Commerce

Mairie de Bujumbura : Le vélo, un outil quasi-indissociable du petit commerce

La restructuration du périmètre de circulation des tricycles et des deux roues en mairie de Bujumbura entre en vigueur le 21 mars 2022. Ainsi, les motos, les vélos et les tuk-tuks seront autorisés à circuler uniquement dans les périphéries de cette ville. Par conséquent, ce ne sont pas que les bénéficiaires directs qui en paieront un lourd tribut. Même le petit commerce risque d’en pâtir    

D’une manière directe, cette mesure représente un coup dur pour les conducteurs et les propriétaires de ces engins qui gagnent de l’argent grâce à l’exploitation de ces moyens de transport. On ne peut pas oublier aussi le calvaire qui attend les personnes qui en profitaient pour se rendre au travail, à l’école, à l’université ou pour faire des courses dans différents coins de la ville. Les conséquences se feront sentir également chez les mécaniciens et les commerçants des pièces de rechange.

A part les personnes ci-haut citées qui vont subir des conséquences fâcheuses dues à cette mesure, il y a une autre catégorie de personnes qui ne savent plus sur quel pied danser. Leurs activités vont être paralysées d’une manière ou d’une autre. Il y a notamment les tenanciers des bars, des cafétérias, les boutiquiers, les vendeurs, etc.

Certaines denrées alimentaires arrivent dans les quartiers de la Mairie de Bujumbura à vélo.

Le vélo, au centre du petit commerce

« Aujourd’hui, tout le monde est au courant que la pénurie récurrente des produits Brarudi peine à trouver une solution durable. Avant que ce problème ne survienne, les gestionnaires des dépôts de ces produits nous livraient régulièrement des dizaines de casiers de boissons via leurs charriots. Mais, actuellement, ce n’est plus le cas. Pour remédier à cela, nous sommes obligés de  parcourir différents quartiers dans l’espoir de trouver au moins un dépôt servi. Si jamais une occasion se présente, les courses sont faites par  un vélo transportant  plusieurs casiers à bouteilles vides pour les échanger avec celles remplies de boissons», fait savoir J.N, un tenancier d’un bar à Buyenzi en mairie de Bujumbura. Jusqu’ici, ajoute-t-il, comme la mesure prise par le ministre en charge de la sécurité publique est quasiment irréversible, il ne voit pas une alternative plausible. Il est sûr et certain qu’il ne pourra pas louer un véhicule pour transporter régulièrement ses boissons en vue de redynamiser son business.

Jean Marie Nkunzimana est un jeune résidant également dans la zone de Buyenzi. Depuis qu’il a terminé l’école secondaire dans sa province natale de Gitega, il s’est installé dans la ville de Bujumbura en 2019 pour pratiquer le commerce ambulant. Il vend des habits de seconde main. « Au moins deux fois par semaine, je me rends au marché de Kinindo en commune Muha pour m’approvisionner en friperie. Pour y arriver, je dois payer un taxi-vélo environ 2000 FBu pour un aller-retour », précise M. Nkunzimana. Avec un capital de moins de 100 000 FBu utilisé chaque semaine, il ne voit pas comment prendre régulièrement un taxi-voiture pour se rendre au marché alors que cela lui coûterait entre 10 000 FBu et 15 000 FBu de transport de ses marchandises. Il réalise qu’il ne peut pas s’en sortir. La seule option possible est de marcher à pied. Ce qui n’est toujours pas chose facile sur un trajet d’environ 5 km.

De même pour les femmes qui font le petit commerce des denrées alimentaires périssables (tomates, amarantes…). Pour s’approvisionner dans différents marchés de la ville de Bujumbura, elles prennent généralement les taxi-vélos, les taxis-motos, les tuk-tuks…car le prix du transport par tricycles ou deux roues est relativement abordable par rapport à celui de la location d’un véhicule. Malheureusement, avec cette nouvelle mesure, elles seront obligées de prendre un taxi-voiture (bien qu’il soit cher) ou marcher à pied.

Les cafétérias ne sont pas épargnées

Ce problème de transport est ressenti même au niveau des tenanciers des cafétérias à l’intérieur des quartiers de la municipalité de Bujumbura. «  Mon fournisseur en lait vient de la commune Gihanga en province de Bubanza. Son moyen de transport est le vélo et je suis un parmi une dizaine de ses clients à travers toute la ville », fait savoir N.M, une gérante d’une cafétéria située à la 10ème avenue de la zone Buyenzi. Même si elle n’a pas voulu préciser combien elle paie son fournisseur, elle affirme qu’elle écoule quotidiennement entre 10 et 20 litres de lait et 1800 FBu est le prix unitaire (par litre). Comme le transport par tricycles ou deux roues en mairie de Bujumbura vient d’être restructuré et que le vélo n’est plus éligible de refouler la commune de Mukaza, il est fort probable que le prix du lait va augmenter, car le coût du transport ne restera pas le même.

De même pour les boutiquiers ou les commerçants des denrées alimentaires. Pour renflouer leurs boutiques, dans la plupart des cas, ils font recours au transport de marchandises par vélo. Or, cet outil va être retiré de la circulation. Cela aura sans doute des répercussions sur les prix des différents produits.

L’Ong Parole et Action  pour le Réveil  des Consciences et l’Evolution des Mentalités (PARCEM) lance un cri d’alarme à travers une lettre  adressée au ministre de l’Intérieur, du Développement Communautaire et de la Sécurité Publique le 28 février 2022. Pour PARCEM, cette mesure a des conséquences sur la vie socio-économique du pays et des citoyens. Par exemple, la mobilité des biens et des personnes est un élément fondamental dans le développement économique du pays et le transport joue un rôle important dans le petit commerce et l’approvisionnement en produits vivriers. Elle a proposé la suspension de cette mesure pour mieux analyser ses conséquences et prévoir des alternatives possibles.

A propos de l'auteur

Gilbert Nkurunziza.

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