Edition Spéciale

Inflation galopante : Le pouvoir d’achat des ménages s’érode

L’étau se resserre autour des consommateurs. La hausse généralisée des biens de consommation et des services affecte notre vécu quotidien. D’une part, les ménages peinent à subvenir aux besoins primaires. Et d’autre part, l’économie en pâtit. La rédaction se penche sur les causes profondes de la flambée des prix et leurs incidences sur les conditions de vie des ménages. Analyse   

Le taux d’inflation annuel s’établit à 12,6% en juin 2022. Cette inflation est due principalement aux prix des produits alimentaires  qui enregistrent une hausse de 15,1%. Cet indicateur macroéconomique se répercute sur les conditions de vie de ménages. La cherté des denrées alimentaires impose le style de vie. 

Les consommateurs s’adaptent tant bien que mal. Un kilo de Ndagalas séchés frôle les 70 000 FBu. L’acheteur va se passer de cette manne du lac Tanganyika pour ne se contenter que du haricot. Il préfèrera acheter plus de 10 kilos de haricot, 10 kilos de riz, un flacon d’huile de palme et quelques oignons pour survivre quelques jours. De même, s’il vient pour acheter du riz importé il se retrouve avec une faible quantité de provisions. Il achètera seulement 20 kilos de riz au lieu de 25 kilos. 

Ainsi, son pouvoir d’achat devient de plus en plus faible. Il doit mobiliser d’autres revenus pour survivre. Pour ce faire, les entreprises locales éprouvent d’énormes difficultés à écouler leurs produits, car les consommateurs rationnent les dépenses.

Les résultats d’une récente enquête sur les conditions de vie des ménages montrent que 40,2% des ménages passent toute une journée sans manger par manque d’argent ou d’autres ressources.

 

Les cours des produits importés s’envolent 

L’inflation importée n’est plus à démontrer. Les  prix des articles divers (huiles végétales, le sel, la gamme des produits manufacturés,  augmentent en flèche. La double hausse du prix du carburant, la perturbation des chaînes d’approvisionnement et la dépréciation continue du FBu influent sur les prix des produits importés.  La détérioration continue du BIF et la différence de 80% entre les taux de change officiels et parallèles du BIF entraînent des prix élevés pour les aliments importés. 

La Banque Africaine de Développement (BAD) estime que la pénurie des devises s’est accentuée sur le marché de change en 2021. Ce qui a entraîné une dépréciation de 3% du franc burundais par rapport au dollar américain. Les réserves s’établissent à 296,1 millions USD (décembre 2021); assez de réserves pour couvrir 3,2 mois d’importation.  Cependant, le seuil minimal est fixé à 4,5 mois dans les critères de convergence de la CEA, lit-on dans le rapport de politique monétaire de la Banque centrale.

L’insécurité alimentaire est à craindre ! 

Le rapport de l’OCHA alerte sur les cas d’insécurité alimentaire aiguë. Ce document évoque les aléas climatiques récurrents, l’exiguïté des terres arables comme étant les principales causes de l’insécurité alimentaire aiguë qui sévit dans le pays. Ce dernier fait également face à l’impact de deux autres grands chocs, à savoir : la pandémie de  Covid-19 et la crise en Ukraine.  

Ces chocs affectent fortement les moyens d’existence des populations et impactent également les chaînes d’approvisionnement et les prix des denrées essentielles sur le marché. 

La régulation des prix de certaines denrées alimentaires n’arrive pas à stabiliser les prix pour autant.  «Toute mesure qui entraîne la baisse du pouvoir d’achat des consommateurs est absolument défavorable à l’économie dans son ensemble», a réagi professeur Léonidas Ndayizeye, chercheur et enseignant à l’université du Burundi lors d’une édition spéciale sur le libéralisme économique. D’ailleurs, il est déconseillé aux pouvoirs publics d’intervenir dans la fixation des prix, surtout lorsque les produits ne sont pas stratégiques. Pour lui, l’intervention des pouvoirs publics dans la fixation des prix constitue un frein au libéralisme économique. 

Manger ou tromper la fin?

Les résultats d’une récente enquête sur les conditions de vie des ménages montrent que 40,2% des ménages passent toute la journée sans manger par manque d’argent ou d’autres ressources. Ce qui veut dire que dans l’ensemble des 8490 ménages enquêtés, 40,2%, à un moment donné, un membre du ménage a passé une journée sans manger par manque d’argent ou d’autres ressources, interprète Nicholas Ndayishimiye, directeur général de  l’ISTEEBU.

Ledit rapport a décelé trois chocs récurrents dans notre pays dont la sécheresse ou les pluies irrégulières et les prix élevés des produits alimentaires. La diminution de la production agricole des ménages est due à la sécheresse et/ou aux pluies irrégulières, aux insectes ravageurs et aux maladies des cultures. Les producteurs rapportent également le manque de fertilisants qui persiste depuis le début de cette année. 

Que faire ?

Les perspectives économiques de la Banque Africaine de Développement (BAD)  prédisent déjà des pressions inflationnistes mondiales exacerbées par la guerre russo-ukrainienne. Ce qui augmentera le taux d’inflation jusqu’à 9,3% en 2022.  Les données de l’ISTEEBU montrent que le taux d’inflation actuel dépasse de loin les prévisions. Lors de la présentation de la loi portant fixation du budget général de l’Etat, les députés ont demandé au ministre en charge des finances les mesures concrètes prises pour atténuer les effets de l’inflation. Mais le ministre Domitien Ndihokubwayo a esquivé la question. 

La détaxation des denrées alimentaires importées pourrait atténuer les effets de l’inflation sur les ménages. Pour les salariés, les annales ne constituent que des garde-fous. Le Code du travail stipule que le travailleur devrait percevoir des primes et autres avantages chaque année. «Des annales sont reversées également aux salariés pour atténuer les effets induits par l’inflation». L’augmentation du salaire est automatique à la fin de l’année pour chaque fonctionnaire. Au Burundi, la convention interprofessionnelle de juin 1980 a fixé au minimum les annales à 3%. Malheureusement, cette disposition n’est pas appliquée à l’ensemble des salariés dans tous les secteurs. 

A propos de l'auteur

Benjamin Kuriyo.

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