Editorial

Une mesure inopportune

Le fait de forcer les mères célibataires à dénoncer les auteurs des grossesses enfreint en quelque sorte les droits des femmes. Certes, les pouvoirs publics ont la bonne volonté d’en découdre avec le phénomène de pères inconnus, mais le recours à la force aura des retombées négatives sur le vécu quotidien des mères célibataires. Lors d’une séance de questions orales adressées à la ministre de la Santé, un sénateur a enfoncé le clou. Pour lui, les sages-femmes devraient exiger aux mères célibataires de dénoncer les auteurs des grossesses durant l’accouchement. A défaut de quoi, elles ne bénéficieront point des avantages liés à l’accouchement tels que prescrits dans la politique de gratuité des soins. Cette pratique dangereuse expose les futures mamans à des conséquences graves. Cela peut faire exploser les cas mortalité infantile ou les maladies postpartum. Les médecins doivent exercer librement leur métier. Ils ont prêté serment avant d’exercer. Ainsi, ils sont tenus de respecter toutes les personnes, leur autonomie et leur volonté, sans aucune discrimination de par leur état ou leurs convictions. De plus, ledit serment les oblige d’intervenir pour les protéger si elles sont affaiblies, vulnérables ou menacées dans leur intégrité ou leur dignité. Même sous la contrainte, le médecin ne fera jamais usage de ses connaissances contre les lois de l’humanité. D’où les autorités devraient rester en dehors du métier et laisser les médecins accomplir leur noble mission.

Benjamin Kuriyo, Directeur de publication

L’idée de forcer les mères célibataires à dénoncer les auteurs des grossesses a été annoncée par le ministre de l’Intérieur en personne l’année dernière. « Nous allons forcer leurs mamans à révéler les pères de ces enfants, car sûrement qu’elles les connaissent », a fait savoir Martin Niteretse, ministre de l’Intérieur lors d’une rencontre avec les gouverneurs des provinces. Il a même interdit aux agents d’état civil d’enregistrer les enfants à pères inconnues dans les registres d’Etat civil. Une mesure qui a eu un écho négatif dans l’opinion. Les points de vue divergent. Certains arguent que forcer les mères célibataires à révéler les auteurs de leurs grossesses comme le souhaite le ministre de l’Intérieur est une excellente initiative. Cela pourrait rétablir dans leurs droits ces enfants qui risquent de porter pendant toute leur vie le chagrin de ne pas connaître leurs pères.  D’autres disent que cela pourrait causer plus d’ennuis que de bien.

L’autre souci est que l’obligation de dénoncer l’auteur d’une grossesse pourrait faire qu’une personne soit accusée injustement d’être le père de l’enfant. Une fille sur un lit d’accouchement pourrait souffrir doublement. Les cas d’abus sexuels sont légion dans les ménages. La contraindre à dénoncer l’auteur présumé avant d’accoucher serait de remuer le couteau dans la plaie encore fraîche et provoquer des traumatismes à la future maman. Qu’en est-il des domestiques abusées par leurs patrons ? Auront-elles le courage de les dénoncer ? Et qui va les protéger contre les représailles des auteurs véreux de leurs grossesses. Pour les experts, le seul test qui peut révéler le vrai père de l’enfant c’est le test ADN. Or, peu de structures sanitaires en disposent et on ne peut pas y recourir sans l’avis préalable du procureur. Une fois en vigueur, la mesure risque de bafouer encore une fois les droits des enfants et des mères célibataires.

A propos de l'auteur

Benjamin Kuriyo.

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éditorial

Un environnement des affaires peu attractif

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  • Journal n° 607

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