Environnement

Muha : Des roses et des épines dans la collecte des déchets au niveau des ménages

Un ménage de la commune Muha doit payer un montant qui  varie entre 1500 FBu et 12 000 FBu  pour l’enlèvement des déchets. L’administration locale et les sociétés de collecte des dechets  font savoir que  les  prix  sont fixés en fonction de situation socio-économique du quartier. Cette activité connait des roses et des épines   ( Reportage)

Magnus Niyokindi, Chef de zone Musaga :«la société de collecte des déchets   en collaboration avec l’administration locale négocient avec  les résidents du quartier pour fixer le montant  que chaque ménage doit payer  par mois».

 

Nous sommes mardi le 2 avril 2024. Vers 11h et en pleine «Campagne zéro déchets» lancée par  la Première dame  Angeline Ndayishimiye, le 19 mars 2024, un journaliste de Burundi Eco  sillonne les différents quartiers de la commune urbaine de Muha. Cela pour se rendre de l’état des  lieux de l’assainissement dans les ménages de cette commune localisée au Sud de la municipalité de Bujumbura   et les relations  entre  les associations et sociétés  privées  de collecte des déchets. Notre parcours commence au quartier Gasekebuye de la zone Musaga non loin du pont Muha  qui sépare la commune Muha de la commune Mukaza. C’est un quartier propre et viabilisé. Difficile est de rencontrer un  résident  de ce quartier qui marche à pied.  C’est un quartier des VIP.  Bref, un milieu calme.  Par chance, nous  rencontrons  Pascal Bucumi, un habitant de ce quartier assis devant un des salons VIP plus populaires du quartier .

Gasebuye : un montant de 12 000 FBu fait froid au dos à certains résidents «Actuellement, nous payons 12 000FBu par mois. C’est une grosse somme.  Les mois derniers, on payait 10 000 FBu mais, très  récemment, la  société chargée de collecter les déchets dans ce quartier  a ajouté  2000FBu», fait savoir Monsieur  Bucumi en pointant son index sur  l’agence de  la société Gira Isuku Company (Gicom) qui se trouve  à quelques mètres. «Malgré cela, il   s’observe toujours des retards dans la  collecte des déchets au niveau des ménages pour aller les déposer dans les dépotoirs préparés  à cette fin », ajoute-t-il.

Il Indique qu’en cas de retards accumilés dans la collecte des déchets , les résidents s’arrangent en payant   un évacuateur ambulant  une somme oscillant entre 1000 FBu et 2000 Fbu par jour pour l’enlèvement des dechets  déchets  dans leurs ménages. Pourtant, notre ressource raconte qu’actuellement  avec la campagne de 100 jours de salubrité lancée par le Président de la République, cette pratique ne s’observe plus pendant la journée, car l’administration locale guette la moindre inattention des foyers qui ne respectent pas les normes d’hygiène. Ainsi, seuls les évacuateurs ambulants récalcitrants  profitent la nuit pour collecter les sacs des déchets au sein des ménages.

Et si la mairie de Bujumbura s’occupait de la gestion des dechets dans des ménages ?

Selon Bucumi, la collecte des déchets  devrait être effectuée par   la municipalité de Bujumbura  et non les associations et les sociétés privées. « En confiant l’assainissement aux associations et sociétés privées, , l’Etat perd deux fois : Premièrement, le service devient cher et par conséquent devient un fardot  pour sa population. Deuxièmement, l’impôt  que nous payons devrait  entrer dans le trésor public  et  la municipalité   de Bujumbura  pourrait embaucher des chômeurs pour oeuvrer dans ce secteur », commente-t-il.

Pourtant, dans la zone Musaga  de la  commune Muha, les prix diffèrent d’un quartier à l’autre voire d’un ménage à l’autre.Claire Nibogora, une dame rencontrée dans la périphérie du quartier Gasekebuye  tout près de   l’Ecole Nouveau Rayonnement (ENR) fait savoir  qu’elle paie 7000 FBu. A la question de savoir si la société qui s’occupe de la salubrité de ce quartier respecte les contrats signés, elle indique qu’elle est aussi irrégulière dans la collecte des déchets. « Ils peuvent s’absenter un mois ou deux mais, moi, je m’en fiche, car je dispose d’un jardin  tout autour de ma maison. Je mets dans un silo tous les déchets biodégradables et cela me sert du fumier pour fertiliser me jardin,  ce qui m’aide à avoir des légumes frais des maniocs ou des amarantes pour nourrir mes enfants », répond-t-elle.

L’enlèvement  des déchets dans les quartiers  non viabilisés, un casse-tête

Si les ménages des quartiers viabilisés se lamentent de la cherté du service de collecte des déchets, les ménages des quartiers non viabilisés ont du mal à  transporter les déchets  vers un lieu où les camions  des sociétés chargées de collecter ces déchets débarquent. Les  domestiques sont obligés de transporter les sacs de déchets sur la tête.  «L’assainissement  de ce quartier est très compliqué,  nous n’avons  aucun axe à la route  où les camions peuvent débarquer. C’est qui fait l’abonné aux associations ou sociétés privées paie deux  fois : un évacuateur ambulant pour les acheminer les déchets  vers le lieu de débarquement du camion et la société en soi»,se lamente une jeune dame   résidant à  Musaga .  Elle indique cependant que  peu de ménages  sont abonnés aux  sociétés de collecte des déchets, car elles utilisent ses déchets dans l’agriculture.

Les riverains de la rivière Kanyosha  profitent la nuit pour jeter les ordures dans cette rivière .

«Ce qui  m’étonne est que dans les fouilles-perequisitions effectuées par   les agents de sécurité,    on nous demande si nous avons acquitté les frais de collecte des déchets,  alors que la société en soi ne nous  a rendu aucun service. C’est comme si l’abonnement était obligatoire », confie -t- elle.

Les frais de  collecte des déchets  dans ce quartier non viabilisé  diffèrent de ceux des quartiers viabilisés .  Le prix de ce service varie entre 1500 et 3000 FBu par mois, selon nos sources.

Quid des critères considerés  pour fixer le prix de l’enlèvement des déchets dans un quartier ?

«C’est la municipalité  de Bujumbura  qui donne l’autorisation aux associations et sociétés privées de collecter les déchets au niveau des ménages. Et la société  en collaboration avec l’administration locale négocient avec  les résidents du quartier pour fixer le montant  que chaque ménage doit payer  par mois», indique  Magnus Niyokindi , le Chef de zone Musaga .  Il fait savoir  que   certains quartiers  sont habités par des  VIP  qui  génèrent beaucoup d’ordures, alors que d’autres sont habités par des ménages   modestes qui produisent peu d’ordures.

Parmi, les mécanismes envisagés  pour améliorer la salubrité dans cette zone figurent  la sensibilisation de  tous les ménages à signer des contrats avec les sociétés de collecte des déchets et l’imposition d’une amende aux ménages récalcitrants.

Cependant, M. Niyokindi, ne passe pas sous le silence  défis qui  se manifestent lors de la collecte des déchets, notamment le manque de carburant pour les camions des sociétés en chargées de collecter les déchets. Ce qui provoque des retards.

«Les camions de ces sociétés consomment le mazout. La pénurie recurrente des carburants affecte tout le monde, les sociétés de collecte des déchets  ne sont pas épargnées, d’où les lamentations de certains habitants de la zone»,dit-il

La collecte des déchets dans la zone Kanyosha , encore du pain sur la planche

Les défis de la collecte des déchets au niveau des ménages sont presque les mêmes  pour toutes les zones de la commune Muha. Il s’agit entre autres de  la non uniformisation  du prix de collecte des déchets, de  l’absence ou des retards accumilés par l’association ou la société qui s’occupe de la collecte de déchets dans les foyers, mais aussi des récalcitrants qui ne veulent pas adhérer aux normes.

Ainsi, dans la zone Kanyosha, des ordures  s’observent tout le long de la rivière Kanyosha .Les habitants du  quartier  Musama  qui ont réagi au micros du journal Burundi Eco font savoir  que  ce sont des déchets  déposés  par des évacuateurs ambulants   pendant la nuit.

A noter aussi que dans cette zone, les frais  de collecte des déchets par ménages varient entre 2000 FBu et 10000 FBu  en fonction de la situation socio- économique du quartier.

Le non -respect des contrats figure  parmi les défis

Contacté pour  donner son avis sur  les relations entre les ménages et les sociétés de collecte des déchets, Ferdinand Nkamicanye, représentant légal de Gicom,    n’a pas voulu s’exprimer  sur cette question de l’inégalité de frais de collecte des déchets. Pourtant, il indique que la mission de Gicom est   de résoudre le problème de salubrité dans les  foyers et que même les pauvres reçoivent un service gratuit.

Il fait savoir que son organisation collabore avec les ménages et l’administration locale pour accompagner l’Etat dans  son objectif d’enlever les déchets  dans la ville  de Bujumbura.

Nonobstant,  sa société se heurte à différents obstacles dans l’accomplissement de sa mission, notamment  le manque de carburant, le non respect des contrats signés avec les ménages et les dépotoirs qui sont presque  saturés.

A propos de l'auteur

Méchaël Tuyubahe.

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