Commerce

La fin du marché de la friperie n’est pas pour demain

Le commerce des vêtements de seconde-main domine le marché vestimentaire. Cela se manifeste à travers tous les centres commerciaux, les galeries et les vendeurs ambulants. C’est une activité pourvoyeuse d’emplois pour des milliers de personnes de toutes catégories confondues. Toutefois, les pays de la Communauté Est-Africaines envisagent leur retrait progressif de ce type de commerce, un engagement qui va mettre en péril certains opérateurs économiques

Vers 6h du matin, les grossistes se précipitent dans les dépôts de ballots de fripes pour les revendre aux détaillants. Ils trouvent ceux-ci déjà agglutinés devant les portes pour se disputer les habits de meilleure qualité. Ils sont classés en trois lots. Ceux de première, de deuxième et de troisième qualité. Les prix d’achat en sont aussi conséquents. Ainsi, chacun connait en quel type de fripes il veut s’approvisionner. A partir de ce moment, tous les canaux de circulation publique connaissent une nuée de vendeurs ambulants, chacun selon le type d’habit qu’il a choisi. Les détaillants qui disposent de stands dans différentes maisons commerciales ou galeries de la mairie de Bujumbura rangent leurs articles. L’activité prend de l’ampleur dans les heures de midi et le soir quand les gens sortent de leurs bureaux ou s’apprêtent à rentrer. Une grande partie se précipite à acheter ces habits de seconde-main parce qu’ils sont moins chers, surtout en cette période où on se prépare à la rentrée scolaire.

Fripes

Le Burundi sera-t-il prêt à en finir avec l’importation des friperies d’ici 2019

La situation se présente ainsi alors qu’en 2015, les chefs d’Etat de la Communité Est Africaine (CEA) ont adopté un processus graduel sur trois ans, afin d’éliminer les importations de vêtements et de chaussures d’occasion. Le but est de promouvoir les industries textiles, vestimentaires et du cuir de la région. Les pays de la CEA ambitionnent mettre sur pied des industries textiles plus productives pour servir les marchés locaux et internationaux, d’ici 2019. Néanmoins, la période assignée va bientôt prendre fin sans que le processus ait atteint son paroxysme.

Des mesures de découragement en application

Des stratégies allant dans le sens de promouvoir l’industrie textile locales ont été adoptées par l’Ouganda, le Rwanda et la Tanzanie. Ce sont notamment la surtaxation des vêtements et des chaussures d’occasion pour limiter les importations de ces produits. La taxe appliquée par le Rwanda a augmenté de 10 fois. Depuis 2016, la taxe sur un kilo de vêtements usagés est passée de 0,2 à 2,5 USD, tandis que les taxes sur les chaussures usagées sont passées de 0,2 à 3 USD le kilo. De plus, ces pays ont initié des programmes d’investissement dans le secteur des textiles.

La Tanzanie a mis en place un plan d’industrialisation qui prévoit la formation des jeunes au métier de couturier et la création d’industries textiles. De plus, en collaboration avec ses partenaires économiques, elle a investi dans l’industrie textile en lançant ses propres industries textiles.  L’Ouganda, quant à lui, veut développer à tout prix son industrie textile pour valoriser sa production cotonnière estimée à 200 000 tonnes par an. L’Ouganda ne transforme localement que 5% de sa production. Cela est dû aux importations de vêtements usagés ou encore à la concurrence des tissus importés de l’Extrême-Orient.

La non importation des fripes au Burundi n’est pas pour demain

Le Burundi sera-t-il prêt à en finir avec l’importation des friperies d’ici 2019. Les autorités restent prudentes pour répondre à cette question. Jean Pierre Bacanamwo Directeurs Général des Infrastructures et des Affaires Economiques au ministère en charge des Affaires de la Communauté Est Africaine est optimiste. « En collaboration avec les pays membres de la CEA, les matières premières utilisées dans la fabrication des habits ont été identifiées. Elles existent au niveau de la sous-région. L’étape suivante consistera à exonérer ces produits des droits de taxes et de douanes. Et l’Afritextile pourra commencer la fabrication des vêtements autre que les pagnes », déclare-t-il. Il a souligné que des efforts sont en train d’être menés pour réduire l’importation des vêtements d’occasion. Pour lui, si le Burundi ne respecte pas cette échéance, la période pourra être prolongée.

Mesure décriée par les commerçants

Karim (pseudonyme) est vendeur des fripes au marché de Ruvumera dans la zone de Buyenzi. Il explique que pour un pays pauvre comme le Burundi, interdire l’importation des fripes serait inapproprié. « Nous n’avons même pas d’industries textiles qui compenseraient cette interdiction. Les habits usagés que nous importons souvent sont à des prix fortement concurrentiels comparativement aux habits flambants neufs importés de l’Occident ou de l’Asie ». Ce point de vue est partagé par Mariam, Une vendeuse de draps et essuie-mains. Selon elle, promouvoir l’industrie locale est certes à encourager mais, ajoute-il, de telles mesures qui affectent la vie des gens devraient être scruptées à la loupe.

Le Burundi ne dispose que de l’Afritextile « ex-COTEBU » comme industrie textile. Celle-ci fabrique des pagnes et la grande partie des matières premières utilisées est importée. Et la pénurie de devises ne facilitent pas la tâche aux importateurs des produits utilisés dans l’industrie textile. La quasi-totalité du coton produit localement est absorbée par cette industrie. D’ailleurs la production cotonnière ne cesse de chuter. Le pays a vu sa production d’or blanc passer de 9 000 tonnes à 2 300 tonnes dans l’intervalle d’une vingtaine d’années (1993-2014). Et elle continue à chuter au lieu d’augmenter.

Au Burundi, le volume des articles de la friperie est en nette progression. Les données fournies par l’Institut des Statistiques et Etudes Economiques du Burundi (ISTEEBU) montrent que le pays a importé plus de 6 010,9 tonnes de friperies pour 6,7 milliards de FBu en 2017. L’année suivante, 11 366,4 tonnes d’articles de friperies ont été importés pour une valeur de 14,7 milliards de FBu.    

A propos de l'auteur

Bonith Bigirindavyi.

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