Genre

La scolarisation de la femme laisse à désirer

Sous le thème «la scolarisation de la fille burundaise : une conquête inachevée», l’association African Gender Promotion Initiative (AGPI) a lancé officiellement ses activités mercredi le 14 avril 2021 au CELAB dans les enceintes de l’Université du Burundi. Pour cette organisation, le combat pour la scolarisation de la fille n’est pas encore gagné

Au Burundi, l’effectif des filles scolarisées reste très inférieur à celui des garçons malgré certaines avancées. « De façon général, le nombre de filles décroit à mesure que l’on avance dans les grades scolaires », regrette Mme Bélyse Akimana, vice-présidente de l’AGPI et oratrice du jour. Sous une critique équilibrée, elle se propose de montrer à base de chiffres les avancées, mais relève tout de même des défis au niveau de l’éducation de la fille au Burundi comme dans la sous-région. « Avec le temps et malgré les difficultés, les femmes ont investi le champ académique », affirme-t-elle.

Citant le dernier rapport mondial de suivi sur l’Education Pour Tous de 2015 sur 17 pays d’Afrique subsaharienne, elle rappelle que le Burundi fait partie des pays ayant réussi à atteindre la parité à l’école primaire. Pour elle, il se remarque une nette progression qu’elle juge mitigée si elle est analysée sur base de la représentativité basée sur le genre.

Belyse Akimana, vice-présidente de l’AGPI (à gauche) : « L’accès inégal à l’éducation entre les filles et les garçons est une façon de condamner nos sociétés au sous-développement ».

L’éducation burundaise dominée par le genre masculin

Le nombre des filles est plus élevé à l’école fondamentale, alors qu’il décroit fortement tout au long du parcours scolaire.  Les chiffres sont plus illustratifs. En effet, le nombre de filles inscrites au fondamental durant les années scolaires 2014-2015 et 2015-2016 dépasse respectivement celui des garçons de 27. 275 et de 30. 308. Paradoxalement, la tendance est inversée au post fondamental pour les mêmes années scolaires. A ce niveau, le nombre de garçons dépasse celui des filles de 6028 pendant l’année scolaire 2014-2015 alors que cette différence sera portée à 2 815 pendant l’année académique qui a suivi.

Suivant le même rythme, le filtre sera plus étroit pour l’enseignement supérieur. En 2016, 9 339 sur 26 635 garçons candidats, soit 35% ont réussi à l’Examen d’Etat contre seulement 5 816 sur 20 446 filles candidates soit 28,4% qui ont passé cet examen avec succès. Le constat amer est que la majorité des filles ayant réussi à l’examen d’Etat ne sont pas inscrites dans les universités. Le rapport genre des étudiants enregistrés à l’enseignement supérieur pour l’année académique 2017-2018 le témoigne.  En effet, seulement 38% des filles qui ont réussi à l’Examen d’Etat se feront inscrire dans les registres de l’Université. Pour le troisième cycle, cet écart devient phénoménal. Akimana a cité les statistiques du Rectorat de l’Université du Burundi qui montre que l’Ecole doctorale comptait 71 hommes contre 10 femmes pour l’année académique 2019-2020.

Les inégalités de genres dans le milieu scolaire n’est pas le fruit du hasard

Les orateurs du jour ont fait référence à l’histoire de l’éducation au Burundi pour expliquer cette sorte d’exclusion de la femme Burundaise du milieu scolaire. L’éducation a été davantage l’œuvre des colonisateurs, mais surtout des missionnaires.  Pour Akimana, l’éducation burundaise apparaissait au départ comme un système à deux voies différentes sans rapprochement possible.  “ D’un côté, on avait un enseignement informel de masse –“Yaga Mukama”–, ouvert aux jeunes et adultes désireux de recevoir le baptême. Ensuite, il y avait un enseignement formel, mais inégalitaire parce que coûteux », explique-t-elle avant de souligner que les filles étaient nombreuses dans l’enseignement informel et presqu’absentes dans le formel.

Les mentalités liées à la culture burundaise sont aussi pointées du doigt. Selon Mme Akimana, la scolarisation a été toujours pensée comme étant exclusivement destinée aux garçons. « L’éducation, prise dans son sens de scolarisation, a toujours été pensée comme un domaine d’exclusivité masculine  », mentionne-t-elle avant d’ajouter que les jeunes filles étaient destinées à accomplir efficacement leurs rôles d’épouse, de gardienne de foyer et des traditions.

Joseph Mujiji, activiste engagé dans la lutte pour l’inclusion du genre va plus loin. « La culture de la parole arrache la dignité à la femme qu’elle réduit parfois à un simple matériel », dit-il. Pour cet homme qui critique certaines considérations abaissantes envers les filles, l’égalité entre les femmes et les hommes est impossible tant que nous vivons toujours le contraire au niveau des familles.   

Alors que Mme Akimana affirme que l’accès inégal à l’éducation entre les filles et les garçons est une façon de condamner nos sociétés au sous-développement, Joseph Mujiji, activiste engagé dans la lutte pour l’inclusion du genre considère qu’il est impossible de parler des droits humains sans parler de l’éducation. 

A propos de l'auteur

Jonathan Ndikumana.

Le contenu des commentaires ne doit pas contrevenir aux lois et réglementations en vigueur.
La rédaction se réserve le droit de ne pas publier les commentaires enfreignant ces règles et les règles de bonne conduite.

éditorial

Un environnement des affaires peu attractif

Un environnement des affaires peu attractif

A l’instar des autres pays, le Burundi se lance dans le redressement de son économie pour améliorer les conditions de vie des populations et réduire les inégalités sociales. Ainsi, « le pays s’est engagé sur la voie de la transformation économique de manière à augmenter et diversifier la production sans entraver l’équilibre écologique », a déclaré le président de la République Evariste Ndayishimiye lors du sommet des chefs des Etats tenu à Nairobi le mois précédents. La campagne de lutte contre la pauvreté pour aspirer à la prospérité partagée et un développement durable se heurte à des défis de taille. Même si le gouvernement s’est donné un pari de l’émergence endéans 16 ans, à travers sa nouvelle « Vision d’un Burundi Emergent en 2040 et Développé en 2060 », l’économie nationale est plus que jamais exposée aux chocs extérieures.

    Abonnez-vous à notre bulletin

    Journal n° 607

    Dossiers Pédagogiques

    Facebook

  • éditorial

    Un environnement des affaires peu attractif

    Un environnement des affaires peu attractif

    A l’instar des autres pays, le Burundi se lance dans le redressement de son économie pour améliorer les conditions de vie des populations et réduire les inégalités sociales. Ainsi, « le pays s’est engagé sur la voie de la transformation économique de manière à augmenter et diversifier la production sans entraver l’équilibre écologique », a déclaré le président de la République Evariste Ndayishimiye lors du sommet des chefs des Etats tenu à Nairobi le mois précédents. La campagne de lutte contre la pauvreté pour aspirer à la prospérité partagée et un développement durable se heurte à des défis de taille. Même si le gouvernement s’est donné un pari de l’émergence endéans 16 ans, à travers sa nouvelle « Vision d’un Burundi Emergent en 2040 et Développé en 2060 », l’économie nationale est plus que jamais exposée aux chocs extérieures.
  • Journal n° 607

  • Dossiers Pédagogiques