Cooperation

La dette des pays africains envers la Chine explose

Depuis 2000, l’encours de la dette des pays africains envers la République Populaire de Chine s’élève à 170,1 milliards USD. Les grandes économies africaines figurent parmi les pays les plus endettés. Le Burundi doit à la Chine plus de 158 millions USD orientés vers la télécommunication et la coopération économique. Analyse.

Parmi les fonds prêtés par la Chine au Burundi, 31,5 millions USD étaient prévus pour acheter un avion MA60

Selon les données recueillies par le Centre de Recherche de l’Université de Boston (Etats-Unis) Global Development Policy Center, les pays africains ont affiché un dynamisme de contracter des prêts auprès de la Chine entre 2000 et 2022. La quasi-totalité des pays africains sont bénéficiaires des prêts chinois qui culminent à 170,1 milliards USD.

L’Angola vient en tête des créanciers de la Chine avec 45 milliards USD. Il est suivi par l’Ethiopie et la Zambie qui totalisent respectivement 14,1 milliards USD et 9,1 milliards USD de prêts.

Quid des pays de l’Afrique de l’Est ?

Parmi les pays de l’East African Community (EAC), c’est le Kenya qui occupe la première position, car il a emprunté à la Chine 9,7 milliards USD suivi par l’Ouganda avec 3,7 milliards USD. En troisième lieu vient la Tanzanie qui a emprunté à la Chine 2,4 milliards USD. Elle est suivie par la République Démocratique du Congo (RDC) qui doit à la Chine  2,3 milliards USD.

En bas du classement figurent le Rwanda, le Soudan du Sud et le Burundi qui ont emprunté respectivement à la Chine 659,7 millions USD, 406,8 millions USD et 158,2 millions USD.

Une dette orientée vers les TIC

Selon cette étude, le Burundi a contracté à la Chine 9 prêts qui totalisent 158,2 millions USD entre 2008 et 2017. Le pays a contacté des crédits en grande partie auprès de l’Agence chinoise de coopération internationale pour le développement (CIDCA) et de la banque Export-Import Bank of China (CHEXIM).

Trois prêts ont été canalisés dans le domaine des Technologies de l’Information et de la Communication (TIC) avec une enveloppe de 77,6 millions USD. Quant à l’affectation de ces fonds, 15 millions USD accordés par la banque CHEXIM ont été utilisés pour mettre en place 220 km de fibre optique dans le réseau Telecom de Bujumbura en 2014. Trois ans après, le pays relance le processus de numérisation. Ainsi, le gouvernement du Burundi a contracté un crédit de 32,6 millions USD auprès de la banque chinoise EXPORT-IMPORT BANK. Le remboursement de ce crédit s’effectuera sur une période de 25 ans, au taux d’intérêt de 2% avec 5 ans de période de grâce. Jusqu’à présent, le projet n’a pas abouti.

Les fonds empruntés par le Burundi à la Chine
Année Domaine d’intervention Montant en millions USD
2008 Transport 2,9
2009 Inconnu 7,3
2011 Inconnu 31
2012 Inconnu 7,9
2013 Transport 31,5
2014 TIC 15
2017 TIC 62,6
Total 158,2

 

Une dette odieuse

En 2017, La société nationale des télécoms a démarré le projet d’extension et de modernisation de son réseau mobile Onamob. Il s’agit de remplacer toutes les antennes par d’autres antennes de troisième et quatrième génération (3G et 4G) avec l’appui technique du géant chinois des télécoms Huawei Technologies Co., Ltd.  Le nombre d’antennes relais devait passer de 51 à 150. Selon les prévisions, l’accroissement du nombre d’antennes devrait améliorer la qualité des prestations.

Ainsi, le gouvernement a reçu un prêt de 30 millions USD de la part d’Exim-bank pour que l’Onatel puisse évoluer au même titre que les autres compagnies de télécoms. La durée de remboursement de la dette est de 10 ans et la période de grâce est de trois ans. Paradoxalement, la crise financière s’éternise et l’Onatel ne reste que l’ombre d’elle-même.

Parlant toujours de l’encours de la dette envers la Chine, le Burundi a contracté quatre prêts qui totalisent 46,2 millions USD entre 2009 et 2012. Cependant, ces fonds ont été canalisés dans des domaines non spécifiés sous le label de coopération économique et technique.

Quid du remboursement des montants dus ?

En décembre dernier, lors de l’analyse du projet de révision de la loi régissant la gestion de la dette publique, les députés ont dénoncé la mauvaise gestion des dettes rétrocédées aux institutions spécialisées. Ils ont donné l’exemple du projet de création de la Société Nationale de Télédiffusion Numérique du Burundi (STNB )pour la numérisation de la RTNB ou encore de l’Onatel qui est au bord de la faillite. Certains députés enfoncent le clou et incriminent les gestionnaires des sociétés publiques qui détournent l’objet du crédit. Pour eux, ces fonds finissent dans les poches de quelques individus et le fardeau du remboursement retombe sur l’ensemble de la population, fustigent-ils.

Sur le continent, il importe de signaler que les montants des prêts de la base de données sur les emprunts africains à la Chine ne correspondent pas à la dette des gouvernements africains. Cela est dû au fait que cette base de données suit les engagements et non les remboursements, les décaissements ou les défauts de paiement. Les experts alertent sur la dépendance financière vis-à-vis de la Chine.  Même si la Chine n’est pas la cause première de la crise de la dette en Afrique, le manque de transparence, l’impact de ses contrats sur les industries locales et l’absence d’options de restructuration collective dans leurs clauses suscitent de nombreuses inquiétudes.

 

Gilbert Nkurunziza et Benjamin Kuriyo
A propos de l'auteur

Gilbert Nkurunziza.

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