Editorial

L’économie des ménages en souffrance

L’épizootie de la fièvre de la vallée du Rift qui décime les troupeaux et le petit bétail (chèvres et moutons) change la donne. Désormais, les grosses fumées qui attiraient les passants devant les débits de boissons de la capitale économique ne sont plus qu’un souvenir lointain.  Dans les grands marchés, les stands réservés à la commercialisation de la viande sont vides. Les bouchers observent un chômage technique avec l’interdiction de l’abattage des bovins. Les Bujumburois devraient s’adapter coûte que coûte à de nouvelles habitudes alimentaires. Il faudra se métamorphoser et migrer vers le végétarisme. Adieu les recettes à base de viande.  Les poulets, le poisson, la viande de porc substituent les ragoûts de bœuf, les jarrets, les filets, au niveau des plats proposées. … en tout cas pour un bon bout de temps. C’est un coup dur pour les exploitants des bars qui misent en grande partie sur la viande grillée ou rôtie pour écouler la bière.  Il y a de gros risques que la consommation des boissons chute sensiblement. 

Benjamin Kuriyo, Directeur de publication

La période estivale est propice à la célébration des fêtes. Les agri-éleveurs comptent sur leurs troupeaux pour générer de revenus leur permettant de célébrer les fêtes ou de subvenir aux besoins de la famille. Il ne faut pas perdre de vue que les ménages tirent une partie de leurs ressources dans la vente du bétail. Les uniformes scolaires, les intrants agricoles et le minerval proviennent de la vente des chèvres, des vaches ou des moutons. La divagation des animaux étant interdite et les marchés de bétail cadenassés jusqu’à nouvel ordre, les éleveurs en paient un lourd tribut. Ils attendent impatiemment la vaccination du bétail à grande échelle pour contenir cette épidémie. 

Dans certaines régions du pays, les recettes des communes affichent une courbe descendante. Les commerçants qui paient des taxes au moins une fois la semaine en fonction des jours du marché ont vu leur activité commerciale réduite. Les fournisseurs de bétail sont eux contraints à suspendre leur activité. Tout ce monde-là ne sait pas à quel saint se vouer. Tout d’un coup l’épidémie leur a bloqué l’accès à leur principale source de revenus. Pour les cérémonies de dot, la vache occupe une place importante chez les conservateurs.  Avec la limitation des mouvements des bêtes, ils doivent soit reporter sine die les cérémonies de remise de dot ou accepter de faire des promesses vides. Non seulement l’économie est affectée, mais aussi la culture et la tradition en pâtissent. 

Dommage a la communauté musulmane qui avait demandé l’autorisation d’acheter et d’abattre les moutons mais en vain. La fête de Tabaski de cette année 2022 sera célébrée officiellement le samedi 9 juillet 2022 sans la viande de mouton.

L’autorité rassure que le gouvernement est à l’œuvre pour contrôler cette fièvre hémorragique, De plus, cette crise de la viande perturbe les chaines d’approvisionnement. Les poulaillers se vident à un rythme effréné  pour compenser le déficit en viande. Malheureusement, les aviculteurs locaux ne sont pas en mesure de satisfaire la demande. Par conséquent, les prix du poulet, du poisson, des fretins augmentent de façon exponentielle. Un kilo d’un steak de porc se négocie à 14 000 FBu. La rupture des stocks s’annonce, y compris dans les grandes boucheries. Dans ces conditions, c’est tout le business autour de la viande qui est paralysé.   

L’initiative de repeupler le cheptel bovin à travers la distribution des races améliorées et l’insémination artificielles connait deux défis majeurs. S’il ne s’agit pas du manque d’un marché d’écoulement du lait, ce sont les maladies qui sapent les efforts des agri-éleveurs. D’où l’intérêt de prévoir un plan de riposte chaque année  et une gestion efficiente de la filière. Sinon l’intention du pays d’allonger la liste des produits d’exportation aux produits carnés sera vouée à l’échec.

A propos de l'auteur

Benjamin Kuriyo.

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éditorial

Vers la redynamisation de la filière café ?

Vers la redynamisation de la filière café ?

Le café reste le pilier de l’économie nationale dans la mesure où il apporte des devises et des revenus aux ménages. Cependant la production du café vert est en chute libre. Elle oscille autour de 8 000 tonnes alors que les projections portent sur une quantité exportable de 45 000 tonnes chaque année. Pour gagner ce pari, il faudra mobiliser des investissements conséquents pour redynamiser l’ensemble de la chaine de valeur. Malgré les tentatives de nationalisation de la filière café, les défis demeurent nombreux. Les milieux bien informés évoquent notamment le désintéressement de la population, le faible encadrement des producteurs, les opérateurs privés qui s’enrichissent sur le dos des producteurs.
  • Journal n° 606

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