Commerce

Prix de l’électricité : Les consommateurs anticipent

Après l’annonce de la hausse du prix de l’électricité par le ministère de l’Energie et des Mines pour la fin août,
l’Association Burundaise des Consommateurs (ABUCO) estime que cela va impacter non seulement le consommateur et les producteurs, mais aussi l’économie du pays, or on sait déjà que le taux d’inflation a doublé: 6% en 2016, 12,7% pour le 1er semestre 2017 (Source : ISTEEBU).

Le ministre de l’Energie et des Mines  avait annoncé en date du 31 juillet une future augmentation prochaine du prix de l’électricité de 0, 20 USD par kwh. Abondant dans le même sens, Donat Niyonzima, directeur général de l’Agence de Régulation des secteurs de l’Eau potable, de l’Electricité et des Mines (AREEM), a indiqué que les nouveaux tarifs seront appliqués lorsque la question du déficit sera résolue, c’est-à-dire à la fin du mois d’août où il est estimé que le projet de production de l’énergie électrique de 30 MW par la société Interpétrol aura abouti. Il certifie que 0, 20 USD n’est que le coût unitaire moyen pondéré pour l’ensemble du secteur de l’énergie. Cependant, les consommateurs restent sur leur soif et sont très inquiets.

Une révision inopportune

Noël Nkurunziza, président de l’ABUCO : « Si on revoit à la hausse le prix de l’énergie qui est un facteur de production pour toutes les unités de
production du secteur économique, il y aura un coût additionnel et donc plus d’inflation »

«  La nouvelle concernant la révision en hausse des tarifs de l’électricité envisagée est une information surprenante. Les tarifs en cours (rehaussés en 2012) étaient issus de longues discussions entre les acteurs de la société civile dont l’ABUCO et le ministère de l’Energie et des Mines», précise Noël Nkurunziza, président de l’ABUCO et représentant de la section nationale d’International Transparency Burundi. Il informe que la motivation pour le ministère de l’Energie et des Mines d’augmenter ces prix était de stimuler le secteur privé pour qu’il puisse non seulement entrer dans la production de l’énergie, mais aussi dans l’objectif de mettre de l’énergie à la disposition aussi bien des ménages que de l’industrie et des services.  M.Nkurunziza témoigne qu’avec les discussions, la priorité était d’abord d’auditer la Regideso qui collecte les fonds et ensuite de la réorganiser. Cela afin que le consommateur ne puisse pas financer un trou qui serait lié à une mauvaise gouvernance au sein de cette institution. « D’ailleurs à l’heure où je vous parle, l’audit n’a pas encore été organisé. Et s’il a été organisé, les résultats n’ont pas été publiés officiellement et n’ont pas donné les améliorations qui peuvent rassurer le consommateur », signale-t-il. Par ailleurs, toujours selon lui, le constat est que depuis la dernière hausse du prix de l’électricité (en 2012), le secteur privé n’est pas entré dans le secteur de la production de l’énergie. « La révision qui entre donc dans l’objectif de rendre attractif le secteur sans toutefois qu’on ait évalué la dernière hausse pourrait générer le même risque. C’est-à-dire d’ici quatre ans, cinq ans ou six ans, on va revoir encore une fois les tarifs de l’électricité avec le même slogan : rendre le secteur attractif », s’inquiète-t-il. Quant à la comparaison avec le taux moyen du prix de l’électricité qui reste très faible dans la Communauté Est Africaine, M.Nkurunziza fait savoir qu’il ne faut pas considérer le seul paramètre du coût de l’énergie. Il invite d’aller plus en détail et d’inclure le coût de la vie par habitant au Burundi pour le comparer à ceux des autres pays voisins.

La hausse du prix de l’électricité risque d’affecter une grande majorité des consommateurs et l’économie nationale

Noël Nkurunziza estime que la hausse du prix de l’électricité, une fois qu’elle aura eu lieu, sera profitable pour la société qui va collecter les fonds (Regideso) uniquement. Selon lui, il y aura des consommateurs qui vont abandonner carrément l’utilisation de l’énergie électrique, car ils ne vont pas supporter la facture. Pourtant M.Nkurunziza considère l’énergie comme un besoin fondamental. De plus, reconnait-il, toutes les conséquences vont s’abattre sur le dos et la tête du consommateur. Il justifie cela par le fait que si on revoit à la hausse l’énergie qui est un facteur de production pour toutes les unités de production du secteur économique, il y aura un coût additionnel à la production. « Quand il y a un coût additionnel à la production, l’industriel, l’artisan ou le manufacturier vont augmenter proportionnellement les prix parce que la tendance sera de revoir les prix de leurs produits et services. Ce qui aura des conséquences néfastes sur le consommateur, qui, aujourd’hui, souffre beaucoup de l’augmentation du coût de la vie », martèle-t-il. M. Nkurunziza souligne également que les producteurs ne vont plus écouler leurs marchandises comme avant. « Sûrement qu’il y a ceux qui vont prendre d’autres mesures économiques tendant, par exemple, à réduire le personnel », déplore-t-il. D’autres vont abandonner le secteur. Ce qui va se retourner contre le décideur, car les impôts et taxes vont diminuer. Et de continuer : « Ce qui constitue un cercle vicieux qui va partir de la hausse des prix vers la décadence de la vie du consommateur » avant d’ajouter que cela va affecter l’économie nationale. M .Nkurunziza rappelle qu’on rehausse les prix pour des raisons qui servent et le consommateur et le producteur. C’est pourquoi il avise que généralement de telles situations devraient être discutées entre une commission équilibrée composée d’un représentant des décideurs, de celui des exploitants de l’énergie, de celui de la Regideso, de celui des industriels ainsi que de celui des consommateurs. Chose qui n’a pas été faite. D’où il lance un appel à l’ensemble des décideurs en général : avant de prendre des décisions qui concernent les consommateurs, ceux-ci doivent être consultés et leur avis pris en compte, comme c’est reconnu au niveau des principes directeurs des Nations Unies pour la catégorie des consommateurs. Aux décideurs burundais de tenir en considération le rôle du consommateur, surtout que son droit est reconnu dans le code du commerce. Il conclut en demandant aux représentants du peuple et au gouvernement d’analyser de près la situation économique et financière du pays et de ses populations avant de procéder à toute augmentation du prix de l’énergie, qui est une source vitale de la vie et de l’activité économique.

A propos de l'auteur

Mélance Maniragaba.

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