Santé

Prioriser l’éducation des filles pour promouvoir la santé sexuelle

Les responsables de la Politique Nationale de la Santé de la Reproduction (PNSR) estiment que sensibiliser les leaders religieux, promouvoir le dialogue familial et surtout prioriser l’éducation des filles incitera à la sensibilité sur la santé sexuelle et reproductive. Ils considèrent celle-ci comme un tabou assimilé également à l’hypocrisie qu’il faut briser

Dr Ananie Ndacayisaba, directeur du PNSR : « L’usage des méthodes contraceptives modernes est une décision partagée du couple et nécessite l’éclairage d’un médecin ».

Selon Dr Ananie Ndacayisaba, directeur du PNSR et expert en santé reproductive, la situation démographique du pays se caractérise par une extrême jeunesse de la population. Cela a été dit lors d’un atelier d’échange et de réflexion sur la santé sexuelle et reproductive organisé par Yaga et PNSR sous financement de l’ambassade des Pays-Bas au Burundi ce jeudi et vendredi 28 et 29 mars 2024 à Bujumbura. Cela à l’endroit d’une quarantaine de journalistes.

Il rappelle que les statistiques du Recensement Général de la Population et de l’Habitat de 2008 signalent que les adolescents de moins de 15 ans représentent 46% de la population.

Deux tiers de toute la population, c’est-à-dire, 65,7% ont moins de 25 ans dont les jeunes de 10 à 24 ans représentent la moitié et un tiers de toute la population, soit 33,9%, martèle Dr Ndacayisaba.

Toutefois, reconnait-il, la démographie n’est pas un problème en soi, mais plutôt c’est l’exiguïté des terres qui cause des problèmes. D’où on se retrouve face à une situation de faire recours à la planification familiale. Cela pour dire qu’on doit limiter des naissances, les espacer, fixer le nombre d’enfants qu’on désire avoir, faire recours aux méthodes contraceptives préférées.

Briser le tabou

Dr Ndacayisaba déplore que des rumeurs circulent sur les effets secondaires possibles lors de l’usage des méthodes contraceptives modernes. Ce qui occasionne une réticence de leur adoption.

Malgré cela, il reconnait que l’usage des méthodes contraceptives modernes ne constitue pas un tabou chez les gens éduqués. « On remarque par exemple que le taux de fécondité chez les gens éduqués est de plus ou moins 4 enfants par famille. Contrairement à celui des gens non éduqués qui est d’environ 5,5 enfants par famille », informe-t-il avant d’insister sur l’éducation des filles. Et de continuer : « Les filles éduquées comprennent mieux l’usage des méthodes contraceptives modernes ou naturelles. Par ailleurs, renchérit Dr Ndacayisaba, les filles qui ont fréquenté l’école ont la chance de se marier étant mûres.

Il rappelle que les femmes à risques sont celles ayant moins de 18 ans, celles qui ont eu des grossesses nombreuses ou celles qui ont plus de 35 ans.

Dr Ndacayisaba fait remarquer que l’usage des méthodes contraceptives modernes est une décision partagée du couple et nécessite l’éclairage d’un médecin. Pourtant, explique-t-il, certains leaders religieux sont contre l’usage de ces méthodes. Or, ceux-ci peuvent utiliser ces méthodes clandestinement. « Pourtant, il y a peu de chances que le gardien des brebis de Dieu vienne au secours d’un enfant d’un adepte de son église malnutri », déplore-t-il.

Dr Ndacayisaba se demande également qui a péché contre Dieu entre celui qui a mis au monde 10 enfants et qui ont fini par devenir des bandits et celui qui a utilisé les méthodes de contraceptives et qui a mis au monde 3 enfants qui ont eu la chance de fréquenter l’école et de bien vivre.

Et de poursuivre : « Dans les villes par exemple, une famille peut avoir 3 enfants. A côté, elle élève 7 autres enfants des oncles ou des tantes…Si les enfants de l’oncle ou de la tante ne parviennent pas à vivre aisément, des conflits familiaux naissent. Sans oublier la naissance des conflits fonciers, car les oncles et les tantes imagineront que les 3 enfants constituent une menace pour leurs 7 enfants ».

Dr Ndacayisaba constate également une fuite des responsabilités de la part des époux lorsqu’un bon nombre d’enfants commencent à réclamer les droits vitaux. Ce qui fait que ces époux rentrent tard la nuit, lorsque leurs enfants dorment. D’où, il s’avère nécessaire de cultiver la culture d’un dialogue permanent entre les couples sur la gestion de ceux qu’ils vont mettre au monde.

Une population très jeune en besoin d’un accompagnement

« La société burundaise porte en son sein une force positive de beaucoup de jeunes et d’adolescents encore dynamiques. Ces derniers entament leurs parcours physique, émotionnel et psychologique vers l’âge adulte. Cela dans un monde en évolution rapide qui contient à la fois des opportunités et des défis », explique Dr Ndacayisaba.

Il indique que ces jeunes sont exposés à des risques et à des pressions d’une complexité que leurs parents n’ont jamais connue. La mondialisation a accéléré les changements.

« Les adolescents reçoivent des messages contradictoires sur la manière de gérer leurs choix quotidiens, qui auront des conséquences pour toute leur vie sur le développement de leur santé en général et la santé de la reproduction en particulier », signale le patron du PNSR avant de faire savoir que certains d’entre eux n’ont même pas l’accès aux services adaptés à leurs besoins spécifiques. Cela afin de les préparer à devenir des adultes informés pour adopter des comportements sains et responsables, confiants et réfléchis.

Dans ce manque de choix éclairé, notifie Dr Ndacayisaba, nombre d’entre eux sont exposés à un risque de maternité et de paternité précoce, de grossesses non désirées, d’avortements à risque, d’infections génitales, y compris les Infections Sexuellement Transmissibles et le VIH/Sida, les abandons scolaires pour cause de grossesse, la malnutrition, l’anémie liée aux grossesses…

Or, conclut-il, le droit de les informer sur la santé sexuelle et de la reproduction est essentiel pour que ces jeunes contribuent à la réduction de la pauvreté et à la garantie d’un développement durable et équitable.

 

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A propos de l'auteur

Mélance Maniragaba.

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