Education

Une mesure plutôt controversée

Alors que le ministère de l’Education, de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche Scientifique vient d’augmenter les heures de travail dans les écoles secondaires passant de 36 heures par semaine à 40 heures par semaine mais la décision est loin de faire l’unanimité. Les professionnels de ce secteur parlent d’une mesure sans référence légale et demandent au ministère de la revoir

Les élèves de la section lettres modernes (1ère LM) au Lycée Scheppers suivent le dernier cours de la journée.

D’après Frère Joseph Nizeyimana, directeur du lycée Scheppers de Nyakabiga, la grande modification par rapport à l’ancienne organisation de l’horaire, c’est que l’horaire de fin des cours est passée de 13h 5 min à 13h 50 min. C’est-à-dire 8 heures par jour au lieu de 7 heures. Ce qui fait que le nombre d’heures par semaine passe de 36 h à 40h. Frère Nizeyimana explique que les élèves et les enseignants s’habituent de jour en jour au nouveau chronogramme.

Des élèves déconcentrés

Régis Ndihokubwayo, un élève de la 1ère Lettres Modernes au même lycée, décrit l’ambiance qui règne en classe à la dernière heure. Certains élèves ne résistent à la fatigue et à la faim. Ils somnolent et ne suivent pas attentivement le professeur. « Nous nous concentrons sur le contenu de la leçon et les explications du professeur car nous n’avons pas de choix », affirme-t-il. Au contraire, Gloria Cynthia Gatore, élève à la même école indique que les 4 heures supplémentaires sont bénéfiques aux apprenants. Elle est persuadée que cela permettra d’écouler les programmes de cours à temps. Et de signaler qu’il appartient aux élèves de s’adapter à ce nouveau rythme. Par ailleurs, elle reconnait que les débuts sont toujours difficiles, mais que des progrès sont déjà enregistrés.

Que faire pour dispenser la dernière leçon ?

M. Rémy Nsengiyumva, enseignant au lycée Scheppers de Nyakabiga parle des stratégies envisagées pour enseigner les 45 dernières minutes de la journée. Certes, la dernière heure est fatiguante, mais on essaie de garder la tête au-dessus de l’eau. « Si je constate que les élèves ne suivent pas et qu’ils ne se concentrent plus sur ce que j’enseigne, je change de sujet en lançant une blague ou une anecdote pour les éveiller. Et, par après, je continue avec la leçon », précise-t-il.

Pour lui, la dernière heure qui a été ajouté à l’horaire présente des avantages et des inconvénients. D’une part, une augmentation de 4 heures par semaine va nous permettre de terminer les programmes à temps, mais aussi le temps supplémentaire va nous permettre de renforcer les leçons apprises précédemment en revenant sur les notions non assimilées par les apprenants. Et, d’autre part, à la dernière heure les élèves sont très fatigués. Ce qui bloque le transfert des connaissances. Une enseignante qui a requis l’anonymat se lamente qu’à la dernière heure les élèves sont très fatigués et que la capacité d’attention diminue. Donc on doit redoubler des efforts à la fois pour expliquer et attirer l’attention des apprenants. Certains élèves, selon la valeur du cours, ratent des séances entières. Et cela influe sur le rendement scolaire, conclut-il.

« Cette décision aggrave la situation en ce sens que les élèves passent beaucoup de temps en classe et n’ont pas assez de temps pour réviser les leçons. Ceci influe sur le rendement des apprenants », s’indigne un parent qui a requis l’anonymat. Et d’ajouter que les élèves ont besoin d’un repos pour mieux réviser les cours. Sinon ils risquent de développer des maladies liées au surmenage.

Une décision sans référence légale

D’après Emmanuel Mashandari, président du syndicat CONAPES (Conseil National du Personnel de l’Enseignement Secondaire), cette décision constitue une grande surprise dans la mesure où elle a été prise sans concertation de toutes les parties prenantes. De plus, le nouvel horaire n’a aucune procédure légale. L’UNESCO recommande que le nombre d’heures de travail demandé aux enseignants, par jour et par semaine, doit être fixé en consultation avec les organisations d’enseignants. « En principe cette décision devrait faire objet d’une ordonnance ministérielle. Ce qui n’est malheureusement pas le cas », indique M. Mashandari.

Par conséquent, les directeurs des écoles appliquent différemment cette mesure. Pendant que dans certaines écoles la classe se ferme à 14h 30 avec deux pauses, dans d’autres écoles, on la ferme à 13h 55min et d’autres ont gardé l’ancien programme où on ferme la classe à 13h 05 min. Selon des sources concordantes dans certaines écoles, l’heure de cours passe de 45min à 50min et l’horaire hebdomadaire passe de 36h à 40h, précise M. Mashandari.

Passer de 24 h à 26h par semaine

Ce changement est intervenu après le redéploiement des enseignants qui a dépouillé certaines écoles d’enseignants. Or, parmi les critères choisis pour réaffecter les enseignants figuraient aussi le nombre d’heures prestées par semaine. Les enseignants qui sont restés doivent avoir un horaire de 24h par semaine. Ainsi après le départ des enseignants, ceux qui dispensent certains cours ont vu leur horaire hebdomadaire grimper passant de 24h à 26h, des fois à 28h, affirme M. Mashandari.

Ce syndicaliste demande au ministère de tutelle d’inviter toutes les parties prenantes pour trouver des solutions durables à cette problématique. Et de rappeler que dans le passé le ministère en charge de l’éducation avait le projet de changer l’horaire hebdomadaire à l’école primaire. Mais le projet a été couronné de succès, car il y a eu la création préalable d’une commission mixte pour étudier le cas.

4761 enseignants ont été redéployés pendant l’année scolaire 2017-2018. Toutefois des grognes persistent chez certains enseignants réaffectés. Ils disent que les critères pris en compte ne sont pas clairs et que les cas sociaux n’ont pas été considérés.

A propos de l'auteur

Benjamin Kuriyo.

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