, plus les dégâts matériels sont énormes. Des cultures de maïs, des maisons, des étables ont été emportées par les eaux de cette rivière. Des véhicules engloutis par les alluvions, des animaux domestiques immobilisés, les habitants parlent d’une dizaine de morts. Vers 11 h du matin, le ministre en charge de la gestion des catastrophes présente le bilan provisoire des dégâts à la presse.

La rivière Cari, source de malheurs

Qu’est ce qui s’est réellement passé dans la nuit du 21 au 22 décembre 2019 ? Les eaux de la rivière Cari séparant Winterekwa et Nyabagere ont débordé suite aux pluies diluviennes. Elles ont emporté presque tout sur leur passage (des maisons, des cultures de maïs, des étables, etc.)

Très tôt le matin, les habitants avaient déjà débuté les activités de débrayage

Le bilan est de 12 personnes mortes, principalement des enfants et des personnes âgées et plus de 30 blessées. Ces derniers ont été évacués vers les structures de soins de la capitale économique. Quelques infrastructures socio-économiques dont des ponts, des canaux d’adduction d’eau potable ont été détruites, a annoncé Alain Guillaume Bunyoni, ministre de la Sécurité Publique et de la Gestion des Catastrophes. « En collaboration avec nos partenaires, il est prévu l’installation d’abris provisoires pour héberger les sinistrés », dit le ministre Bunyoni. Il exhorte les populations habitant dans les zones à risque de s’en éloigner au risque d’être emportées par les torrents potentiels. Le lendemain, le bilan s’alourdit : « Le bilan fait état de 15 morts, 45 blessés et 219 ménages affectés par la catastrophe. Au total, ce sont 279 personnes regroupées à l’Ecofo Uwinterekwa », selon un rapport provisoire établi par le chef de la zone Gihosha, Floribert Sibomana, lundi le 23 décembre 2019.

Risque de propagation des maladies

Le Bureau de Coordination des Affaires Humanitaires (OCHA) évoque le risque de propagation des maladies. « Les risques de maladies hydriques sont importants, car les structures d’assainissement comme les puits perdus, sont débordées. Elles déversent leurs contenus sur les grands axes routiers risquant ainsi de contribuer à une propagation du choléra », lit-on dans le bulletin de l’Ocha du 23 décembre 2019. En outre, précisent les experts de l’OCHA, les eaux stagnantes pourront être des facteurs d’aggravation de l’incidence du paludisme.

Le pays est en proie à des catastrophes naturelles

Depuis le mois d’octobre, le pays est frappé par des catastrophes naturelles sans précédent. Les inondations, les glissements de terrain, les éboulements, des pertes en vies humaines sont signalés ici et là à travers le pays. La forte pluviosité enregistrée depuis le mois d’octobre cause d’innombrables dégâts matériels et humains. Les pluies torrentielles qui se sont abattues en date du 4 décembre 2019 sur les collines de Nyempundu, Gikomero et Rukombe de la zone Nyamakarabo, commune Mugina en province de Cibitoke ont causé de nombreux dégâts humains et matériels. Le bilan provisoire établi par la police était de 26 morts, 7 blessés et 10 personnes portées disparues. Des maisons, champs de maïs et biens divers ont été aussi endommagés.

Le directeur général de la Protection Civile, Commissaire de Police Antoine Ntemako fait le bilan des dégâts enregistrés jusqu’en octobre dernier. « Il y a eu au total dans toutes les provinces du pays 9097 maisons détruites, soit 45 235 personnes sans abris (moyenne de 5 personnes par ménage). 31 204 hectares de champs de cultures ont été endommagés, soit l’équivalent de 312 km2. Ce qui présage une diminution sensible de la production agricole au cours de cette saison, détaille directeur général de la Protection Civile sur les ondes de la Radio Isanganiro.

Les infrastructures socio-économiques ne sont pas épargnées. « 107 salles de classe ont été détruites, les infrastructures routières ont été abimées, des ponts ont été détruits », selon Ntemako. A titre illustratif, la RN7 est menacé d’écroulement au poteau kilométrique 18. En cas de destruction des routes nationales, le préjudice économique peut être énorme, déplore-t-il. Il a affirmé que le gouvernement peut faire face à ces catastrophes naturelles. Il a déjà mis en place des structures dont le cadre légal et institutionnel puisqu’il y a des plateformes de prévention et de gestion des catastrophes au niveau provincial et communal. En ce qui concerne les moyens financiers, le commissaire de police Ntekamako fait savoir qu’il y a un minimum de fonds même s’il y a à améliorer. Il demande qu’il y ait la mise en place d’un fonds alloué à la réponse aux catastrophes.

Les occupants de cette maison sont indemnes. Après avoir constaté la montée des eaux de la rivière Cari, ils se sont accrochés à la charpente de la maison durant toute la nuit

Pourquoi la recrudescence des catastrophes ?

Dans le Dossier Pédagogique consacré à l’environnement paru en mai 2019, Burundi Eco est revenu longuement sur les causes et les conséquences des catastrophes. Voici les grandes constatations. La déforestation et l’exploitation anarchique des terres détruisent le couvert végétal. En conséquence, les précipitations entrainent l’érosion superficielle qui charrie des milliers de tonnes de terre et des débris végétaux vers les cours d’eau. C’est le cas pour les montagnes qui surplombent la ville de Bujumbura. Pour les environnementalistes, les inondations, les glissements de terrain, la sécheresse ou encore les pluies torrentielles sont des indicateurs du changement climatique.

Des actions s’imposent dans l’immédiat en amont pour atténuer les effets du changement climatique. Il s’agit entre autres de : la protection des collines qui surplombent la ville de Bujumbura par le reboisement, les courbes de niveau, les haies antiérosives, la culture sur des terrasses et la restauration du paysage agroforestier afin de favoriser l’infiltration des eaux de pluie En aval, le respect du code de l’environnement s’impose. Ainsi, les services de l’urbanisme et de l’habitat doivent se mobiliser et assumer leurs responsabilités. Ce sont eux qui devraient empêcher la population de construire de façon anarchique et non concertée. Sinon, le pire est à craindre !

A propos de l'auteur

Benjamin Kuriyo.

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La problématique de gestion des déchets municipaux refait surface. Les autorités sont à pied d’œuvre pour assainir la ville de Bujumbura. La campagne zéro déchet bat son plein. Notre édition spéciale revient sur l’impact des mesures prises pour rendre la capitale économique plus propre que jamais. Les grands axes de la capitale économique se dotent de nouvelles colonnes de fleurs, histoire d’attirer les touristes. Cependant, dans les quartiers, la collecte et la gestion des déchets laissent à désirer. Les sociétés en charge de la salubilité brillent par leur inefficacité. Pire encore, la ville ne dispose pas de décharge publique en bonne et due forme. Ce qui fait que les déchets constituent un grand problème en amont comme en aval.

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