Santé

L’infertilité masculine, un sujet tabou

L’infertilité touche à la fois les hommes et les femmes. Cependant, dans nos sociétés patriarcales, tous les regards sont rivés sur la femme en cas de retard d’une grossesse. Par conséquent, les plus radicaux divorcent ou cherchent des concubines qui servent d’étalonnage. D’où l’explosion des conflits familiaux. Une étude parue dans la revue médicale de Bujumbura élucide nombreux facteurs dont l’abus d’alcool associé à l’infertilité masculine. 

La plupart des hommes pensent que le fait d’éjaculer est un gage de fécondité.

 

L’infertilité est définie comme l’impossibilité pour un couple d’obtenir une grossesse au bout de 12 mois en ayant des rapports sexuels réguliers (3 à 4 fois/semaine) dans l’optique d’avoir une conception. Cela est valable pour un couple stable dont les membres cohabitent et sont en âge de procréer.

Dans de nombreuses sociétés africaines, l’absence d’une naissance après une certaine période conduit à l’infidélité voire au divorce. Ce qui ouvre la voie aux discours dégradants, à la stigmatisation et aux conflits familiaux. Malheureusement, dans la plupart des cas, les soupçons sont d’emblée portés vers la femme. Comme, c’est elle qui porte la grossesse et qui donne naissance au nouvel être, elle est supposée apporter les premières preuves de fertilité. Dans les ménages, les femmes subissent toutes formes de discrimination.  Elles sont taxées de tous les maux et subissent la punition sociale d’être interrogées par qui que ce soit sur leur vie conjugale.

Quelles sont causes de l’infertilité masculine ?

Une étude de cas menée en 2019 auprès de 41 patients dans quatre principaux hôpitaux publics de la ville de Bujumbura, à savoir : le Centre Hospitalo-Universitaire de Kamenge (CHUK), l’Hôpital Militaire de Kamenge, la Clinique Prince Louis Rwagasore et l’Hôpital Prince Régent Charles apporte des éléments de réponse. L’étude avait pour but d’explorer le spermogramme des couples infertiles au Burundi. Cette étude rétrospective a porté sur l’examen du spermogramme dans un contexte d’une infécondité primaire ou secondaire effectuée sur une période de trois mois. Parmi les patients qui avaient consulté un médecin pour infertilité, 45% des cas n’avaient pas encore eu d’enfants depuis 2 à 4 ans de vie de couple et 65% avaient déjà des enfants, mais avec un retard à la nouvelle conception d’au moins 5 ans. Quatorze patients avaient signalé des antécédents d’infertilité du couple dans la fratrie.

Certes l’étude a des limites, mais elle renseigne sur l’ampleur de ce phénomène qui fragilise le tissu familial. Les causes de l’infertilité masculine sont dominées par des troubles quantitatifs du spermogramme. Les facteurs associés sont surtout une consommation exagérée d’alcool et des troubles érectiles. Vous aurez compris que l’alcoolisme constitue un des facteurs de risque de l’infertilité masculine. Ainsi, les résultats de cette étude montrent que l’infertilité due à l’alcoolisme a été rapportée dans 78% des cas étudiés, les causes liées aux troubles érectiles représentent 46% des cas alors que le tabagisme représente uniquement 27% des cas.

Personne n’est à l’abris du danger

Les résultats de cette étude révèlent que l’infertilité touche les couples jeunes en pleine activité économique entre 36 et 41 ans.   Parmi les couples qui avaient consulté pour infertilité, la plupart avaient une infertilité datant de 2 à 4 ans à partir de la date de l’union conjugale. Pour les couples qui avaient déjà eu au moins un enfant, la durée était plus longue (5 ans en moyenne).

L’explication de cette situation est que les couples ayant déjà un enfant sont moins pressés. La longue durée d’attente pour décider de consulter est plutôt liée à des croyances traditionnelles superstitieuses rattachées à l’infertilité en refusant d’admettre que l’infertilité pouvait être due à une cause médicale curable.  Vous saurez que les facteurs de risque associés à l’infertilité masculine étaient en particulier l’alcoolisme, les troubles érectiles, le tabagisme, le diabète et l’obésité, mais aussi les antécédents d’infertilité dans la fratrie.

L’éjaculation n’est pas synonyme de fertilité  

La plupart des hommes pensent que le fait d’éjaculer est un gage de fécondité mais il peut y avoir d’autres anomalies liées à la qualité, à la quantité et à la mobilité des spermatozoïdes qui entrent en jeu. Les auteurs de l’étude susmentionnée révèlent que l’éjaculation normale pousse les hommes à ignorer les suivis cliniques. Ainsi, dans les couples, les conjoints qui avaient un éjaculat normal se disent qu’ils exécutent correctement l’acte sexuel et se dédouanent qu’ils ne sont pas à l’origine de l’infertilité du couple. Dans ce cas, la femme est directement visée dans la mesure où ils refusent même de les accompagner en consultation.

Cela étant, le diagnostic établit montre des anomalies retrouvées au niveau du spermogramme. Ce sont plutôt des anomalies plus qualitatives que quantitatives. Ce sont notamment la leucospermie (présence anormale des globules blancs), l’asthénozoospermie (une diminution ou une absence de la mobilité des spermatozoïdes), l’oligozoospermie modérée (une concentration insuffisante de spermatozoïdes dans un éjaculat), l’azoospermie (absence totale de spermatozoïdes dans leur sperme) et l’hypospermie. Les auteurs recommandent une étude d’envergure nationale pour mieux appréhender ce problème.

Ils méritent notre soutien

Il ne faut pas confondre l’infertilité et la stérilité qui est l’incapacité totale d’un couple d’avoir un enfant. Les Burundais ont la mauvaise habitude d’accompagner un bonjour par des questions du genre les enfants vont très bien ?

Les moins éduqués n’hésitent pas à demander le nombre d’enfants à quelqu’un qui attend impatiemment les tous premiers signes d’une grossesse. Comme le monde est cruel ! Cela joue sur la psychologie des futurs parents qui demeurent dans la résignation et la culpabilité. L’infertilité masculine est un phénomène banalisé par notre société. Elle existe bel et bien mais la bonne nouvelle est qu’il y a des traitements spécifiques pour cette affection. En témoigne, le nombre croissant de cliniques qui se spécialisent dans ce domaine. Le mieux serait d’encourager les patients à fréquenter ces structures spécialisées pour établir un diagnostic quitte à suivre une thérapie.

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A propos de l'auteur

Benjamin Kuriyo.

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